LE PASSAGER DE LA PLUIE
France, Italie – 1970
Support : Bluray
Genre : Thriller
Réalisateur : René Clément
Acteurs : Charles Bronson, Marlène Jobert, Gabriele Tinti, Jean Gaven, Jean Piat, Jill Ireland, Annie Cordy…
Musique : Francis Lai
Image : 1.66 16/9
Son : Français et anglais DTS HD Master Audio 2.0
Sous-titres : Français
Durée : 120 minutes
Éditeur : Studiocanal
Date de sortie : 06 septembre 2023
LE PITCH
Un soir, un inconnu surprend Mélancolie Mau seule chez elle et la viole. Folle de terreur, elle le tue et se débarrasse du cadavre. Mais peu de temps après, un mystérieux Américain la harcèle de questions. Refusant d’avouer le meurtre, elle se retrouve alors impliquée dans une lutte sans merci avec son inquisiteur.
Mélancolie et le loup
Golden Globe du meilleur film étranger en 1971 et joli succès public et critique, Le Passager de la pluie aura surtout frappé les esprits par la sensation de contraste total entre la petite, volubile et douce Marlène Jobert et le futur vigilant viril et taiseux Charles Bronson. Et c’est justement cette juxtaposition improbable qui fait que le film fonctionne.
Quatre ans après la grosse production Paris brule-t-il ?, René Clément, qui fut l’un des cinéastes les plus respectés des années 50 (Jeux Interdits, Gervaise…) et 60 (Plein Soleil, Les Félins…) aborde les années 70 avec un peu plus d’inquiétude, cherchant un projet qui lui permettrait à nouveau de s’inscrire dans une certaine modernité. Ce dernier lui sera amené par le romancier et ami Sébastien Japrisot (L’été meurtrier, Un Long dimanche de fiançailles…) qui avec son script du Passager de la pluie abordait le drame policier avec un angle biaisé.
Celui où justement le crime et le coupable sont connu dès les premières minutes du film et où le suspens repose sur la capacité de l’enquèteur à faire avouer. D’un coté donc la toute fragile Marlène Jobert, travaillant de sa petite voix et de ses manières gamines, une figure de femme enfant bornée comme les aime Japrisot, et de l’autre un homme étrange, dur et brutal, mais aussi patient et attendri, incarné par Charles Bronson (qui avait d’ailleurs déjà croisé l’auteur sur le tournage d’Adieu l’ami). Un face à face de prime abord déséquilibré, autant parce que Mélancolie est avant tout victime d’un viol terrible, mais aussi par les mensonges et manigances mis en place par l’américain Harry Dobs, mais où progressivement les tendances vont varier dans un jeu de dupe et de séduction parfaitement incarné.
Contrevérités
Les deux acteurs y sont parfaitement dans leurs éléments, et il est évident que le metteur en scène n’est ici jamais autant inspiré que lorsqu’il les places en opposition dans des décors restreints, comme habités sur une scène théâtrale où la vérité s’esquive habilement à chaque fois qu’elle manque d’être révélée. Il semble beaucoup moins à l’aise lorsque le récit retrouve la poétique psychologique habituelle de l’auteur, s’échappant vers des flashbacks presque freudiens assénés ici avec lourdeur, ou lorsque la pauvre jeunes femme s’embarque dans une curieuse virée dans le milieu criminel mondain parisiens tirant le film vers une curieuse abstraction caricaturale du genre. Le film semble ainsi souvent batailler entre une optique presque surréaliste où les virements et revirements frôlent l’absurde, et une structure plus ferme, presque hitchcockienne (l’homme assassiné s’appelle Mac Guffin, et ce n’est pas un hasard) lui donnant des airs constamment entre deux eaux. Le meilleur mariage de ces deux aspirations restant certainement l’ouverture du film, subliment évocatrice de l’étrange mélancolie (c’est son prénom) qui habite l’héroïne en quelques plans et un simple dialogue (« le car n’amène jamais personne. » « Alors c’est la pluie ») avant de bifurquer brutalement vers le thriller brut, presque horrifique, lorsqu’elle est attaquée chez elle. L’atmosphère, la précision du montage et la pudeur de la caméra décrivent toute l’agression autant comme un cauchemar éveillé que comme un choc profond et identitaire qui va entamer la transformation de la protagoniste. De femme objet, docile et effacée, à femme têtue mais surtout maitresse d’elle-même, découvrant certaine vérité sur son époux bien machiste, dépassant sa culpabilité d’enfant et s’imposant, enfin, face à sa mère (étonnante Annie Cordy). Un cheminement heurté pour un film qui ne l’est pas moins.
Image
Le Passager de la pluie a été restauré en 2021 à partir d’un scan 4K des négatifs. Autant dire que le résultat est largement au-dessus des ressorties précédentes (salles et DVD) et que le métrage n’a jamais autant mis en avant ses riches couleurs et sa profondeur de champs. Les cadres ont été très consciencieusement nettoyés et pas un défaut ne s’échappe de cadres fermes et stables. C’est surtout ce mélange de piqué extrêmement précis et de grain souligné, raffermi, qui donne au master des reflets délicieusement cinématographiques.
Son
Pour la première fois chez nous le film est présenté dans sa version française (avec Charles Bronson et d’autres acteurs étrangers doublés) ET en version anglaise où la tendance s’inverse puisqu’à l’époque les prises furent systématiquement rejouées sur le plateau en anglais, espérant ainsi toucher plus facilement le public international. Une curiosité, et pour le coup deux mixages DTS HD Master Audio 2.0 qui se ressemblent beaucoup dans leurs équilibres et leurs clartés.
Interactivité
Proposé dans la collection Nos Années 70, Le Passager de la pluie est comme il se doit précéder d’une présentation du directeur de collection Jérôme Wybon. Une introduction sobre et efficace, resituant le film, soulignant sa personnalité et revenant sur ce double tournage en français et anglais. On découvre aussi un reportage TV enregistré pendant le tournage par une équipe suédoise, permettant d’observer l’équipe au travail et de profiter de quelques interviews, dont celle d’un Charles Bronson toujours aussi sec et réfractaire à l’exercice journalistique.
Liste des bonus
Introduction par Jérôme Wybon (6’), Reportage sur le tournage (9’), Bandes-annonces.