MAD MAX : ANTHOLOGIE
Mad Max, Mad Max 2, Mad Max Beyond Thunderdome, Mad Max : Fury Road – Australie, Etats-Unis – 1979, 1981, 1985, 2015
Support : 4K Ultra HD
Genre : Science-Fiction, Action
Réalisateur : George Miller, George Ogilvie
Acteurs : Mel Gibson, Joanne Samuel, Hugh Keays-Byrne, Steve Bisley, Bruce Spence, Vernon Wells, Tina Turner, Frank Thring, Tom Hardy, Charlize Theron, Nicholas Hoult, …
Musique : Brian May, Maurice Jarre, Junkie XL
Durée : 88, 96, 107, 120 minutes
Image : 2.40 16/9
Son : Anglais DTS HD Master Audio 5.1 (Mad Max), Dolby Atmos et DTS HD Master Audio 2.0, Français Dolby Digital 5.1 et Dolby Atmos (Fury Road)…
Sous-titres : Français, Anglais, Italien, Espagnol …
Éditeur : Warner Bros Home Entertainment France
Date de sortie : 21 septembre 2022
LE PITCH
Dans un futur ravagé par la guerre, la violence tribale et les pénuries d’essence et de matières premières, Max Rockatansky, surnommé le « Guerrier de la route », un ancien policier brisé par la mort de sa femme et de son fils, affronte des gangs motorisés, …
Métal Hurlant
Que serait le cinéma d’anticipation sans la saga Mad Max ? En quatre films (et bientôt cinq), de 1979 à 2015, le réalisateur australien George Miller a imposé sa vision d’un avenir sombre et post-apocalyptique où la loi du plus fort s’exprime sur les routes sans fin d’une terre désolée et traversée par des bolides customisés. Mythique ? Non, mythologique !
1972. Durant son internat à l’hôpital Saint Vincent de Sidney, George Miller profite de son temps libre pour s’adonner à sa vraie passion : la réalisation de courts-métrages expérimentaux. En compagnie de Byron Kennedy, un autre mordu de cinéma rencontré l’année précédente et devenu un ami proche, il fonde une compagnie de production indépendante, Kennedy Miller Productions, et se met à rêver d’un long-métrage retrouvant la pureté et l’efficacité brute des pionniers de l’ère du muet. Les blessés résultant d’accident de la route qu’il voit défiler aux urgences jour après jour ainsi que les tensions sociales et politiques autour du premier choc pétrolier lui soufflent l’idée de ce qui deviendra Mad Max.
Tourné dans des conditions parfois rocambolesques et avec un budget le plus souvent insuffisant eu égard aux cascades et aux scènes de poursuites ambitieuses imaginées par le duo Miller/Kennedy, Mad Max déboule en trombe sur les écrans australiens à la mi-avril de l’année 1979 avant d’être distribué avec succès dans le monde entier … sauf dans une poignée de pays qui, comme la Nouvelle-Zélande ou la Suède, l’interdisent purement et simplement en raison de sa violence jugée irresponsable. En France, la censure de l’époque Giscard, l’affuble d’un classement X et restreint sa diffusion au circuit des salles pornographiques. Ces réactions parfois épidermiques et parfaitement excessives contribuent à développer un culte autour d’une œuvre labellisée « sulfureuse » un peu malgré elle puisque Miller, loin d’être complaisant, suggère la violence davantage qu’il ne la montre.
Véloce, puissante, évocatrice, fétichiste, la mise en scène de George Miller entraîne le spectateur dans un western punk et dystopique qui sent le cuir, le bitume, la tôle froissée et le gas-oil et qui emprunte au vigilante movie façon Dirty Harry et Death Wish. Derrière le basculement du héros (la révélation Mel Gibson) dans la vengeance et la folie se dessine le portrait d’une civilisation au bord de l’effondrement. Fin observateur, le cinéaste s’interroge déjà sur l’avenir d’une société accroc à la voiture, au vrombissement des moteurs et au pétrole.
Galvanisé par l’expérience du premier film, George Miller embraye donc sans attendre sur une suite encore plus spectaculaire. Pour dépeindre ce nouveau monde après l’Apocalypse, le réalisateur puise son inspiration dans l’Antiquité et les Siècles Obscurs. En dépit des grands espaces, du soleil écrasant, de la poussière, des crêtes iroquoises et des gueules patibulaires qui conservent des liens avec le western hollywoodien de l’âge d’or et son cousin transalpin des 60’s (façon Sergio Leone), Mad Max 2 est un péplum pur jus où se rejoue le siège de Rome, dernier vestige de la civilisation, par les hordes barbares ainsi que l’exode du peuple élu vers la terre promise, le tout au son d’un score baroque de Brian May dont les cuivres épiques et martiaux convoquent tout autant le Miklos Rosza de Ben-Hur que le Alex North de Spartacus.
Moins rugueux et sans doute moins abrasif dans son approche de la violence et de la décadence que son prédécesseur, Mad Max 2 n’en reste pas moins très virulent sur le fond et confirme la vision d’un auteur se désolant des errements cataclysmiques d’une société sciant la branche sur laquelle elle est assise. Quarante ans plus tard, le prologue narrant la chute de notre civilisation d’une voix sévère et à coup de stock-shots sélectionnés et assemblés avec un soin maniaque n’a rien perdu de son pouvoir visionnaire. Surtout aujourd’hui, alors que se profile l’épuisement certain de nos ressources énergétiques et que les démocraties vacillent. Pour le reste, Miller enfile les scènes cultes comme des perles, filme son héros/gladiateur à la façon d’un spectre revenant peu à peu à la vie au contact d’une colonie d’idéalistes et de farfelus attachants et construit avec une science ahurissante du cadre, du découpage et du montage l’une des scènes de poursuite parmi les plus démentes jamais vue sur un écran de cinéma.
Maintes fois copié mais jamais égalé (même si Waterworld, son « remake » nautique avec Kevin Costner, le talonne de très près), Mad Max 2 est un chef d’œuvre et une leçon de cinéma à 24 images par seconde et à 200 km à l’heure. Soucieux de bâtir un mythe sur les ruines de notre monde, Miller a donné naissance à un genre à part entière (le post-apo), a fait naître des centaines de vocations d’artistes et a définitivement installé la silhouette du Guerrier de la Route dans notre imaginaire collectif.
Le prix du danger
Le décès le 17 juillet 1983 dans un accident d’hélicoptère de Byron Kennedy plonge George Miller dans une tristesse telle que le cinéaste envisage de stopper net la mise en chantier du troisième Mad Max. Pourtant, histoire de noyer son chagrin dans le travail et d’occuper son esprit, Miller reprend le chemin des plateaux. Il entraîne dans l’aventure George Ogilvie, un metteur en scène et un acteur issu de la scène théâtrale et avec qui il a collaboré l’année précédente sur la mini-série dramatique et historique The Dismissal. Diversement apprécié à sa sortie à l’été 1985, Mad Max : Au-delà du Dôme du Tonnerre mérite pourtant aujourd’hui amplement d’être réhabilité. Même s’il apparaît clairement que le cœur n’y est pas toujours, que la mise en scène est loin de faire preuve de la même maîtrise que par le passé et que la narration est un peu plus laborieuse et souffre d’un gros ventre mou à mi-parcours, ce troisième film est pourtant un jalon essentiel dans la saga entamée six ans plus tôt, riche d’idées et de parti-pris passionnants. Premier miracle, le virage assumé vers le cinéma d’aventures grand public ne se fait jamais au détriment de son anti-héros et de l’univers impitoyable dans lequel il évolue. Avec la ville de Bartertown, dernier bastion du capitalisme où l’on s’éclaire grâce au méthane produit par de la merde de cochon, où l’on règle ses différends dans une arène de gladiateur et où les jugements sont rendus par un Monsieur Loyal usant de sa propre version de La Roue de la Fortune, Miller propose une satire acide des 80’s et de sa course au consumérisme via l’abrutissement des masses. Le réalisateur poursuit également son exploration des mythes en racontant son histoire au travers du prisme du conte pour enfants, rendant au passage un hommage (un peu trop) appuyé au « Peter Pan » de J.M. Barrie. Enfin, en rejouant la poursuite finale du film précédent mais en y remplaçant le camion-citerne par un train, George Miller paie enfin sa dette au Mécano de la Générale de Buster Keaton, influence majeure de la franchise. Ajoutez à ce cocktail déjà fort réjouissant un score très réussi de Maurice Jarre agrémenté de deux tubes pop rock de Tina Turner (qui joue également Entity, reine charismatique de Barter Town), le retour de Bruce Spence dans une nouvelle mouture du Gyro Captain et un épilogue portant en lui une émotion inattendue et vous obtenez un résultat plus que surprenant pour un blockbuster que son auteur avoue tout de même avoir réalisé en pilotage automatique !
Fast & Furious
Trente années séparent Mad Max : Au-delà du dôme de Tonnerre de Mad Max : Fury Road. Trois décennies d’occasions manquées, de faux départs, de reports pour un quatrième volet qui fonce pied au plancher et qui impressionne la critique et le public en jouant la carte de la virtuosité, de la démesure, du féminisme et de l’écologie … sans toutefois faire oublier quelques vilains défauts. Tout a été déjà dit et écrit sur un film où la forme et le fond s’imbrique avec un degré de cohérence encore rarement atteint. Non seulement Miller parvient, à 71 ans, à dominer la concurrence de la tête et des épaules en livrant une gargantuesque course-poursuite ininterrompue sur près de deux heures, avec des enjeux sans cesse renouvelés et enrichis et par le biais d’un découpage à ce point lisible et dynamique qu’il devrait être enseigné dans toutes les écoles de cinéma mais le cinéaste vétéran se permet de souligner avec une intelligence redoutable le lien entre écocide, patriarcat toxique et populisme génocidaire, son Immortan Joe faisant la synthèse de toute une nouvelle caste d’hommes politiques aussi grotesques que profondément dangereux, de Donald Trump à Jaïr Bolsonaro en passant par Rodrigo Duterte, et jusqu’au nouveau président argentin Javier Milei. Mais, pour toutes ces (immenses) qualités, Mad Max Fury Road se révèle malheureusement incapable de faire digérer l’absence de Mel Gibson dans le rôle-titre, l’acteur ayant été écarté pour tout un tas de raisons et pas seulement pour son âge ou son agenda. Tom Hardy a du talent mais il n’est JAMAIS Max Rockatansky. Le cas du personnage de Charlize Theron est lui assez différent. L’actrice est parfaite et son look mémorable mais Furiosa ne devient intéressante que lorsqu’elle choisit d’opérer un demi-tour pour foncer dans le tas et s’emparer de la Citadelle d’Immortan Joe, soit avec une heure et demie de retard. Au bout du compte, ce sont bel et bien Nicholas Hoult dans le rôle du warboy Nux et le quintet d’actrices jouant les « épouses » d’Immortan Joe qui volent le cœur du film, au grand dam de son duo de stars. Quant à sa mythologie, à force de malmener une continuité déjà fragile, Mad Max Fury Road échoue en quelque sorte à gagner sa place auprès de la trilogie originelle. Aussi brillant soit-il, impossible d’y voir autre chose qu’un chapitre « officieux ».
Reste désormais à voir ce que Furiosa, préquel de Fury Road, apportera comme sang neuf à la franchise. Une parenthèse, c’est déjà certain. Mais de quelle nature ? La prudence est cette fois de mise et la vérification se fera sur pièce le 24 mai 2024.
Image
On ne s’étendra bien entendu pas sur le transfert 4K de Fury Road qui est naturellement parfait en tout point, vif, précis et spectaculaire, puisque les véritables enjeux du passage de la saga Mad Max sur format UHD se situaient du coté bien entendu des trois premiers films. En effet les copies Bluray, plus ou moins retravaillées affichaient tout de même des faiblesses évidentes, voir frôlait la présentation honteuse pour Mad Max 3. Heureusement ce dernier et Mad Max 2 s’impose enfin avec des masters solides et dignes de leur importance. Sans être totalement incritiquables (certes plans laissent encore échapper quelques sorties neigeuses) ces dernières assurent enfin des cadres stables, lumineux et assurant un mélange plus qu’agréable de précision, de propreté mais aussi de fidélité avec des argentiques et un grain de pellicule bien présent, relevés avec parcimonie par quelques boost bienvenus du HDR. Solide et rugueux, ils se font voler la vedette par la copie renversant du premier film, version plus contrastée et ferme encore que la restauration américaine de Kino Lorber, dont c’est la source principale. Organique, vibrant, minutieux et d’une propreté inimaginable aux vues de ses origines et des longues années de master fatiguée, le premier Mad Max en met, plus que jamais, plein la vue.
Son
Il y en aura pour tous les goûts avec en première info d’importance : la disparation définitive de l’horripilant doublage américain du premier film. Désormais uniquement dans sa version australienne (et doublé française mais bof) ce dernier se déguste dans DTS HD Master Audio 2.0 d’origine intense et direct, ou dans un DTS HD Master Audio 5.1 dont la modernisation, malgré un mix initial volontairement chaotique, le rapproche du dernier épisode de la saga. Une sensation plus prégnante encore avec les deux Dolby Atmos de Mad Max 2 et 3 qui viennent ajouter avec efficacité et un naturel étonnant de nombreux effets dynamique, racés, soulignant autant l’énergie mécanique, la déflagration des poursuites et des cascades les plus sidérantes, mais aussi un relief à même de retranscrire les espaces même du film (désert, vents, rapprochement des véhicules, hurlements des hordes…). Savoureux. Bien entendu le Dolby Atmos de Fury Road écrase tout sur son passage, mais ça on le savait déjà depuis le précédent Bluray.
Interactivité
Multi réédité, en solos ou en coffrets, la saga Mad Max est rapidement devenue un classique des ressorties de noël. Le coffret en présence est sa dernière itération marquant malheureusement un appauvrissement progressif de son contenu. On évacue donc le DVD bonus avec le documentaire sur la série, mais aussi les copies Bluray et donc tous les bonus de Fury Road ainsi que la version « chromée » du film. Seul Mad Max 2 propose donc du matériel puisqu’il était contenu depuis le départ sur son disque UHD. Une présentation du film par Léonard Maltin (et on s’en fout un peu), un commentaire audio de George Miller et du chef opé Dean Semler (mais sans sous-titres…) et surtout l’excellent documentaire rétrospectif « Road War » mélangeant interviews inédites, entretien d’archives (Mel Gibson) et images du tournage. Remplis d’anecdotes et absolument passionnant lorsqu’il évoque la naissance du film et sa stature mythologique.
Liste des bonus
Mad Max 2 : Introduction par Leonard Maltin (3’), Commentaire audio de George Miller et Dean Semler (VO), « Road War » : making of (49’).