LES UNS ET LES AUTRES
France – 1981
Support : Bluray
Genre : Drame
Réalisateur : Claude Lelouch
Acteurs : Robert Hossein, Nicole Garcia, Geraldine Chaplin, Jacques Villeret, Fanny Ardant, Evelyne Bouix, James Caan, Richard Bohringer, Francis Huster, Jean-Claude Brialy, Macha Meryl, Daniel Olbrychski…
Musique : Francis Lai, Michel Legrand
Durée : 164 minutes
Image : 2.35 16/9
Son : Français DTS HD Master Audio 5 .1
Sous-titres : Anglais
Éditeur : Metropolitan
Date de sortie : 17 février 2022
LE PITCH
45 ans de l’histoire du monde, de 1936 aux années 1980, à travers le destin de quatre familles, aux quatre coins du monde. Moscou : Tatiana épouse Boris, le père de son fils Sergueï, futur danseur étoile. Paris : Anne et Simon sont déportés et contraints d’abandonner leur nouveau-né, Robert. Berlin : Karl Kremer, pianiste, reçoit les félicitations du Führer. New-York : la formation de jazz de Jack Glenn triomphe… Des hommes, des femmes, qui vivent dans des pays différents mais parlent une même langue : la musique.
Ballade pour ma mémoire
Y a-t-il un film qui ressemble plus à Claude Lelouch que Les Uns et les autres ? Un casting imposant de stars françaises (mais pas que), pour une saga qui s’étale sur trois générations et plus quarante ans d’histoire au grès des rencontres, des hiatus du destin pour une grande célébration de la vie, petite et grande, de la musique et de la danse.
Si les années précédentes auront offert quelques belles rencontres en le cinéaste et le succès, voire à quelques rares reprises, la reconnaissance critique (pour Un Homme et une femme essentiellement), les années 80 vont véritablement imposer sa patte, son regard, et ses envies d’un cinéma pour tous, à la réalisation léchée, spectaculaire même parfois, ouvrant la voie à une nouvelle génération de cinéastes français comme Luc Besson (Le Grand bleu) ou Jean-Jacques Beineix (Diva). S’achevant sur la consécration L’Itinéraire d’un enfant gâté, cette décennie s’ouvre en fanfare sur l’un des projets les plus ambitieux de son auteur : Les Uns et les autres. Fasciné par les notions de destin, de rencontres inopinées, de la mémoire parfois balbutiante de l’être humain et persuadé que la vie est vouée à se répéter inlassablement, dans les petits bonheurs comme dans les tragédies, il imagine une vaste fresque se déroulant des premières années de la Seconde Guerre Mondiale à l’orée des années 80, où quatre familles (française, allemande, russe et américaine) traversent l’histoire malgré tout, survivant pour certains à l’holocauste, à la Guerre d’Algérie, aux carcans du rideaux de fer, mais aussi au tracas plus quotidiens, plus communs, que ce soit les amitiés perdues et retrouvées, les divorces à répétition… et quelques part des cicatrices intergénérationnelles qui refusent de guérir.
Un parfum de fin du monde
Une sorte de transmission des fêlures, que Lelouch accentue encore plus en laissant certains acteurs jouer, sans même parfois de maquillage, leur propre descendance. Assez osé, un peu perturbant du coup dans la lisibilité de certaines scènes, le procédé marque tout de même parfaitement cette notion de cycle, de redondance, obsession autant dramatique que stylistique chez Claude Lelouch et qui prend dans Les Uns et les autres tout son sens. Dans cette succession de personnages plus ou moins creusés (dommage par exemple pour Bohringer ou Fanny Ardant qui semblent presque coupés au montage), de grandes tragédies et de petits drames, voir d’anecdotes trébuchantes, il y a tout de même un véritable fil conducteur qui émerge et qui frappe au cœur : le destin Simon Myer (Robert Hossein) et Anne Meyer (Nicole Garcia, magnifique) emportés dans un train en direction d’un camp de la mort, obligés d’abandonner leur fils sur les rails en espérant que la chance l’épargne. Les retrouvailles constamment repoussées par les aléas de la vie, semble presque impossibles, jusqu’à un superbe et terrible dénouement qui amorce le fameux, et fabuleux, final du film entièrement porté par la montée crescendo du Bolero de Ravel, alors que toutes les lignes scénaristiques se rejoignent pour un gala télévisé organisé par la Croix Rouge. Outre une performance éclatante du grand danseur Jorge Donn chorégraphiée par le génie Maurice Bejart, cet imposant moment de cinéma, célébré comme une performance, est aussi le point culminant d’une œuvre qui depuis ses premières minutes ne parle que en et par la musique.
Il y a donc cet inoubliable Bolero qui donnera son titre anglais au film, mais aussi les mélodies de Francis Lai et Michel Legrand, tour à tour chantées, scandées, interprétées sur la scène du Lido ou par un simple piano de concerto ou un accordéon à un détour d’une rue. Tout dans Les Uns et les autres n’est que musique, chant, danse, porté en étendard comme seule arme pour résister au pire.
Image
Encore un très bon travail de restauration de la part de Metropolitan qui présente Les Uns et les autres dans les meilleures conditions possibles. Une nouvelle fois l’image a été très sérieusement nettoyée et stabilisée tout en révélant avec ferveur les matières du film, son grain bien présent et ses reflets argentiques. On note bien encore deux ou trois plans étrangement perturbés par un effet de dédoublement et quelques transitions légèrement malmenées, mais l’ensemble du film reste de très belle tenue.
Son
Seule piste présente sur le disque, le DTS HD Master Audio 5.1 est sans doute à rapprocher du mix 6 pistes présentés autrefois dans les salles pouvant projeter la copie gonflée 70 mm du film. Une ampleur bien présente qui correspond forcément à l’ambition du film, et qui se montre particulièrement percutante dans toutes les séquences musicales, mais aussi lors du retour en train des rescapés des camps (avec la voix de Lelouch dans les enceintes de la gare) ou les séquences de foule. Reste à savoir si les variations de niveau sonore dans certains dialogues, les déplacements un poil artificiels et les petits échos métalliques viennent de la source ou sont dû à quelques maladresses d’une dynamisation de celle-ci.
Interactivité
Présenté dans un digipack avec fourreau, Les Uns et les autres est accompagné d’un livret reproduisant le contenu du livret presse de l’époque : présentation du film, du réalisateur, des acteurs, notes sur la musique et de nombreuses photos au programme. On trouve aussi glissé dans le packaging le fameux CD de la bande originale dans sa petite pochette cartonnée et non sertie dans le digipack comprenant le Bluray du film (ce qui est un peu dommage). Ce dernier semble un peu chiche au vu de l’échelle, du casting et du succès du film à sa sortie. Toujours pas de grand documentaire rétrospectif au programme, mais une assez courte interview d’archive du réalisateur qui revient sur l’importance de la musique et la réflexion du film autour de la question de la mémoire. En revanche, invisible depuis la sortie du film en salle, le court métrage Il a besoin qui était présenté en avant-programme a lui aussi été restauré pour l’occasion. Un document poignant qui fait directement écho au final de Les Uns et les autres et qui suit l’arrivée des aides de la Croix Rouge dans un Cambodge ravagé par la famine, avant naturellement de faire un appel aux dons.
Liste des bonus
CD de la bande originale, Livret, Court métrage : « Il a besoin » en avant-programme (7’), Entretien avec Claude Lelouch (7’), Bande-annonce restaurée.