LE SECRET DE LA PYRAMIDE
Young Sherlock Holmes – Etats-Unis – 1985
Support : Bluray
Genre : Aventures
Réalisateur : Barry Levinson
Acteurs : Nicholas Rowe, Alan Cox, Sophie Ward, Anthony Higgins, Susan Fleetwood, Freddie Jones…
Musique : Bruce Broughton
Durée : 109 minutes
Image : 1.78
Son : Dolby True HD 5.1 Anglais, Dolby Digital 2.0 Français, Allemand…
S-T : Français
Distributeur : Paramount Home Video
Date de sortie : 1er février 2023
LE PITCH
1870 ; Ayant quitté sa campagne pour poursuivre ses études à Londres, le jeune John Watson fait la rencontre d’un étonnant camarade de classe nommé Sherlock Holmes. Ensemble, ils vont faire face aux survivants d’un culte égyptien qui mènent une vengeance secrète…
Sherlock Holmes et le temple maudit
Il aura fallu s’armer de patience. Dix-neuf ans (!) après une sortie en DVD purement technique, Le secret de la pyramide fait enfin ses premiers pas en haute-définition. Pas de quoi sauter au plafond cependant. Seul le packaging (un joli steelbook reproduisant l’affiche américain d’époque) a fait l’objet d’un minimum de soin. Pas de restauration, pas de suppléments inédits concoctés pour l’occasion. Le film et rien que le film (mais quel film !) dans une copie d’un autre âge. Encore un coup de Moriarty ?
19,7 millions de dollar pour un budget de 18 sur le seul territoire nord-américain. Accompagné à sa sortie le 4 décembre 1985 de critiques mitigées, Le secret de la pyramide vient mettre un coup de frein brutal à une série de succès planétaires produits par Steven Spielberg et sa compagnie Amblin. Certes, le film engrange des bénéfices à l’étranger mais la déception est bien réelle. Malgré le boulot abattu par Barry Levinson, Chris Columbus, ILM et un casting de jeunes acteurs prometteurs, le public n’offre pas le même accueil à cette origin story du plus grand détective de la littérature moderne qu’à Gremlins, Les Goonies ou Retour vers le futur. Avec le recul, il n’est pas si difficile de comprendre pourquoi.
Pour la première fois, en effet, Spielberg et sa bande s’attaquaient là à un personnage créé par un autre et une icône (poussiéreuse?) loin de correspondre à la boulimie de fraîcheur, de jeunesse et de nouveauté du public des années 80. Pour « aggraver son cas », surveillé de près par les gardiens du temple Conan Doyle, Chris Columbus prit le parti de respecter scrupuleusement la mythologie de Sherlock Holmes et la psychologie du personnage. Monstre d’intellect, sûr de lui et hautain, Holmes est donc loin de se montrer aussi attachant et cool qu’un Marty McFly ou un Mikey Walsh. Et son caractère froid et maussade trouve ici une justification dans son histoire d’amour tragique avec la belle Elizabeth (superbe Sophie Ward), dérogeant au sacro-saint happy-end. En dehors d’effets spéciaux spectaculaires et de toute beauté et d’un fond d’exotisme pouvant évoquer la franchise Indiana Jones, Le secret de la pyramide ne partait donc pas forcément gagnant et seul le public européen, plus attaché à la source littéraire et à son pouvoir d’évocation, aura su se montrer sensible aux charmes intemporels du film de Barry Levinson.
Meurtres sur la Tamise
À la fois récit d’initiation d’un provincial naïf (Watson, qui tient lieu de narrateur et de point d’identification pour le public) confronté à la cruauté raffinée de la société victorienne, enquête policière classique, drame gothique et romantique et film d’horreur psychologique, Le secret de la pyramide surprend encore aujourd’hui par sa complexité remarquable. Avant de se compromettre plus d’une fois dans une carrière de cinéaste très inégale, Chris Columbus était un scénariste passionnant et cette aventure fantasmée d’un Sherlock Holmes à l’aube de l’âge adulte est son magnum opus. Pour l’illustrer, Barry Levinson opère à contre-courant des modes et puise directement son inspiration chez David Lean, Terence Fisher et Fritz Lang. S’il ne se prive pas de quelques accélérations (le défi de Dudley, la première évasion de la pyramide et la poursuite dans le cimetière), le rythme est volontiers académique, encore une fois bien loin de la course contre la montre imposée par l’écrasante majorité du cinéma de l’époque. Deux péripéties résument assez subtilement la note d’intention de Levinson. La première est une énigme que Holmes pose à Watson à l’issue de leur première rencontre et que ce dernier ne parviendra à résoudre qu’à la toute fin du film, ayant fini par comprendre que la réflexion et la logique ont indéniablement l’avantage sur la précipitation et la vanité de « celui qui sait ». La seconde est la rivalité opposant Holmes au professeur Rathe (Anthony Higgins, d’une classe folle), rythmée par des duels successifs à l’épée où les enjeux ne cessent de prendre de l’importance mais où la discipline, la technique et le fair-play (ou son absence) demeurent indissociable de la figure du héros ET du gentleman. À ce vernis de la civilisation, Columbus et Levinson opposent les angoisses, les phobies et la culpabilité qui rongent les protagonistes et auxquelles tous doivent se confronter lorsque frappe le poison hallucinogène employé par les membres du culte de Rame Tep, terrifiante métaphore du colonialisme et des rancœurs sanglantes que l’Empire Britannique traîne dans son sillage.
Devenu culte pour certains mais loin d’être reconnu pour le grand film qu’il est pourtant, porté par un score absolument mémorable du trop rare Bruce Broughton, Le Secret de la pyramide a néanmoins laissé son empreinte dans la pop culture contemporaine. De la franchise Harry Potter au récent The Pale Blue Eye de Scott Cooper en passant par le Sherlock de Mark Gatiss, Steven Moffat et Benedict Cumberbatch (très proche de celui de Nicholas Rowe), tous ont une dette envers le film de Barry Levinson.
Image
Impossible de cacher notre déception face à un master vieillissant, le même qui fut utilisé pour le DVD de 2004. Des poussières se trimballent d’un coin à l’autre du cadre et un voile terne abîme la colorimétrie. Le passage à la haute-définition permet néanmoins à certaines séquences de tirer leur épingle du jeu. Le laboratoire surchargé de l’excentrique Rupert Waxflater gagne en profondeur de champ et en détails, la texture de certains vêtements est rehaussée et l’épilogue retrouve sa flamboyance d’origine. Il faudra s’en contenter.
Son
La piste originale est la seule à bénéficier de cette nouvelle édition avec un très beau mixage en Dolby True HD qui donne de l’ampleur aux ambiances, une seconde jeunesse à la musique de Bruce Broughton et un surcroît de clarté aux dialogues. Pour les nostalgiques, la version française est de la partie, propre mais sans éclat.
Interactivité
Rien, pas même une bande-annonce pour venir casser la monotonie d’un menu d’une tristesse à se pendre.
Liste des bonus
Aucun.