LES MENOTTES ROUGES
0課の女 赤い手錠 – Japon – 1974
Support : Bluray
Genre : Thriller
Réalisateur : Yukio Noda
Acteurs : Miki Sugimoto, Eiji Go, Tetsuro Tanba, Hideo Murota, Yoko Mihara, Ichiro Araki…
Musique : Shunsuke Kikuchi
Image : 2.35 16/9
Son : Japonais DTS HD Master Audio 2.0 mono
Sous-titres : Français
Durée : 88 minutes
Editeur : Le Chat qui fume
Date de sortie : 31 mars 2024
LE PITCH
Tokyo, années 1970 – Il existe, au sein de la police japonaise, un département secret nommé « Division 0 ». Rei travaillait dans ce service en tant que détective. Un jour, elle tua l’assassin d’une amie proche, geste qui lui valut la prison. Mais lorsque Kyoko, la fille du futur Premier ministre japonais, est kidnappée, Rei est libérée, avec pour mission de sauver Kyoko. Avec pour seules armes un pistolet et des menottes de couleur rouge, elle parviendra à infiltrer la bande de kidnappeurs.
Japon Année 0
Découvert en France il y a vingt ans grâce à un mythique double pack DVD signé HK Vidéo l’associant, non sans logique avec le culte La Femme Scorpion, Les Menottes rouges revient en Bluray chez Le Chat qui fume (tiens comme les aventures de Nami…) question de bien rappeler qu’il est lui aussi un fleuron de l’exploitation nippone.
Associer les deux métrages n’a rien de plus logique puisque tous deux appartiennent à cette fameuse vague de Pinky Violence mélangeant allégement, et souvent avec le plus grand opportunisme, un érotisme décomplexé, une violence exacerbée, une esthétique pop et une figure charismatique de femme vengeresse. Et c’est certainement grâce au culte voué à la série des Femme Scorpion que la Toei se tourne vers le manga Zero Woman signée du même Toru Shinohara et dont elle confiera l’adaptation à nouveau au duo de scénaristes Fumio Konami et Hiro Matsuda. Et de prime abord, Les Menottes rouges semble bien émuler les ingrédients les plus reconnaissables du modèle s’ouvrant sur une séquence presque musicale, intensément pop, enchainant rapidement sur une mise à nue de la superbe actrice Miki Sugimoto (grande habituée des films de sukeban), avant que celle-ci ne se lance dans une mise à mort justicière armée de ses fameuses menottes. Incarcéré pour s’être rebellée de la gente masculine, chanson pop entonnée par l’actrice qui joue les Meiko Kaji, poses iconiques manteau au vent et héroïne mutique incarnée par la violence… Tout y est ou presque, mais très vite Les Menottes rouge s’échappe du film de prison qu’il aurait pu devenir pour lâcher cette agent trouble de la Section 0 sur les traces d’une fille de riche industriel kidnappée (mais aussi violée et droguée) afin qu’elle infiltre le gang de délinquants, bien entendu dirigé par un authentique sociopathe, et fasse échouer le chantage à la rançon.
La rage au ventre
Mais dans Les Menottes rouges rien ne se passe vraiment comme prévu et Rei, la fameuse Zero woman, fait constamment autant figure d’héroïne manipulatrice que de victime des nombreux sévices administrés par ces hommes pervers, peinant à maitriser son plan et devant composer avec les hommes de mains du grand patron qui attendent tout ce beau monde dehors. Si les truands sont présentés comme d’authentiques sadiques nihilistes tuant, violant, humiliant et assassinant tout ce qui bouge souvent dans de gigantesques gerbes de sang, le versant « respectable » représenté par l’organisation du père de la gamine enlevée, se montre très rapidement tout aussi barbare, éliminant les gêneurs sans ciller, versant autant dans la torture (avec une longue scène éprouvante au chalumeau) et choisissant même de tuer les deux femmes pour éviter le scandale public. Beau tableau, sombre et nihiliste constamment emporté par son chaos furieux, sa rage explosive et l’incroyable efficacité de la mise en scène de Yukio Noda. Moins porté sur les effets psychédéliques que le Shun’ya Itô des Femme Scorpion, il travail un mélange d’effervescence de l’action, souvent caméra épaule, qui n’est pas sans rappeler la frénésie travaillée du grand Kinji Fukasaku, et d’effets syncopés de montage (zooms, inserts, coupes brutales…) multipliant les intentions symboliques sur la nature des personnages et leur fébrilité psychologique.
A l’instar de cette très rapide compositions d’images, flashbacks instantanés d’une enfance perdue dans les mauvais quartiers de Tokyo, qui viennent contrarier l’exécution du meneur, dégénéré, de la bande. Surprenant et une belle façon de souligner que les protagonistes de Les Menottes rouges sont tous les rejetons d’un Japon en perte de repères, corrompu, abimé et quasiment en ruine. Le seul acte maitrisé de Rei sera alors de réussir à révéler tout cela dans un ultime geste frondeur, symbole d’une jeunesse, féminine, prête à reprendre le pouvoir. Elle ne s’appelait peut-être pas Scorpion, mais Rei aussi pouvait faire très mal.
Image
Bien des années après sa première sortie DVD chez nous, Les Menottes rouges se dote d’une très jolie copie, particulièrement colorée, contrastée, vive et souvent intense, qui redonne tous les contours exploitation du film autant en appuyant sur les contrastes, plus marqués qu’autrefois, qu’en creusant les matières rugueuses et les décors urbains grâce à une définition plutôt solide. Quelques restes de taches, griffures et autres points blancs persistent sur la source, mais à l’arrivée l’ensemble est plutôt réjouissant.
Son
La version originale est disposée dans un DTS HD Master Audio 2.0 qui reste très fidèle au mono d’origine. Comme souvent la langue japonaise pousse à l’apparition de quelques effets de chuintements et des petits pics de saturation, l’écoute est cependant très confortable, claire et énergique.
Interactivité
Doté d’un superbe visuel le digipack trois volet et son fourreau cartonné limité à 1000 exemplaire, l’édition ne propose qu’un seul supplément sur le disque Bluray. Il s’agit d’une présentation du film par le désormais incontournable Fabien Mauro qui revient sur le contexte des studios japonais au début des années 70, la politique d’exploitation de la Toei, la carrière du réalisateur Yukio Noda ou de l’actrice Miki Sugimoto, avant de brasser les grandes lignes du film, son style et son inventivité.
Liste des bonus
« Les Menottes rouges » par Fabien Mauro (36’).