LONG WEEKEND

Australie – 1978
Support : Bluray
Genre : Horreur
Réalisateur : Colin Eggleston
Acteurs : John Hargreaves, Briony Behets
Musique : Michael Carlos
Durée : 97 minutes
Image : 2.35 16/9
Son : Anglais et français DTS HD Master Audio 2.0 mono
Sous-titres : Français
Editeur : Le Chat qui fume
Date de sortie : 26 novembre 2020
LE PITCH
Dans la périphérie de Melbourne. Afin de redonner une chance à leur couple en crise, Peter propose à son épouse Marcia, dépressive à la suite d’un avortement, de passer le week-end au bord de la mer, dans un endroit retiré de la civilisation. Elle accepte à contrecœur et tous deux parviennent, non sans difficulté, à destination. Mais l’un comme l’autre sont plus préoccupés à régler leurs comptes qu’à respecter la nature environnante, ne se doutant pas que celle-ci peut se rebeller, voire se montrer impitoyable.
Killing Beach
Fleuron de la fameuse Ozploitation et thriller fantastique récompensé dans de multiples festivals (dont Avoriaz), Long Weekend est d’une certaine façon le film d’agression animale ultime. Celui où lassé de subir la bêtise humaine, la nature reprend ses droits et devient le croquemitaine définitif, terminal.
Longtemps oublié, boudé, dans son pays d’origine avant d’être redécouvert au début des années 2000 (avec entre autres un remake réussi signé Jamie Blank), Long Weekend est le rejeton naturel de deux courants surgissant dans les années 70. L’Ozploitation tout d’abord, soit une résurrection économique du cinéma de genre australien qui donna naissance à un déchaînement de séries B aussi spectaculaires qu’uniques. Un certain éveil écologique sur grand écran ensuite, donnant autant d’œuvres de science-fiction désespérées (Silent Running) qu’une succession d’invasions et de revanches animales en tous genres. Dans le prolongement de l’implacable Les Dents de la mer, mais aussi de productions plus ouvertement « exploitation » (Slugs et ses limaces, Grizzly et son ours, L’Horrible Invasion et ses tarentules, Frogs et ses grenouilles…), le scénariste Everett De Roche (Patrick, Harlequin, Déviation mortelle, Razorback…) pousse la logique plus loin et imagine une nature qui développerait son propre système immunitaire et rendrait la monnaie de sa pièce à ceux qui ne la respecterait pas assez (si seulement). En l’occurrence dans Long Weekend, un couple de la middle class australienne, parfaitement installé dans leur banlieue de Melbourne, entre frigo dernier cris et poulets cellophanés, dont monsieur s’imagine pouvoir devenir le roi du camping et du tir au canard le temps d’un week-end.
Divorce écologique
Du camping d’arriviste, à l’équipement coûteux et noyé sous les gadgets et la toile orange. Du tourisme égocentrique où les doux époux vont laisser exploser leurs frustrations, colères et incapacités à se retrouver. Ne respectant ni l’autre, ni leur environnement, ils provoquent un rejet immédiat chez le spectateur, les trouvant difficilement sympathique dans leurs invectives, autant que dans leur absence de considération pour le superbe paysage sauvage – célébré dans un scope anamorphosé somptueux – véritable théâtre de leurs bassesses. Un kangourou percuté sur la route en pleine nuit (accident qui trouvera un écho méchamment ironique), un mégot fumant jeté sur le bas-côté, un crabe écrasé sur la plage, un œuf d’aigle piqué dans le nid puis éclaté sur un arbre…. Tout est stupide, gratuit et d’une barbarie sordidement ordinaire comme lorsque Briony Behets (Night of Fear) vide une bouteille d’insecticide sur de malheureuses fourmis venu grappiller les restes. A contrario du remake de 2008, pas une once d’humour ou de décalage ici, le réalisateur Colin Eggleston manie habilement une froide cruauté, réussissant en s’accrochant au drame conjugal, à faire monter graduellement une tension terriblement palpable, du naturalisme anthropologique au cauchemar darwinesque. Un fantastique économe où les bruitages sauvages, les attaques de volatiles et l’avancée constante d’un cadavre de dugong abattu sur la plage, relèvent plus de l’étrangeté d’un épisode de La Quatrième dimension, que de la série B animale. Alors que la virilité et la fierté de John Hargreaves (Les Cascadeurs de la mort) se fait la malle, le film vrille au cauchemar surréaliste où un adorable opossum devient une menace mortelle, chaque bosquet est un labyrinthe inextricable.
Un Huis clos en pleine nature terriblement tenace et peut-être encore plus savoureux et jubilatoire aujourd’hui.
Image
Avec un peu de retard sur les voisins anglo-saxons, Le Chat qui fume nous permet enfin de profiter de Long Weekend en Bluray. Produit en 2015 le master date maintenant un petit peu et ne pousse pas jusqu’à une restauration avec scan 4K, mais reste extrêmement solide. En particulier du côté des couleurs, plus chaudes et tranchées que jamais, et une propreté de cadres (restes quelques traces mais rien de gênant) que les possesseurs de la vieille VHS ne pouvaient même pas imaginer. Les séquences les plus lumineuses sont d’ailleurs assez impressionnantes avec leur piqué dessiné et précis, mais petit budget oblige et âge grandissant n’aidant pas, les bord les scènes nocturnes ne sont pas toujours très stables et les grands horizons maritimes peuvent laisser échapper un grain un peu floconneux.
Son
Sobre et efficace le DTS HD Master Audio 2.0 mono respecte à la lettre les intentions d’origine avec désormais une propreté et une clarté toute fraiche. L’ambiance sonore très particulière du film (entre jump scare audio et décalage) fait beaucoup et malgré l’efficacité de la piste présentée ici, on aurait été curieux d’expérimenter le DTS HD Master Audio 5.1 de l’édition US.
Le doublage français lui, plus plat avec les voix systématiquement en avant, est beaucoup moins mémorables avec des doubleurs capables mais pas forcément idéaux.
Interactivité
Toujours présenté sous la forme de l’élégant fourreaux cartonné limité à 1000 ex., l’édition française de Long Weekend reprend à son profit les suppléments produit pour la galette australienne d’Umbrella. Du très bon donc avec une nouvelle série d’interviews échappées (et en versions longues) du fameux documentaire Not Quite Hollywood, avec l’actrice Briony Behets, le scénariste Everett De Roche et le chef opérateur Vincent Monton, permettant alors de retracer sobrement le tournage et la production du film. De l’étrange aussi avec ce double item confectionné par la famille du réalisateur Colin Eggleston (soit ses deux fils et sa dernière épouse, l’actrice de Long Weekend) qui reviennent avec tendresse sur une filmographie inégale et éclatée. De l’agaçant aussi avec cette nouvelle table ronde de journalistes australiennes qui évoquent les grands films d’horreur écolo de l’époque et les particularismes de Long Weekend, avec beaucoup d’aisance certes mais aussi une posture un peu crispante.
Et Le Chat qui fume aime toujours ajouter sa petite patte. Ici en l’occurrence une nouvelle présentation du film par Éric Peretti, programmateur du festival Hallucinations Collectives de Lyon, qui voit le métrage comme l’une des réussites majeures de l’Ozploitation, et en tout cas son favori, et en offre un portrait qui résume efficacement tous les suppléments vus plus haut. L’édition comprend aussi une interview inédite du producteur Richard Brennan (Les Cascadeurs de la mort), figure importante du cinéma australien renaissant, qui aborde toutes les questions entourant Long Weekend : budget limité, quelques semaines de tournage, sortie boudée en Australie, succès cannois…
Liste des bonus
Long Weekend par Éric Peretti (12’), Colin Eggleston par ses proches, avec l’actrice Briony Behets, Toby Eggleston et Sam Reed (26’), Interview de l’actrice Briony Behets, du scénariste Everett De Roche et du chef opérateur Vincent Monton (18’), Interview du producteur Richard Brennan (24’), Interview audio de l’acteur John Hargreaves (5’), La nature les a reconnus coupables, conversation autour du thème de l’horreur écologique (24’), Fin alternative, Film annonce.