LES AVENTURES D’ANTOINE DOINEL
Les 400 coups, Antoine et Colette, Baisers volés, Domicile Conjugal, L’Amour en fuite – France – 1959/1979
Support : UHD 4K
Genre : Drame, Comédie sentimentale
Réalisateur : François Truffaut
Acteurs : Jean-Pierre Léaud, Marie-France Pisier, Claude Jade, Michael Lonsdale, Delphine Seyrig, Daniel Ceccaldi, Jacques Rispal, Barbara Laage, Hiroko Berghauer, Dorothée, Dani
Musique : Jean Constantin, Antoine Duhamel, Georges Delerue
Durée : 416 minutes
Image : 2.35 et 1.66 16/9
Son : Français DTS HD Master Audio 1.0, Audiodescription
Sous-titres : Français pour sourds et malentendants
Éditeur : Carlotta Films
Date de sortie : 01 décembre 2021
LE PITCH
Sorti en 1959, Les 400 Coups marque à la fois l’acte de naissance de François Truffaut réalisateur et celui de son double de fiction, Antoine Doinel. À travers ce personnage, qui trouve en Jean-Pierre Léaud un interprète idéal, le cinéaste raconte la vie, l’amour, les tracas du quotidien, au cours d’une saga intimiste aussi drôle que tendre, qu’il filmera sur vingt ans.
Un héros français
Cinéaste et auteur vénéré, acteur majeur de la Nouvelle Vague, François Truffaut aura laissé une trace indélébile dans le cinéma français et le 7ème Art en général. Au centre de sa filmographie, en plus de vingt ans de films, et ce dès le premier d’entre eux, reviendra comme une douce mélopée la vie d’Antoine Doinel, personnage récurrent autour duquel le réalisateur tissera le thème ô combien galvaudé des relations entre les hommes, les femmes et ce sentiment doux-amer que peut parfois être l’amour. Avec, en guise de bonbon acidulé l’accompagnant, un soupçon de légèreté musicale, une mélancolie à fleur de peau et la folie douce d’un personnage qui à force de ne ressembler qu’à lui-même finira par représenter à peu près tout le monde.
Pourtant, bien loin de cet esprit léger que prendront les aventures amoureuses d’Antoine, ces premiers pas à l’écran se font dans la douleur. Dans Les 400 Coups, qui révèle en même temps Truffaut comme cinéaste porteur d’une Nouvelle Vague qui semble tout réinventer, Antoine a 12 ans et a du mal à trouver sa place entre des parents peu aimants et une institution scolaire qui semble ne pas comprendre ses qualités d’élève. Pourtant, le jeune écolier s’intéresse à la littérature, voue même (littéralement !) un culte à Balzac, mais une succession de maladresses lui valent de toujours passer à côté de la moindre reconnaissance et de se retrouver accuser injustement avant de finalement plonger dans le petit larcin et d’être placé dans un centre d’observation pour mineurs. Les 400 Coups, malgré un humour en pointillés et sa légèreté de ton, déjà, montre une France d’après-guerre dure et sans concession avec les enfants. Notamment ceux qui sortent légèrement du cadre, comme probablement Truffaut à l’époque, et qui pioche énormément de lieux et de situations de sa propre enfance. Dans le rôle du jeune Antoine Doinel, Jean-Pierre Léaud est étonnant de fraîcheur et de justesse, avec ce petit truc en plus dans le regard et le sourire en coin, qui finissent de lui prêter une tête qu’on hésite à câliner ou baffer. Une totale réussite.
L’homme qui aimait les parents des femmes
Étrangement, la suite de la vie d’Antoine Doinel n’est pas racontée dans un film mais dans un « simple » court métrage prenant place au sein d’un film à sketches (L’Amour à 20 Ans) auquel Truffaut participe. Antoine a maintenant 17 ans, travaille dans l’industrie du disque et passe une bonne partie de ses loisirs autour de la musique. C’est à l’occasion d’un concert qu’il rencontre celle qui deviendra son premier amour : Colette (Marie-France Pisier). Un amour bien maladroit et platonique, au grand dam d’Antoine, qui s’accroche à elle jusqu’au ridicule le plus consommé, jusqu’à être humilié dans une scène de fin à mourir de rire (mais à l’amertume bien présente). En à peine 30mn, Truffaut accouche d’un petit chef d’œuvre à la réalisation légère qui doit beaucoup à l’énergie communicative de Jean-Pierre Léaud, parfait en dadais candide ridiculisé jusqu’à l’outrance. Une situation embarrassante que Truffaut réussira à retourner à l’avantage de son personnage plus tard, en lui faisant avouer qu’avant de tomber amoureux de sa petite amie, il faut qu’il tombe amoureux de ses parents. Un pied de nez aux origines compliquées du personnage et à celles, probablement, de Truffaut avec ses propres parents (mais dont il se défendra plus tard).
L’éducation sentimentale
Dans Baisers Volés, troisième de ses aventures, Antoine grandit mais se cherche toujours. Il accumule les petits boulots, dont certains totalement improbables (comme détective privé, ce qui nous vaut une scène d’anthologie avec l’immense Michael Lonsdale). Mais sa quête désespérée reste celle de l’Amour, qu’il va finir par connaître (du moins physiquement) d’abord dans les bras d’une femme bien plus mure que lui (l’occasion cette fois de profiter de la présence de Delphine Seyrig) avant de rencontrer enfin celle qui deviendra, du moins pour un long moment, l’amour de sa vie : Christine (Claude Jade).
Baisers Volés donne l’impression de montrer enfin toute l’étendue du personnage inventé par Truffaut. Son humour, ses choix et les faiblesses qui le rendent si humains et véridiques. En ce sens, le film est un carrefour dont les embranchements choisis par son héros vont définir tout le reste de ses aventures. L’arrivée de Claude Jade, parfaite en petite jeune fille sage, va, elle aussi, beaucoup compter pour la suite (Truffaut la demandera d’ailleurs en mariage, brouillant un peu plus les frontières qui le séparent de son héros) car son personnage, désormais présent jusqu’à la fin, va faire partir définitivement Antoine vers la voie du mariage puis de la paternité. L’âge de raison ? Pas si sûr.
Tintin Doinel
Domicile Conjugal et L’Amour en Fuite, les deux derniers films, se vivent alors comme un diptyque sacrément savoureux. Le premier enferme (littéralement au vu du titre) Antoine dans un immeuble parisien où sa vie de famille fait partie intégrante de celle des habitants de l’immeuble. Tandis que Christine donne ses cours de violon dans l’appartement conjugal (la musique, encore) lui vend des roses dans la cour… Après avoir changé leur pigment naturel à l’aide de différents colorants. Le zèbre n’a pas changé ! Entre deux portes qui claquent et la ménagerie de cet immeuble contrasté qui évoque parfois les personnages hauts en couleur des cases d’Hergé, Antoine trompe Christine avec la première japonaise venue, fruit défendu et exotique qu’il n’avait pas encore à son palmarès et qui va précipiter son divorce (par consentement mutuel, le premier à l’écran). Une scène de tribunal qui donne l’occasion de retrouver la Colette des débuts et vers qui Antoine va se précipiter après avoir pourtant jurer ses grands dieux à une disquaire (Dorothée, excellente) qu’elle est l’amour de sa vie.
On sent dans ces deux derniers films que Truffaut n’appréhende plus la vie de son héros de la même manière. L’amertume des débuts (et malgré la présence de scènes de ménage sans équivoque) a cédé la place à une légèreté et à un humour de plus en plus présent. Comme si la folie du doux rêveur Doinel avait fini par emporter les certitudes et les ressentiments de Truffaut lui-même. Comme dans cette scène où le cinéaste rend un hommage court mais remarqué au Monsieur Hulot de Tati, perdu comme à son habitude devant la modernité (ici celle du métro). Un humour espiègle, de garnement, comme celui sur les bancs de l’école. Comme si finalement tout cela n’avait pas beaucoup d’importance ni de gravité. Mais oui, finalement.
Image
En revisionnant les films sur les anciens supports Bluray, la nécessité d’une restauration conséquente est particulièrement évidente : cadres abimés, instables, définition très aléatoire, abus de DNR, couleurs baveuses… Les nouveaux masters produits par Carlotta sont un vrai bonheur avec de nouveau Scan 4K des négatifs originaux, un nettoyage en règle de chaque image et un réétalonnage homogène des couleurs et des matières. Les argentiques sont délicats, le grain de pellicule vibrant et naturel, et les films retrouvent enfin leurs textures cinéma et leurs atmosphères propres à chaque époque. Superbes.
Son
Pas mieux avec les nouvelles pistes DTS HD Master Audio qui retranscrivent au mieux les monos d’origine. Quelques petites saturation et perditions se laissent encore entendre (sur Les 400 coups et Antoinette et Colette essentiellement), mais rien de vraiment choquant quand, à côté, les pistes se redécouvrent une clarté inédite.
Interactivité
Proposé sous la forme d’un coffret cartonné solide comprenant quatre digipack en son sein, la collection Antoine Doinel est aller grappiller ses suppléments du coté de nombreuses archives. Tout d’abord celles de l’éditeur / distributeur MK2 avec la reprise des introductions signées Serge Taubiana. De bonnes mises en bouches auxquelles viennent s’ajouter une petite pluie d’interviews et de sujet télévisés consacrés aux films et à Truffaut au cours des années. Pas toujours très longs ces segments rappellent tout de même qu’à une époque pas si lointaine on parlait vraiment de cinéma (écriture, mise en scène…) à la télévision jusque sur les plateaux de Michel Drucker. Plus conséquente, la rencontre avec Claude de Givray et Bernard Revon, coscénaristes avec François Truffaut de Baisers volés et Domicile conjugal, amorce un portrait amusé et chaleureux du cinéaste. A noter aussi la présence sur le premier disque du court métrage Les Mistons (lui aussi restauré), autre évocation poétique et mélancolique par Truffaut de la jeunesse des petits garçons avec au passage la révélation Bernadette Laffont, objet déjà de tous les désirs.
Liste des bonus
Commentaires audios pour chaque films, Présentation des films par Serge Taubiana, Cinéastes de notre temps : François Truffaut ou l’esprit critique (5’), L’invité du dimanche : François Truffaut (2’), Les Essais des comédiens (7’), Bandes annonces, Court métrage Les Mistons (1957,19’), Le Carrousel aux images (8’), Cinéastes de notre temps : Dix ans Dix Films (9’& 5’), Cinéastes de notre temps : Rushes (8’), Journal Télévisé FR3 Auvergne (3’), Spot soutien à Henri Langlois (1’), Variances (6’), Midi Magazine (4’), Biennale du salon de la radio et TVV (3’), Nord Actualités (4’), Bulletin d’information (11’), Travailler avec François Truffaut (45’), Ciné-Regards : Le Film de la semaine (4’), Salle des fêtes : Cinéma (4’), Spécial Cinéma (21’).