L’HOMME DE RIO
France, Italie – 1964
Support : UHD 4K & Bluray
Genre : Aventure
Réalisateur : Philippe de Broca
Acteurs : Jean-Paul Belmondo, Françoise Dorléac, Jean Servais, Roger Dumas, Daniel Ceccaldi, Adolfo Celi …
Musique : Georges Delerue
Image : 1.66 16/9
Son : Français DTS HD Master Audio 2.0 mono
Sous-titres : Français pour sourds et malentendant
Durée : 125 minutes
Editeur : Coin de Mire Cinéma
Date de sortie : 23 mars 2024
LE PITCH
Adrien Dufourquet, soldat 2ème classe en permission à Paris, assiste à l’enlèvement de sa fiancée, Agnès. Il se précipite sur la trace des ravisseurs et arrive à Orly. Sans un sou en poche, il monte dans un avion à la suite d’Agnès et se retrouve le lendemain à Rio de Janeiro, pris aussitôt entre la police brésilienne et une effroyable équipe de tueurs…
Adrien au Brésil
Et si on disait qu’on serait au Brésil et qu’un vilain nous tirait des flèches dessus ? On devrait aussi récupérer des statues incas, échapper aux méchants, sauter sur le toit d’un immeuble et sauver notre fiancée ? Et si on était des gosses et qu’on vivait un fantasme absolu de cinéma d’aventure ?
C’est plus ou moins ainsi qu’est effectivement né L’Homme de Rio, projet cinématographique totalement improbable apparu d’une simple idée saugrenue lors d’un voyage au Brésil pour présenter le précédent, et déjà formidable, Cartouche avec Belmondo. Pas de structure, pas de but, mais juste cette envie de plonger un jeune héros dans un décors qui lui est parfaitement étranger, exotique, et de suivre le mouvement. Pour charpenter le tout, les nombreux mois d’écritures et les quelques collaborateurs (Jean-Paul Rappeneau, Arian Mnouchkine et Daniel Boulanger) iront généreusement piocher vers l’univers de la BD et en particulier les albums de Tintin. Une référence d’autant plus assumée que De Broca faillit effectivement réaliser Tintin et la toison d’or avant de s’en détacher par manque de liberté et sa difficulté à construire sur un personnage asexué (tous les films du réalisateur parlaient alors de sentiments amoureux et de désirs), et que les emprunts sont visibles comme le nez au milieu de la figure. Les statuettes des 7 Boules de cristal, les cascades de Tintin en Amérique et Tintin au Congo, la poursuite à Moto du Sceptre d’Ottokar… et même une ressemblance troublante entre l’italien Adolfo Celi et Rastapopoulos. La liste peut-être très longue. Mais plus que des détails ou des hommages, c’est surtout un esprit Hergé qui nourrie L’Homme de Rio. Celui d’un mouvement perpétuel, d’une course effrénée, d’une plongée constante dans le danger et l’aventure.
Les aventuriers des statuettes perdues
Si c’était souvent le sens du devoir et la curiosité qui animait le brave Tintin, pour Adrien se sont les beaux yeux de son amoureuse Agnès (splendides Françoise d’Orléac), sorte d’emmerdeuse sublime, qui passe son temps à se faire kidnapper, à le titiller ou à danser pour passer l’ennui. Et pas question de laisser ce dernier exister dans L’Homme de Rio, cinéma spectacle constamment emporté par l’action, l’agitation, alors que le jeune talent de la Nouvelle Vague, Jean-Paul Belmondo se transforme sous nos yeux en nouvelle star de la cascade, à moto, à vélo, en avion, en bateau, à la nage ou à pied, enchainant les cabrioles dignes des grands du muet, se lançant à corps perdu dans une castagne de western, gravissant la façade d’un hôtel sans jamais perdre sa décontraction, son œil amusé et son sens de l’à-propos. L’homme de Rio c’est un film qui pétille comme une bouteille de champagne, c’est une bulle de savon qui flotte joyeusement avec son air enfantin, mais c’est aussi le témoin d’une époque où comédie s’acoquinait encore magistralement avec les forces du cinéma. Philippe de Broca ne va certainement pas traiter son divertissement par-dessus la jambe et joue sérieusement (mais sans avoir l’air) avec les contrastes de son décors (de la grisaille parisienne à la jungle amazonienne en passant par les constructions ultra modernes d’Oscar Niemeyer), croisant la rigueur hitchcockienne de La Mort aux trousses avec les libertés de la Nouvelle Vague française tout en gardant dans un coin de la tête l’efficacité du succès récents d’un certain James Bond.
Du grand spectacle mais sans une once de gravité, et la naissance ni plus ni moins que la comédie d’aventure (et Spielberg s’en souviendra) et d’un nouvel héros du grand écran Belmondo, que l’on appellera bientôt Bebel.
Image
Coin de mire passe à l’UHD et ça lui va très bien. Ainsi, avec le concours de TF1 Video et OCS, L’Homme de rio a été entièrement restauré à partir d’un nouveau scan 4K des négatifs. Débarrassée de ses dernières traces des années (l’ancien Bluray était honorable), stabilisée, cette copie qui manie très agréablement et naturellement son grain d’origine et ses argentiques, va surtout ravir les amateurs pour son traitement des couleurs. Après des années d’errements, entre fadeur et léger filtrages jaunes, le film retrouve toute la richesse de sa colorimétrie, presque pastel, en tout cas aussi étendue que douce et pimpante, valorisée par un très jolie traitement Dolby Vision. Bien entendu les noirs sont parfaits et la définition irréprochable.
Son
Le petit souci de L’Homme de Rio lorsque l’on aborde le son, c’est que le film dû être entièrement postsynchronisé en grande partie à cause du bruit provoqué par la caméra Caméflex. Le doublage effectué à l’origine n’étant pas toujours parfait, le spectateur observe très souvent quelques légers décalages entre les mouvements de lèvres et les dialogues, et ceux-ci manquent souvent de naturel dans leur restitution. L’avantage du nouveau DTS HD Master Audio 2.0 c’est qu’il permet tout de même de gommer légèrement les disparités sonores (les voix étaient légèrement trop aiguës) tout en harmonisant les voix avec des bruitages et des musiques qui n’avaient jamais manqué d’intensité. Agréable.
Interactivité
Fragilisé comme beaucoup d’éditeur par un effritement des ventes et surtout une augmentation spectaculaire du coup des matières premières (papier et carton) Coin de mire avait été obligé d’abandonner ses superbes éditions Mediabook. Grace à l’arrivée de cette nouvelle collection 4K on en retrouve une bonne part de l’esthétique dans le très joli digipack avec fourreau et le petit livret (reproduisant ici le livret de presse d’origine) collé sur la couverture, et ça fait plaisir.
On retrouve aussi bien entendu la grande spécificité de l’éditeur avec sa fameuse « séance complète » incluant donc en préambule optionnel un journal d’actualité de la 6eme semaine de l’année 1964 revenant sur les préparatifs des jeux olympique d’hivers en Autriche (sans neige) et la nouvelle alliance économique entre la France et la Chine renforcée par de grands moments de propagandes anti-américaine. Après la bande annonce de La Chasse à l’homme d’Edouard Molinaro (disponible chez l’éditeur bien entendu), on enchaine avec une succession de réclames à l’ancienne allant des bâtons glacés Miko à une boutique de prêt à porter pour hommes chic, des bonbons Kréma à des montres idéales en toutes circonstances. Le tout restauré pour l’occasion.
Et l’éditeur ne s’est pas arrêté là puisqu’il a aussi produit une nouvelle présentation, confiée au journaliste suisse Julien Comelli qui évoque les origines du film, ses particularités, ses réussites et ses liens avec les suivants Les Tribulations d’un chinois en Chine et Le Magnifique. Mais l’essentiel était surtout de retrouver tout le riche programme produit l’édition Bluray de 2013. A savoir trois items réalisés par Jerome Wybon avec en premier lieu un documentaire passionnant de plus d’une heure sur toute la création du film croisant des interviews inédites et des images d’archives, suivi par les entretiens avec Jean-Paul Rappeneau pour revenir sur sa longue collaboration avec de Broca, puis Stéphane Lerouge pour évoquer la spécificité du travail de Delerue. Incontournable.
Liste des bonus
La séance complète avec actualités Pathé, réclames publicitaires et bandes-annonces d’époque (25’), « Banco à Rio pour Belmondo » : Documentaire de Julien Comelli (35’), « Les Aventures d’Adrien : l’affaire Catalan » : Documentaire de Jérome Wybon (63’), « Frère de Cinéma : Jean-Paul Rappeneau et Philippe de Broca » (9’), « Léger et Grave : Georges Delerue et Philippe de Broca » (13’), Bande annonce de la collection.