LE TRAITRE DU TEXAS
Horizons West – Etats-Unis – 1952
Support : Bluray & DVD
Genre : Western
Réalisateur : Budd Boetticher
Acteurs : Robert Ryan, Julia Adams, Rock Hudson, Judith Braun, John McIntire, Raymond Burr…
Musique : Henri Mancini, Herman Stein
Image : 1.33 16/9
Son : Anglais et français DTS HD Master Audio 2.0 mono
Sous-titres : Français
Durée : 85 minutes
Editeur : Sidonis Calysta
Date de sortie : 27 janvier 2024
LE PITCH
Après avoir fait la guerre dans les rangs sudistes, deux frères rentrent au ranch paternel. L’un veut reprendre tout naturellement sa place, l’autre veut gagner beaucoup d’argent le plus rapidement possible…
La chute d’un caïd
Second vrai western signé par un Budd Boetticher qui n’était pas encore entré dans la légende pour son incontournable série avec Randolph Scott, Le Traitre du Texas a longtemps été oublié dans les canons de la critique et difficilement visible par les amateurs. Les années aidant, et la qualité étant évidente, le petit film à pris du galon.
Le film se situe véritablement à un tournant de la carrière de Budd Boetticher. D’ailleurs cela ne fait qu’un peu plus d’un an qu’il a opté pour ce pseudo, abandonnant son véritable nom Oscar Boetticher Jr comme signature. En 1952 ce dernier est sous contrat avec la Universal et enquille les tournages et les projets les uns après les autres comme à l’usine. Films d’aventure (La Cité sous la mer), films de guerre (Les Conducteurs du diable), film sur le rodéo (le bien nommé Les Rois du rodéo), mais aussi de première véritable incursion dans le cadre mythique du western. Un premier et méritant A feu et à sang avec Audie Murphy en début d’année, et quelques mois plus tard à peine ce Traitre du Texas, toujours écris par le camarade Louis Stevens, mais avec cette fois-ci plus de coffre et d’épaisseur. L’ouverture en dit déjà beaucoup lorsqu’elle suit paisiblement le retour au bercail de trois jeunes rescapés sudistes de la guerre de Sécession, un employé de ferme qui ne rêve de retrouvaille sa famille et faire de nouveaux enfants, et deux frères, l’un prenant la défaite avec philosophie s’estimant heureux de pouvoir retrouver la ferme familiale (Rock Hudson), l’autre rongeant déjà son frein et affirmant ne pas aimer perdre.
Horizons perdus
C’est ce dernier, incarné par le charismatique Robert Ryan (Les Diables de Guadalcanal, Plus fort que la loi…) qui va devenir le principal protagoniste d’un métrage qui emprunte énormément aux films de gangsters de la décennie précédente autant dans sa construction classique en forme de grandeur et décadence d’un criminel venu de rien, que dans la sympathie constante et ambiguë que le film fait naitre envers lui. Rejetant le long chemin de la dignité, jalousant un riche propriétaire antipathique joué par Raymond Burr pour ses moyens et sa femme, humilié publiquement par ce dernier, Dan Hammond va alors décider de s’associer avec d’autres laissés pour compte de la guerre (sudistes, nordistes, déserteurs…) et de faire fortune en volant le bétail pour le revendre au Mexique. Une ascension d’autant plus fulgurante qu’il finira par devenir le grand notable de la ville et d’assoir son statut avec l’aide des autorités officielle. De victime d’un destin injuste, à meurtrier sans foi ni loi et à mafieux (avant l’heure) cruel et sans morale, le personnage garde un charisme et une humanité qu’aura bien du mal à concurrencer Rock Hudson d’ailleurs. C’est d’ailleurs là l’une des petites faiblesses de ce film simple en apparence et pourtant particulièrement riche en thèmes et en personnages (en veuve indépendante, forte et pourtant amoureuse Julie Adams est formidable), où la rigueur rythmique et l’économie dramatique de Boetticher aurait mérité pour le coup un peu plus d’ampleur et sans doute une durée légèrement plus étendue (ici 1h20 au cordeau comme d’habitude).
Petits regrets, soit, mais pour un western déjà à l’excellente tenue, admirablement composé, à la mise en scène simple mais précise et à l’interprétation générale franchement solide, qui dresse le portrait d’une Amérique déjà très ambivalente avec le statut de ses vétérans et le regard porté sur ses glorieux criminels, versant exacerbé du fameux self-made-man.
Image
Le Traitre du Texas fait partie de ces nombreux films en couleur des années 50 qui mériteraient clairement de repasser par un scan à la source. Forcément n’étant pas dans la short list des classiques, le métrage doit se contenter d’un travail très soigné à partir d’un master quelque peu daté. Les efforts sont évidents avec des cadres très propres et stables, des couleurs bien nourries et une définition qui souligne régulièrement l’excellence des décors et des costumes. Cependant le piqué est fluctuant et surtout les couches de couleurs de la pellicule originale ont quelques peu bougées avec le temps et aboutissent à quelques halos de couleur et décalages que le traitement numérique ne peut pas totalement dissimuler. Cela reste tout de même pas mal du tout pour une production de ce type.
Son
La version originale semble ici très confortable avec une restitution mono précise sans perturbation notable. Le doublage français s’en sort plutôt bien aussi, malgré cette habituelle sensation d’écrasement des arrière-plans sonores.
Interactivité
Budd Boetticher est souvent bien choyé par Sidonis Calysta et son abyssale collection de western. Encore une fois on retrouve donc une importante banque de documents accumulées au cours du temps avec une présentation du film par Patrick Brion, mais qui dérive surtout sur la carrière du réalisateur, des souvenirs de Bertrand Tavernier autour de sa découverte de la filmographie du monsieur et des liens qu’il a pu tisser au cours des années avec lui. D’ailleurs on les retrouve tous deux pour une conversation télévisée d’archive dans laquelle le maitre du western évoque sans langue de bois, beaucoup d’humour et de tendresse, les grandes années de sa carrière, avec quelques anecdotes sur les grands acteurs et actrices qu’il a croisées, ou sur les méthodes à la chaine des grands studios. Une rencontre passionnante et souriante parfaitement complétée par le portrait d’une heure produit aux USA il y a quelques années. Peter Bogdanovich, Clint Eastwood, Tarantino et plein d’autres viennent évoquer sa longue carrière et décortiquer méthodes et grandes réussites.
Le film en question ici semblant peut-être un peu délaissé, Sidonis Calysta a donc invité l’habitué Jean-François Giré pour une présentation complète et enthousiaste de ce dernier.
Liste des bonus
Conversation entre Bertrand Tavernier et Budd Boetticher (22’), Budd Boetticher Maitre du Western (49’), Portrait de Budd Boetticher par Bertrand Tavernier (23’), Présentation par Patrick Brion (7’), Présentation par Jean-François Giré (17’), Bandes-annonces.