LES VESTIGES DU JOUR
The Remains of the Day – Etats-Unis – 1993
Support : UHD 4K
Genre : Drame
Réalisateur : James Ivory
Acteurs : Anthony Hopkins, Michael Lonsdale, Emma Thompson, Lena Headey, Ben Chaplin, Hugh Grant, Christopher Reeve, James Fox
Musique : Richard Robbins
Image : 2.35 16/9
Son : DTS HD Master Audio 5.1 anglais, Dolby Digital 2.0 anglais, français, italien…
Sous-titre : Français, anglais…
Durée : 134 minutes
Distributeur : Sony
Date de sortie : 01 mars 2023
LE PITCH
Les doutes et les tourments du majordome d’une grande famille anglaise qui, en 1956, après trente années de parfait service, se demande s’il n’a pas gaspillé sa vie.
Ce qu’il nous restera
Le plus british des cinéastes américains retrouve les Anthony Hopkins et Emma Thompson de son précédent et splendide Retour à Howard’s End et les confine dans l’intimité écrasante du devoir de la servitude. Un drame précieux et déchirant sur une vie gâchée par un honneur omniprésent mais déjà perdu.
Même si on peut penser aujourd’hui par la minutie des détails d’une reconstitution admirable, par des éclairages en clair-obscur, par la séparation géographique et picturale entre aristocratie et personnel de service, à la série Downton Abbey, la célébration d’un temps perdu, idéalisé et carte postale n’est certainement pas de mise chez James Ivory. La lumière y est plus rasante, plus feutrée, plus lugubre même parfois et la demeure qui sert de théâtre est construite comme une prison volontaire dont Mr Stevens, le très honorable Majordome, ne s’échappera finalement que très tardivement et uniquement pour un aller-retour infructueux. Un homme entièrement habité par sa vision de son métier, de sa mission dans une existence dévolue au service de Lord Darlington, dont il célèbre la noblesse et la haute place dans un monde aux strates visibles et fixées. Un léger clignement de l’œil, une vague amorce de sourire, un recul à peine perceptible ou des épaules qui s’avachissent avec le temps, l’interprétation d’Anthony Hopkings est d’une économie et d’une éblouissante justesse, ne révélant rien pour mieux tout révéler, affirmant l’existence d’un homme ne s’autorisant aucun avis, aucune opinion, aucune émotion, passant à coté de sa vie et de son identité sur l’autel d’un devoir aveugle. Aveugle au point de ne pas quitter son poste à l’annonce de la mort de son père ou de constamment taire ses sentiments pour Miss Kenton, la nouvelle gouvernante campée avec émotion et dévotion par la toujours parfaite Emma Thompson.
Horizons perdus
Une rencontre artistique au sommet entre les deux acteurs, constamment en résonance dans leur appréciation des personnages, dans leurs échanges plus ou moins houleux, mais toujours emprunts de cette déchirante émotion tue. Les Vestiges du jour est un superbe mélodrame, un portrait d’une romance auto-interdite et d’une figure définitivement torturée, mais c’est aussi le chant du cygne d’une époque. Celle de l’ancienne et grande Angleterre, d’une construction sociétale dépassée et d’une aura culturelle et politique évanouie à l’orée de la Seconde Guerre Mondiale. Car Mr Stevens ne ferme pas les yeux que sur sa vie personnelle, mais aussi sur l’effondrement du monde autour de lui, assistant sans jamais vraiment réagir aux alliances nauséabondes de son seigneur et maitre avec les représentants du régime Nazi, assistant impuissant au dévoiement de cette noblesse qu’il admire avec une adoration qui en devient triste et pathétique. Vieillissant et désormais au service d’un riche américain (Christopher Reeve immédiatement sympathique), le brave homme a beau imaginer un retour possible à une époque idéalisée, à des retrouvailles possibles avec cet amour bêtement écarté, à un maintien d’un décorum fendillé, comme le dit parfaitement Anthony Hopkins dans une interview : il est déjà hors saison. La précision absolue de la mise en scène et de la révélation d’émotions sans cesse refoulées, font de Les Vestiges du jour une œuvre qui justement délivre une affection décuplée, immense.
Image
Déjà approuvé au format Bluray cette restauration 4K relativement récente, faisait preuve d’un nettoyage important de l’ancienne source, apportant des cadres enfin débarrassés des nombreux défauts de pellicule qui l’encombraient et bien plus stables que dans nos souvenirs. Les verts des paysages humides de la campagne environnante ont retrouvé de leur vivacité et les noirs surtout, très creusés et pleins, imprègnent sans faiblesse une photographie d’une rare élégance. Les petits soucis de grain brièvement observé sur ce format on en plus totalement disparus pour cette ressortie UHD plus harmonieuse, naturelle et organique encore, avec un rendu parfait des matières et un gain d’intensité non négligeable du coté de couleurs plus subtiles que jamais. Splendide.
Son
La version doublée française, appliquée, restant en Dolby Digital 2.0, parait beaucoup moins fluide et vibrante que la version originale désormais exploité en Dolby Atmos exclusif à l’UHD. En plus d’affirmer une restitution pointilleuse et toujours des plus claires, il développe généreusement quelques atmosphères feutrées, enveloppantes et jamais ostentatoires.
Interactivité
Comme pour le Bluray précédent, l’édition en présence propose aucun supplément inédit mais a au moins le mérite de reprendre à son compte l’ensemble de ceux produits en 2001 pour le DVD. Pas grand-chose à ajouter il est vrai puisque les trois documentaires (dont l’un date de la sortie du film) s’attardant successivement sur la trame historique de fond, la préproduction et l’arrivée du duo James Ivory / Ismale Merchant puis sur le tournage proprement dit, s’avèrent on ne peut plus complets. On y discourt des thématiques du film, de l’adaptation, de la reconstitution, du travail des acteurs et de la mise en scène avec franchise, passion et élégance. Une approche largement complétée par un passionnant commentaire audio réunissant réalisateur, producteur et l’actrice principale. On note aussi la présence des scènes coupées avec, entre autres, un accrochage supplémentaire et savoureux entre Mr Stevens et Miss Kenton, mais aussi des éléments issus d’une fin beaucoup plus bavarde où les sentiments et les désirs des personnages sont finalement verbalisés. Le silence correspondait effectivement beaucoup mieux au film.
Liste des bonus
Commentaire audio de James Ivory, Ismail Merchant et Emma Thompson, Le making of (28′), Le voyage d’un réalisateur ‘30′), L’erreur fatale de l’Angleterre (15′), 7 scènes coupées avec commentaires optionnels (14′), bandes-annonces.