LES GRIFFES DE LA PEUR
Eye of the Cat – Etats-Unis – 1969
Support : Bluray & DVD
Genre : Thriller
Réalisateur : David Lowell Rich
Acteurs : Michael Sarrazin, Gayle Hunnicutt, Eleanor Parker, Tim Henry, Laurence Naismith…
Musique : Lalo Schifrin
Durée : 95 minutes
Image : 1.85 16/9
Son : Anglais et français DTS HD Master Audio 2.0 mono
Sous-titres : Français
Éditeur : Rimini Editions
Date de sortie : 03 juin 2021
LE PITCH
Tante Danny vit avec son neveu Luke et ses nombreux chats. Elle décide que lorsqu’elle décèdera, ses animaux hériterons de sa fortune. Mais quand Wylie, le frère de Luke, revient vivre à la maison avec sa nouvelle compagne, la vieille femme change d’avis et fait de Wylie son unique héritier…
Meooow
Film de machination typique de cette fin des années 60 autant dans son esthétique psychédélique, sa bande son pop jazzy du boss Lalo Schifrin que son érotisme suranné, Les Griffes de la peur vient flirter gentiment avec les obsessions hitchcockiennes et l’ailurophobie.
Scénariste émérite, d’après le roman de Robert Bloch, de Psychose, Jospeh Stefano faisait en en 1969 son grand retour au thriller psychologique avec Les Griffes de la peur. L’une de ces nombreuses productions anglo-saxonnes s’engouffrant, comme tout un pendant de la production Hammer, dans cette voie ouverte par le classique d’Alfred Hitchcock permettant sous couvert du cadre d’une série B à suspens, d’installer des mystères et des angoisses plus sulfureuses. Et l’ombre du maître plane alors tellement qu’on a presque l’impression de voir au travers de Les Griffes de la peur une compilation appliquée des derniers succès du monsieur : la figure maternelle étouffante en chaise roulante, la horde de chats qui remplace les vols d’oiseaux, la phobie paralysante du protagoniste comme un écho à Vertigo… La liste est longue et ne joue pas forcément en la faveur de l’artisan David Lowell Rich (venu remplacer au pied levé un Alex Segal souffrant) affichant une centaine de titre à son CV mais majoritairement des épisodes de séries ou des téléfilms passe-partout. Sa plus grande prouesse en dehors du film en présence ? Le terrible Airport 80 préquelle involontaire de Y a-t-il un pilote dans l’avion ? Une mise en scène assez impersonnelle, fonctionnelle, mais qui ici trouve un sursaut d’inspiration inespéré en délivrant un très efficace pré-générique abusant généreusement des effets de split-screen, ou s’offrant ouvertement les atours d’un vaudeville malsain dans toutes les séquences se déroulant dans la vaste demeure bourgeoise de San Francisco.
A pas de velours
Cela n’empêche pas un petit ventre mou, mais clairement avec sa photographie pop des 60’s, son érotisme soft et ce grand final en forme d’home invasion animal à la limite du fantastique, Les Griffes de la peur s’avère plutôt accrocheur, voir même qualitativement assez surprenant. Une certaine élégance héritée des voisins anglais, une bonne dose de perversion à la mode italienne, cette énième course à l’héritage qui révèle rapidement les tréfonds de perversité de chacun a un petit quelque chose d’européen franchement pas désagréable. Pas de véritable héros ici mais quelques figures plus ou moins prégnantes, du neveu prodigue à son frère effacé voir brimé, en passant par la maîtresse sexy mais coriace, sans oublier bien entendu la charmante Tante Danny (Eleanor Parker, ex-gloire hollywoodienne) qui a bien du mal à dissimuler ses pulsions incestueuses : tous sont dévorés par leurs natures envieuses, leurs désirs inavouables ou leurs ressentiments. Un film de complot familial, de trahisons ou finalement l’argument félin reste assez accessoire, en marge, comme une personnification du mal qui rode. Autre argument de poids de l’objet, la présence d’un redoutable Michael Sarrazin pas encore révélé par le On achève bien les chevaux de Sidney Pollack, insaisissable en manipulateur manipulé, en profiteur sucré et suave dont on n’arrive jamais à cerner, jusqu’aux dernières minutes, si son regard narquois est une marque de faiblesse ou une preuve de sa supériorité sur l’avidité de ses congénères.
Un petit film d’exploitation passé assez inaperçu lors de sa première sortie, mais qui a pourtant de jolis arguments.
Image
Film particulièrement rare, oublié encore une fois dans les archives d’Universal, Les Griffes de la peur a été restauré en 2018 par Shout Factory. Un travail qui n’est cependant pas allé jusqu’au bout du processus laissant apparaître dans les cadres encore pas mal de petites taches, points, restes de griffures etc. En particulier, naturellement, dans les splits-screen d’ouverture. Pourtant on est loin ici d’une vieille copie fatiguée puisqu’en dehors de ces artefacts du temps, le reste s’avère très joli, vibrant et surtout organique. De vrais sensations cinéma retransmises par un grain de pellicule bien présent et harmonieux et une restauration savoureuse des teintes du Technicolor. Une image finalement assez généreuse et appréciable.
Son
Manifestement l’éditeur français a dû avoir un peu de mal à retrouver une piste française viable puisque celle-ci reste hantée par un étrange bruit de fond, ce qui rajoute encore certainement à l’aspect rétro. La version originale s’en sort beaucoup mieux avec un DTS HD Master Audio 2.0 mono clair et bien équilibré.
Interactivité
Nouveau volume de la collection consacré par Rimini aux classiques inédits du fantastique, Les Griffes de la peur en reprend bien évidement l’élégant digipack en trois volets, le fourreau cartonné et le livret d’une vingtaine de pages. Toujours rédigé par Marc Toullec celui-ci se consacre moins au film proprement dit qu’à un petit travelling sur le chat dans le cinéma de genre.
Sur les disques Bluray et DVD c’est le journaliste Gilles Gressard qui prend la parole pour une présentation très complète et détendue du film. Un petit détour sur la carrière du réalisateur, sur le travail du célèbre dresseur Ray Berwick, une évocation du premier casting prévu pour le film (Terence Stamp et Tippi Hedren, rien que ça) et pas mal de petites anecdotes dressent un portrait assez complet de l’entreprise. A cela s’ajoute, avec présentation du monsieur, une fin alternative tournée pour la télévision américaine, un peu plus frileuse question censure à l’époque. Le son n’existe plus mais l’essentiel se joue à l’écran bien entendu avec une disparition totale de trace de sang et une mort finale beaucoup moins spectaculaire.
Liste des bonus
Le livret « Attention, chats méchants » rédigé par Marc Toullec (24 pages), Interview de Gilles Gressard, écrivain et historien du cinéma (21’), Fin alternative, présentée par Gilles Gressard (13’).