LOS ANGELES 2013
Escape From L.A. – Etats-Unis – 1996
Support : UHD 4K & Bluray
Genre : Science-fiction
Réalisateur : John Carpenter
Acteurs : Kurt Russell, Stacy Keach, Cliff Robertson, Steve Buscemi, George Corraface, A.J. Langer, Michelle Forbes, Valeria Golino, Pam Grier, Peter Fonda, …
Musique : John Carpenter et Shirley Walker
Durée : 101 minutes
Image : 2.39 16/9
Son : DTS-HD Master Audio 5.1 Anglais , Dolby Digital 5.1 Français, Anglais, Allemand et Espagnol
Sous-titres : Français, Anglais, Allemand, Espagnol, …
Editeur : Paramount Pictures France
Date de sortie : 23 février 2022
LE PITCH
Séparé du continent nord-américain à la suite d’un tremblement de terre apocalyptique, l’île de Los Angeles sert désormais de lieu de déportation pour tous ceux que le nouveau gouvernement « moral » des Etats-Unis juge indésirables. Contraint par la force, le hors-la-loi Snake Plissken doit s’infiltrer dans ce lieu dangereux pour y retrouver la fille du président et l’arme expérimentale qu’elle a dérobée …
Grosse pomme ou cité des anges ?
Quinze ans après New York 1997, John Carpenter retrouve Snake Plissken, le bandit borgne, anarchiste et taciturne, toujours incarné par Kurt Russell. Avec une enveloppe de 50 millions de dollars en poche, le réalisateur d’Halloween et The Thing déjoue toutes les attentes et transforme le blockbuster estival tant espérée par la Paramount en bisserie jouissive et incorrect dont le dénouement atteint des sommets de nihilisme. Plus qu’un film, un doigt d’honneur explosif adressé à tout un système.
L’idée de Los Angeles 2013 ne vient pas de John Carpenter mais de son vieux complice Kurt Russell. S’il garde une place dans son cœur pour le film original de 1981, le cinéaste n’y voit pourtant rien d’autre qu’une simple série B et s’avoue dépasser par le culte qui s’est développé autour du personnage de Snake Plissken. Comme ce fut déjà le cas pour Halloween II (qu’il finira par écrire et produire, plus par obligation qu’autre chose), il rechigne, il hésite, il temporise, pas forcément excité par le concept d’une suite. Mais la patience et l’obstination de Russell finissent par payer, lequel laisse échapper l’idée d’un remake déguisé. L’argument magique. Grand admirateur d’Howard Hawks, Carpenter est loin d’ignorer les vertus d’un tel exercice. Assaut et The Thing peuvent en témoigner. Los Angeles 2013 sera donc son El Dorado à lui. « Plus les choses changent, plus elles restent les mêmes », remarque, mi-amusé, mi-fataliste, Snake Plissken et ce, à deux reprises. Le décor a beau être différent, Los Angeles 2013 raconte la même chose que New York 1997, les péripéties, les personnages et les répliques de ce dernier étant systématiquement revisités au travers d’un miroir déformant. Au président succède sa fille, au Duke de New York le révolutionnaire (de pacotille) Cuervo Jones, à une bombe implantée dans le cou un (faux) virus létal, « je te croyais mort » devient « je te croyais plus grand », un match de basket remplace le match de boxe et le compte à rebours est ramené de 24 heures à 10 heures, un détail qui en dit long sur ce que pense d’un Carpenter d’un monde qui veut aller toujours plus vite.
L’île des damnés
Après une décennie passée à lutter contre les modes et les vicissitudes du système hollywoodien (l’échec des Aventures de Jack Burton dans les griffes du Mandarin a durablement marqué le cinéaste), John Carpenter sait qu’il n’a plus rien à prouver. Mais il a désormais des choses à dire et une éthique à faire valoir. L’attrait principal de New York 1997 résidait dans sa maîtrise spectaculaire du cadre, du rythme et d’un budget minimaliste littéralement transcendé par l’inventivité de techniciens rompus à la méthode bout de ficelle des productions Corman. Le luxe (tout relatif) des moyens alloués à Los Angeles 2013 produit l’effet contraire. Défiguré par des effets spéciaux inachevés et la photographie factice et très inégale de Gary B. Kibbe, la virée californienne de Snake Plissken verse plus ou moins consciemment dans le kitsch et la vulgarité. Mais la laideur du film renforce en réalité son propos et épouse le point de vue de son anti-héros, plongé dans un monde où tout sonne faux, où tout EST faux, du virus Plutoxin-7 à la moralité du président en passant par les résidents difformes de Beverly Hills et la révolution des partisans de Cuervo Jones, et qui ne mérite même plus d’être sauvé. Le choix de situer l’action de ce second opus à Los Angeles est loin d’être innocent et le long travelling latéral révélant les fameuses lettres géantes d’Hollywood en flammes et qui lance le climax sonne comme une note d’intention.
Écrit à six mains par John Carpenter, Kurt Russell et la regrettée Debra Hill, Los Angeles 2013 s’est construit en réaction à l’émergence d’une nouvelle forme de politiquement correct qui bouleverse le cinéma américain depuis le début des années 90. Peu à peu et sous la pression de ligues de parents inquiets et frustrés, le cinéma grand public se teinte d’un discours moralisateur, infantile et hypocrite dont Independence Day peut être vu comme le porte étendard (des milliards de morts absents du cadre, une confusion dangereuse entre patriotisme et humanisme et des enjeux traités par-dessus la jambe). Sorti un mois avant la bouse intergalactique de Roland Emmerich, Los Angeles 2013 en est la parfaite antithèse, un film qui se permet d’être à la fois bordélique et parfaitement maîtrisé quand il le faut, à l’humour sombre et adulte (Valeria Golino abattue par les balles d’un gang après avoir vanté la liberté dont elle jouit à Los Angeles), qui navigue d’un genre à l’autre avec une désinvolture délicieuse et qui se permet de valider l’Apocalypse d’un seul regard face caméra faisant rageusement voler en éclats le quatrième mur. Extinction des feux, y a plus rien à voir. Suicidaire mais essentiel.
Image
Il y a encore quelques semaines, il fallait se tourner vers l’import pour dénicher une copie haute-définition de Los Angeles 2013. Réutilisant le master déjà très honorable du DVD, la galette bleue et nue comme un ver de Paramount faisait le taf, grâce à un master propre, au piqué tranchant mais auquel on pouvait toutefois reprocher une colorimétrie un peu terne et des jaunes virant presque au vert. Sorti de nulle part, ce master 4k vient corriger ces menus défauts avec des noirs plus profonds, des contrastes plus marqués, une fidélité bienvenue au grains cinéma d’origine (là où le bluray pouvait sembler trop lisse) et une profondeur de champ améliorée. Après les sorties de Studiocanal, de Carlotta et d’Universal, le format UHD n’en finit décidément pas de gâter les fans de John Carpenter.
Son
Le mixage DTS réservé à la version originale écrase par son ouverture et sa dynamique des pistes Dolby Digital percutantes mais trop systématiques dans leurs effets (des basses, des basses, des basses) quand elles ne souffrent pas de revers techniques avec une inversion des canaux avant/arrière sur la version française. Les amoureux du doublage d’origine risquent donc de faire la gueule et on peut les comprendre après une aussi longue attente. L’occasion de se convertir à l’anglais ?
Interactivité
En dehors d’une bande-annonce sur le bluray, c’est le désert total. Même pas une intervention d’un étudiant en cinéma filmée au smartphone dans une contre allée de la Sorbonne par une nuit pluvieuse. C’est un peu rageant et il ne reste que le packaging et les goodies pour se raccrocher aux branches. Verdict : un point pour le très beau poster réversible qui viendra décorer votre coin de home cinema et prouvera à tous vos amis que vous avez bon goût.
Liste des bonus
Bande-annonce.