LES MAINS QUI TUENT
Phantom Lady – Etats-Unis – 1944
Support : Bluray & DVD
Genre : Thriller, Policier
Réalisateur : Robert Siodmak
Acteurs : Ella Raines, Alan Curtis, Franchot Tone, Thomas Gomez, Elisha Cook Jr….
Musique : Divers
Durée : 87 minutes
Image : 1.33 16/9
Son : Anglais DTS HD Master Audio 2.0 mono
Sous-titres : Français
Éditeur : Eléphant Films
Date de sortie : 25 mai 2021
LE PITCH
Un ingénieur est accusé du meurtre de sa femme. Sa secrétaire, éprise de lui, va alors enquêter pour le disculper.
La Femme
Qu’elle soit candide, fragile, mystérieuse ou même assassine, la femme ne reste qu’à de très rares exceptions près le héros principal du film noir. On la voit rarement enquêter et prendre les rênes de l’intrigue. C’est pourtant le cas ici, où sous la direction d’un grand nom d’Hollywood, la jeune Ella Raines entre dans la peau d’une secrétaire prête à tout pour sauver son patron. Par quel miracle ? Celui d’une autre femme, bien entendu.
Adaptation d’un roman de William Irish, Les Mains qui Tuent est pourtant bien différent sur le papier. Carol, la secrétaire de l’ingénieur, y est bien présente, mais présentée uniquement comme la maîtresse de son patron et surtout un mobile de plus expliquant l’assassinat de sa femme. Alors pourquoi ce revirement de l’histoire ? La réponse est à chercher du côté de la présence de Joan Harrison au générique. Ancienne secrétaire d’Hitchcock, scénariste et enfin productrice, Harrison est à la genèse de cette adaptation et va donc occuper ce dernier poste derrière la caméra. Et même si elle ne sera pas créditée en tant que scénariste, sa fonction de productrice va lui permettre de donner ses directions nécessaires afin de mener son projet comme elle l’entend. Et notamment dans le choix du réalisateur.
Une femme disparait
Car si Max Ophüls est tout d’abord approché, c’est finalement Robert Siodmak qui décroche le poste. Un réalisateur d’origine allemande qui va évidemment inoculer à l’adaptation la noirceur héritée du fameux expressionnisme de son pays. Ombres furtives et menaçantes, lumière quasi divine métamorphosant le temps d’une scène une prison en église, cadres penchés… la réalisation de Siodmak regorge d’idées traduisant la psychologie des personnages (la virée nocturne de Carol), foisonne de travellings magnifiquement éclairés et filmés (la poursuite silencieuse dans les rues) et s’amuse même à brouiller les cartes à la manière de son scénario inhabituel (à sa première apparition, l’inspecteur et ses hommes ressemblent plus à des gangsters qu’à des flics).
Un scénario qui donne donc la part belle aux femmes. D’abord au travers du personnage de Carol (formidable Ella Raines), secrétaire amoureuse de son patron qui va faire équipe avec l’inspecteur sans jamais hésiter à se mettre en danger, mais aussi de celui d’une femme disparue mystérieusement (qui donne son titre original au film) après une soirée passée avec l’accusé. Femme dont le souvenir semble avoir totalement disparu lui aussi pour tous ceux qui l’ont croisée ce soir-là. Un scénario qui n’est d’ailleurs pas sans rappeler celui de l’exceptionnel Une Femme Disparaît du grand Hitch sorti quelques années auparavant. La présence de Joan Harrison à la production finissant d’assurer la filiation.
Mais malgré toutes ces qualités, le film n’arrive pourtant pas à décoller complètement. La faute notamment à quelques personnages masculins dont l’interprétation laisse un peu à désirer : Alan Curtis n’est tout simplement pas bon dans son rôle de coupable idéal et Franchot Tone, plus problématique, n’est jamais à la hauteur de son assassin tourmenté. Un dernier élément qu’on peut rapprocher des obligations formelles dictées par le fameux code Hays et qui obligent par exemple Siodmak à ne jamais montrer de scènes violentes ou de meurtres plein cadre. Au final, on obtient certes un bon film mais qui aurait probablement pu aller beaucoup plus loin dans ses ambitions s’il en avait eu la possibilité.
Image
La restauration est impressionnante. Notamment dans les détails et les contrastes. Malheureusement, la pellicule a beaucoup souffert et nombre de griffures et poussières subsistent et envahissent souvent l’image.
Son
La bande son semble avoir moins souffert que l’image, et ça s’entend. Notamment dans les dialogues, parfaitement clairs et intelligibles. Une piste mono pas exceptionnelle donc, mais qui profite d’une restauration solide.
Interactivité
Deux entretiens. D’abord avec Eddie Moine, qui revient principalement sur la production et la féminisation du film noir par Joan Harrison. Très intéressant mais malheureusement un peu trop mécanique dans sa lecture, comme toujours chez Moine.
Ensuite avec le journaliste Stéphane du Mesnildot, qui revient lui sur la réalisation de Siodmak et sur une analyse (pertinente !) du personnage de Carol. Deux entretiens qui, chacun de leur côté, prolonge avec intérêt l’expérience du film. La bande annonce d’époque vient clore le spectacle.
Liste des bonus
Les Mains qui Tuent par Eddy Moine (12’24), Entretien avec Stéphane du Mesnildot (10’01), bande annonce (1’41).