LES ÉVADÉS
The Shawshank Redemption – Etats-Unis – 1994
Support : UHD 4K & Bluray
Genre : Drame, Thriller
Réalisateur : Frank Darabont
Acteurs : Tim Robbins, Morgan Freeman, Bob Gunton, William Sadler, Clancy Brown, Gil Bellows, Mark Rolston, James Whitmore…
Musique : Thomas Newman
Image : 1.85 16/9
Son : DTS HD Master Audio 5.1 anglais, Dolby Audio 2.0 français, allemand, espagnol, italien…
Sous-titres : Français, anglais, allemand, italien…
Durée : 142 minutes
Editeur : Warner Bros. Home Entertainment France
Date de sortie : 28 août 2024
LE PITCH
1948. Andy Dufresne, jeune banquier respectable, est condamné à la prison à vie pour le double meurtre de sa femme et son amant. Bien qu’innocent, il est incarcéré au terrible pénitencier de Shawshank. Là, il fait la connaissance de Red, prisonnier depuis vingt ans et qui connaît par coeur la prison, ses codes et ses combines. Mais Andy n’a qu’une idée en tête : s’évader…
Hors les murs
Régulièrement placé dans les pelletons de tête de divers classements publics (Imdb et autres), Les évadés n’a gagné ses galons de classique qu’après sa première sortie salle, timide, grâce à de nombreuses nominations aux Oscar, un soutien de la critique et un bouche-à-oreille salvateur à l’ère de la vidéo puis du DVD, confirmé par les audiences des diffusions télé et même des ressorties sur grands écrans. Indéniablement un très beau film carcéral qui à force de talents et d’humanité à su toucher au cœur son public.
Les évadés est en premier lieu une nouvelle, Rita Hayworth et la Rédemption de Shawshank publiée dans le fameux recueil Différentes Saisons aux côtés d’Un élève doué et Le Corps, devenu Stand By Me au cinéma (excellente cuvée donc), signé par un Stephen King qui tranchait alors avec les attentes des amateurs de sensations fortes. Comme les deux autres textes nommés, pas de trace de fantastique ou d’épouvante proprement dit, mais plutôt un regard poétique sur un genre, le récit carcéral, et par la même une population délaissée, cloitré derrière les miradors en béton. Scénariste brillant ayant fait son nom sur Les Griffes du cauchemar, Le Blob, La Mouche 2 mais aussi cinq très bons épisodes de Les Aventures du jeune Indiana Jones, Frank Darabont développe considérablement le récit et les personnages et leur offre à la fois une plus grande ampleur et une plus grande universalité. Une petite merveille d’écriture qui réussit vraiment à donner corps à tout ce microcosme, autant dans sa plus grande noirceur, sa violence constante et son écrasement de l’identité, que dans son humanité, ces amitiés qui peuvent naitre entre ces hommes venus de tous les horizons et réunis là pour leurs fautes. Le film repose évidement sur le contraste frappant entre le traitement que subissent les prisonniers, et la fragilité dont ils peuvent faire preuve derrière leurs bravades ou leurs postures.
Le chemin de la rédemption
Le centre pénitencier de Shawshank dirigé par un directeur à la dure morale chrétienne mise en évidence, montre rapidement son vrai visage sous les coups de triques du terrible Captain Hadley (Clancy Brown, éternellement LE Kurgan), les exactions entre détenues tolérées et la corruption généralisée. Une pointe de caricature forcément, sans doute aussi un poil de nostalgie dans la description des 50’s, mais qui nourrissent alors parfaitement les aires de contes littéraires qui permettent au film d’être ponctuer de petits moments de grâce, entre petites bières sifflées sur le toit face à un couché de soleil, un air d’Opera qui raisonne dans les haut-parleurs ou une bibliothèque qui reprend vie. De rares moments d’échappée où la sensation de vie et de liberté reprend ses droits. Pour sa première réalisation à l’écran, Darabont impose d’emblée une maitrise pointue de la mise en scène, de la narration, de la caméra et du découpage, reconstituant avec finesses cette notion du temps qui s’échappe inexorablement, de la terrible répétition de l’existence et de son enfermement dans un quotidien limité. Une approche là aussi volontairement classique, presque à l’ancienne, qui sait déplacer la notion de drame, vers le récit d’une évasion longuement murie et in fine spectaculaire et vengeresse. Un sans faute qui n’aurait certainement pas la même saveur sans la rencontre magique entre les deux acteurs Tim Robbins et Morgan Freeman, l’une en banquier brillant s’accrochant coûte que coûte à son espoir, l’autre pensionnaire malin mais ayant totalement accepté son sort, donnant admirablement corps à une amitié simple et magnifique. Par leur jeu, par les dialogues, l’équilibre entre les deux figures, nait alors sur vingt ans une forme de guérison mutuelle, une résilience et un désir d’existence qui prend aux tripes.
Un grand film encore et toujours, juste dans sa modestie, vibrant dans son lyrisme et son regard humaniste sur le monde carcéral américain (ou autres), Les Évadés marquait aussi donc la véritable naissance d’un cinéaste passionnant et talentueux. Si Darabont retrouvera le chemin du succès avec le suivant La Ligne verte, toujours d’après King et conçu comme un film-frère, son fabuleux The Mist reste toujours trop méconnu et sa carrière à trop tendance à se cantonner au monde de la télévision (The Shield, The Walking Dead, Mob City). Un peu dommage donc et certainement injuste.
Image
Il semblerait que Warner n’ait à nouveau pas opté pour un retour à la source avec un scan 4K des négatifs, mais pour une amélioration et un retravail considérable de la source déjà connu sur les précédents Bluray. Inquiétant ? Et pourtant même si le film n’abordera jamais toute l’amplitude cinéma qui aurait pu être la sienne, la performance est largement au-dessus du simple Bluray, ne serait-ce qu’au niveau d’un bruit vidéo qui laisse enfin la place à un véritable grain de pellicule. Plus fin, plus organique et plus harmonieux, le master profite aussi pleinement d’une photographie bien plus proche de son identité initiale avec des teintes plus sombres (la luminosité du Bluray, présent dans l’édition, avait été « boostée ») et plus naturelles, accompagnées à merveille par le traitement HDR10 qui leurs assurent une plus grande amplitude. Les plus pointus noteront aussi un 1.85 désormais au bon format et sans la très légère déformation horizontale.
Son
Retour d’une belle piste DTS HD Master Audio 5.1 pour la version originale avec une présentation bien entendu très proche de celle du Bluray, quoi que peut-être un chouia plus forte et minutieuse sur les arrières, mais dans tous les cas très agréable dans sa clarté de restitution, sa belle dynamique plus portée sur les ambiances que sur les effets et la limpidité des dialogues et des jolies musiques de Thomas Newman.
La version française, elle, est toujours accrochée à son Dolby Audio 2.0 d’autrefois, sobre et ferme mais surtout maintenant un peu datée. Le doublage reste de très bonne qualité cependant.
Interactivité
Après une sortie sous la forme d’un gros coffret accompagné de quelques goodies pour les collectionneurs, l’édition The Film Vault fait un second tour de piste sous la forme cette fois-ci d’un plus sobre steelbook (mais toujours doté de son très joli design ). Du coup à l’intérieur on retrouve exactement le même contenu que l’édition classique de 2021 avec un disque UHD qui ne contient que le commentaire audio (non sous-titré) de Frank Darabont bourré d’info et d’anecdotes, et le disque bluray déjà connu qui reprend lui-même tous les suppléments du DVD collector. Rien de neuf, mais que du bon (ou presque) avec un très classique mais complet making of du film, un long documentaire produit par la BBC autour du phénomène et de l’aura culte qu’à connu le film après sa sortie et une passionnante interview croisée entre Darabont, Freeman et Robbins pour l’émission The Charlie Rose Show enregistrée à l’occasion des 10 ans du film. Là encore on évoque le statut très particulier du métrage, mais on y discute aussi beaucoup cinéma avec les questions d’écriture, de mise en scène, de lumière et du travail d’acteur. Incontournable. Le programme s’achève par quelques extraits du storyboard et de riches galeries photos, mais aussi un court métrage parodique, The Sharktank Redemption, avec le fils de Morgan Freeman, pas vraiment drôle et laborieux. On aurait pu aisément s’en passer.
Liste des bonus
Commentaire audio de Frank Darabont (VO), « Tant qu’il y a de la vie, il y a de l’espoir : retour sur Les Évadés » (31’), « Les Évadés : un film rédempteur » (48’), Émission « Charlie Rose » avec Franck Darabont, Tim Robbins et Morgan Freeman (42’), « The Sharktank Redemption » (24’), Storyboards (8’), 5 galeries photos (7’), Bandes-annonces.