MALEVIL
France, Allemagne – 1981
Support : Bluray
Genre : Science-fiction
Réalisateur : Christian de Chalonge
Acteurs : Michel Serrault, Jacques Dutronc, Jacques Villeret, Robert Dhéry, Jean-Louis Trintignant, Hanns Zischler…
Musique : Gabriel Yared
Image : 2.35 16/9
Son : Français Dolby Audio 2.0
Sous-titres : Aucun
Durée : 120 minutes
Editeur : Tamasa Diffusion
Date de sortie : 04 juin 2024
LE PITCH
Une catastrophe nucléaire a tout ravagé. Quelques survivants tentent de s’organiser se demandant comment et pourquoi reconstruire. Qui a pu échapper à l’anéantissement et combien sont en mesure de réagir ? Les gens de Malevil vont se sauver par la persévérance, l’amitié, l’amour. La civilisation reprend ses droits, et même sa tyrannie.
Et après ?
Si on sait déjà le cinéma français plutôt frileux dès qu’il est question de cinéma de genre allant du fantastique à la science-fiction, le récit post-apocalyptique y reste plus rare encore. Doté d’un casting digne d’une grande production mainstream (Serrault, Dutronc, Villeret, Trintignant…), Malevil reste définitivement un cas à part.
A l’origine du film, il y a bien entendu l’imposant roman de Robert Merle, auteur constamment travaillé par un intérêt des très prononcé pour l’étude du groupe en micro-sociétés. Des romans parfois inspirés par des contextes on ne peut plus réels (Derrière la vitre sur le siège de L’université de Nanterre en 68 ou Le Jour ne se lève pas pour nous sur l’équipage d’un sous-marin), mais aussi avec des velléités fantastiques ou d’anticipation comme pour L’ile (les hommes disparaissent de la surface de la terre) ou le présent Malevil et sa dévastation globale que l’on imagine nucléaire. L’occasion surtout pour l’auteur de montrer l’humain face au néant, à la nécessité de survie et à l’élan de reconstruction, y multipliant à chaque lieu visité, les approches sociologiques et politique différentes, pour y jouer la carte de la comparaison. 600 pages vastes, complexes et passionnantes, qui ne pouvaient bien entendu pas tenir dans un simple film de deux heures. Aidé par le camarade Pierre Dumayet (Mourir d’aimer…, Verdict, Il n’y a pas de fumée sans feu…) qui avait déjà œuvré sur son précédent L’Argent des autres, Christian de Chalonge (L’Alliance, Docteur Petiot…) opère alors de grandes coupes dans le corps du texte, se concentrant essentiellement sur le camp de Malevil, apparenté plus ou moins à un phénomène démocratique, pour lui opposer dans la dernière partie la dictature du « tunnel », réduit grandement le nombre de personnages et gomme les questions plus houleuses de la perpétuation de l’espèce (pas de sexualité ici), de la religion et d’un discours politique plus identifié.
Foules sentimentales
Des choix qui feront grogner certains fans du roman et surtout son auteur qui réclamera que l’on retire son nom du générique. Pourtant en se montrant à la fois plus recentré, plus concentré et plus évasif, ce Malevil prend alors des airs de grande allégorie sur les mécaniques de notre espèce, sa force de résilience, son besoin de vivre en société, mais aussi sa propension à la méfiance envers l’autre et l’éternel recommencement de la violence et la tentation du totalitarisme. Très économe sur les dialogues (après la catastrophe de longues minutes passent son que la parole ne soit capable de s’exprimer), le métrage caractérise toujours ses personnages par leur prise de position et par leurs actions, laissant d’ailleurs très pertinemment leur passé et leurs « motivations » profondes dans le hors champs. De pauvres hommes, abandonnés dans une campagne dévastée, qui retrouvent aussi le temps de quelques accalmies les bonheurs d’une vie plus simple et apaisée. Si Christian de Chalonge n’est pas forcément très à l’aise avec les épisodes qui auraient pu se tourner vers le spectaculaire (la petite bataille finale est tout de même assez pauvre), il se montre cependant très fin sociologue, voir entomologiste, excellent directeur d’acteurs (Serrault est d’une admirable sobriété, Trintignant terrifiant de normalité) et s’empara à merveille des paysages désolés et lds ruines imaginées par Max Douy (Moonraker, Un Château en enfer, Quai des orfèvres…), qui d’ailleurs repartir avec le César. L’apocalypse avec ses pluies noires, sa terre sèche, ses arbres dévastés et ses survivants hagards, parfois revenus à l’état de bête n’a que rarement été aussi crédible à l’écran.
Dans ce même élan, la fin du film, qui trahie à nouveau le roman de Robert Merle, apporte effectivement plus de question qu’elle n’en résout, mais laisse surtout le spectateur face à un questionnement désabusé sur l’état du monde moderne, la docilité de nos contemporains et leurs aspirations à un vrai monde meilleur. Un très beau film de science-fiction, fragile mais marquant.
Image
Déjà sorti en DVD chez le même éditeur, mais au début des années 2010, Malevil revient en Bluray avec un nouveau Master HD affiché, mais qui manifestement provient de la même source. La restauration a été ici relativement limité avec un effort plus poussé sur la colorimétrie, plus chaude et contrastée, et sur la définition, légèrement plus creusée, mais de nombreuses petites taches et brulures de cigarette sont toujours assez visibles. Un peu dans son jus, la copie permet tout de même de beaucoup mieux profiter des efforts portés sur les décors, d’apprécier la direction artistique très intéressante du film, mais avec un piqué souvent en retrait et un grain fluctuant, le Bluray semble un peu daté au vu des standards actuels.
Son
Tamasa garde son habituel Dolby Audio 2.0 avec un résultat tout à fait convenable clair et assez équilibré. Quelques tous petits effets de souffle et de très rares grésillements se font en entendre, mais cela reste très discret.
Interactivité
L’éditeur reprend ici son entretien très intéressant avec le réalisateur Christian de Chalonge déjà présent sur l’ancien DVD. Le cinéaste y revient forcément sur le nécessaire élagage du roman, sa volonté de resserrer la trame sur le principal camp de survivants et sur la lente reconstruction d’une organisation sociale. Il y discute aussi un peu de la nature humaine, de la survie de l’espèce et du travail important effectué pour donner corps à ces décors de fin du monde.
Liste des bonus
« L’Apocalypse est pour demain » : Malevil par Christian de Chalonge (18’).