L’EXTRAVAGANT M. RUGGLES
Ruggles of Red Gap – Etats-Unis – 1935
Support : Bluray & DVD
Genre : Comédie
Réalisateur : Leo McCarey
Acteurs : Charles Laughton, Mary Boland, Charles Ruggles, Zasu Pitts…
Musique : Heinz Roemheld
Durée : 90 minutes
Image : 1.37 16/9
Son : Anglais DTS HD Master Audio 2.0 mono
Sous-titres : Français
Editeur : Éléphant Films
Date de sortie : 25 janvier 2022
LE PITCH
Marmaduke Ruggles est un majordome anglais au service du comte Burnstead. Celui-ci, joueur invétéré, perd Ruggles lors d’une partie de poker. Le valet doit partir pour les Etats-Unis. Maintenant au service de la famille Floud, le nouvel arrivant découvre une nouvelle liberté galvanisante dans la petite ville de Red Gap…
Le majordome à l’ouest
Premier film de la renaissance artistique de Leo McCarey, futur génie comique et sentimental de Cette sacrée vérité et Elle et Lui, L’Extravagant M. Ruggles est une comédie légère sur le choc des cultures, une célébration des valeurs de la démocratie US, mais aussi un irrésistible portait de majordome british coincé dans l’Amérique profonde servi par un inoubliable Charles Laughton.
Leo McCarey a déjà une très longue et productive carrière lorsqu’il s’attèle en 1935 à une nouvelle adaptation de la pièce à succès Ruggles of Red Gap, déjà porté par deux fois au cinéma. Alors pas forcément un nom des plus connus, mais on peut tout de même lui rendre la paternité des plus grands moments de la carrière de Laurel et Hardy dont il réalisé une bonne part des courts métrages, et du plus gros succès des Marx Brothers : Soupe aux canards. Pourtant ses débuts solos dans le long métrage semblent toujours aussi timides et anecdotiques avant le film en présence. Il suffit parfois du bon sujet, du bon interprète, d’un équilibre retrouvé pour qu’un auteur puisse s’exprimer pleinement. En l’occurrence le récit d’un majordome anglais, figé dans son héritage et ses règles séculaires, qui se découvre du jour au lendemain revendu après une partie de poker à un nouveau riche américain. Débutant dans un joli Paris reconstitué en studio, L’Extravagant M. Ruggles s’amuse constamment de ces confrontations de cultures, de ces comportements et de ces traditions, en particulier en construisant un excellent duo avec d’un coté un Charles Laughton joufflu et (presque) impassible, pince-sans-rire, et de l’autre Charles Ruggles (amusant) texan inculte, bruyant, largement porté sur l’alcool, mais définitivement sympathique, embringuant le premier dans toutes ses facéties.
Affranchis
McCarey connait son burlesque sur le bout des doigts, multiple les situations irrésistibles et les gags théâtraux, jouant autant sur l’effet que sur la réaction des témoins, sur le rire que sur la gêne provoquée, afin de laisser naitre un sentimentalisme sincère. En dehors d’un beau-frère bourgeois bourré de préjugés et déplaisant, tous les personnages du film ont les faveurs du cinéaste qui malgré (ou grâce à) leurs défauts les traites toujours avec délicatesse et sympathie, et les laisse s’extirper de leurs propres stéréotypes. Figure centrale de l’objet, Ruggles est bien entendu celui qui fait le plus long chemin, découvrant ce monde « de cowboy et d’indiens » avec dédain, se montrant plus conservateur que son ancien lord anglais, mais il finira par découvrir les joies de la liberté, de l’indépendance et ouvrira un restaurant chic mais uniquement remplis de clients-amis. Impossible alors de ne pas faire quelques parallèles avec l’œuvre de Frank Capra lorsque le film s’enthousiasme (avec de légères réserves bien placées) justement pour ces valeurs fondatrices américaines avec en point d’orgue la plus belle, et célèbre scène du film :Un long et fluide travelling qui cherche dans un saloon un brave américain capable de déclamer du discours de Lincoln à Gettysburg avant de revenir sur Ruggles lui-même, plus british tu meurs, mais se souvenant justement de cette allocation historique et hautement symbolique, et se laissant peu à peu emporter par l’émotion. Laughton y est époustouflant et la performance restera l’une de ses préférées.
Image
Comme beaucoup de film des années 30, et en particulier ceux qui ne sont pas considérés comme des incontournables des grands studios, Ruggles of Red Gap n’a sans doute pas été aisé à restauré. C’est souvent manifeste avec ce master HD, certes plutôt propres malgré l’apparition encore persistante de quelques taches et griffures, mais qui est régulièrement marqué par des plans au grain proéminent, lui-même envahi par un bruit disgracieux. Quelques edge-enhancing viennent aussi surligner certains contours. Mais au vu de l’âge du film, la stabilité agréable de la copie, ses reflets argentiques et sa définition bien dessinée, cela reste un visionnage très agréable.
Son
Seule piste présente, la version originale mono en DTS Master Audio 2.0 se montre étonnement en bonne forme avec une source sans traces de saturation ou chuintements et une restitution frontale (naturellement) mais très stable.
Interactivité
Un peu dommage que notre éditeur français n’ait pas eu l’opportunité de nous proposer ici les suppléments disponibles chez Eureka Entertainment, et particulièrement les adaptations radiophoniques de la pièce interprétées par Charles Laughton et Charlie Ruggles. Mais notre édition n’est pas vide de supplément puisqu’on y retrouve Olivier Père (Arte) pour une introduction soignée du film. Le journaliste le présente comme le premier grand film de Leo McCarey, souligne ses différents niveaux de lectures, ses tonalités sociales et humanistes avec un enthousiasme, certes très intérieur, mais présent.
Liste des bonus
Le film par Olivier Père (28′), Bandes-annonces.