LE SURVIVANT D’UN MONDE PARALLÈLE
The Survivor – Australie, Royaume-Uni – 1981
Support : Bluray & DVD
Genre : Fantastique, Horreur
Réalisateur : David Hemmings
Acteurs : Robert Powell, Jenny Agutter, Joseph Cotten, Angela Punch McGregor…
Musique : Brian May
Durée : 98 minutes
Image : 2.35 16/9
Son : Anglais DTS HD Master Audio 2.0 mono
Sous-titres : Français
Editeur : Rimini Éditions
Date de sortie : 20 septembre 2021
LE PITCH
Unique survivant d’une catastrophe aérienne, dont il est sorti étrangement indemne, le commandant Keller décide de mener sa propre enquête sur les circonstances de l’accident. Hanté par les esprits des victimes du crash, devenu totalement amnésique, il aura besoin de l’aide d’une jeune femme pour élucider les nombreux mystères qui entourent le drame…
Venu d’ailleurs
Longtemps présenté dans une version tronquée et injustement boudé, le très atmosphérique The Survivor (le titre français « spoiler effect » est une honte) mérite largement une redécouverte. Un thriller fantastique qui rappelle une nouvelle fois l’incroyable vitalité du cinéma de genre australien en ce début des années 80.
Premier film australien à dépasser le budget d’un million de dollars (AUS), The Survivor a ouvertement profité du précédent succès du producteur Antony I. Ginnane (Patrick, Les Traqués de l’an 2000), qui s’imaginait déjà rencontrer un engouement plus spectaculaire encore en dégottant les droits du roman de James Herbert, auteur alors plébiscité grâce à Les Rats et Fog. Pour ce nouveau film, on retrouve d’ailleurs Robert Powell dans le rôle principal, à nouveau accompagné par le David Hemmings de Blow Up et Les Frissons de l’angoisse mais cette fois-ci au poste de réalisateur. Une position qu’il a occupée et qu’il réoccupera à plusieurs reprises (du long métrage Gigolo à une palanqué d’épisodes pour des séries TV) mais qui ne sera jamais aussi payante qu’ici, ce dernier semblant véritablement s’approprier le matériau d’origine pour l’entraîner vers des rives plus étranges. Du roman purement horrifique, Hemmings en tire essentiellement une atmosphère fantasmagorique qu’il va cultiver tout du long en composant de très beau plans oniriques favorisés par la superbe photo du talentueux John Seale (Witness, Hitcher, Mad Max Fury Road…), se laissant envahir par les compositions décalées, angoissantes et quasiment expérimentales de Brian May (Mad Max, Déviation mortelle), quitte à relâcher la narration à l’extrême.
Comme un avion sans ailes
Un film flottant, parfois elliptique (en particulier dans la version courte avec un revirement inexplicable du commander Keller) qui transforme une simple enquête autour d’un spectaculaire crash d’avion en voyage entre deux mondes : celui des vivants et celui des morts, les victimes de l’accident semblant appeler constamment le survivant et les témoins à eux. L’impressionnante séquence d’ouverture reste à ce titre une admirable démonstration de force, réussissant à retranscrire un impact aussi bien physique (la déflagration, l’explosion…) que sensitif en présentant la carlingue éventrée comme un cadavre géant à moitié calciné dans un champ dévasté. Morbide et poétique lorsque apparaît au milieu de la brume le pilote miraculé. On reconnaît parfois les influences du contemplatif Pique-nique à Hanging Rock de Peter Weir ou du lyrisme d’un Nicholas Roeg (Walkabout), mais faisant ici aussi de nombreuses concessions à un cinéma de genre plus classique, s’attardant ainsi sur la mort de deux photographes poursuivis par des apparitions d’enfants fantomatiques, glissant quelques sursauts effectifs et offrant, avant un twist bien grillé par le titre français, le loisir au responsable de l’affaire d’exprimer longuement son plan et ses motivations. Parfois maladroit, un peu chaotique dans ses collages, mais toujours sincère et particulièrement attachant, The Survivor résiste aussi grâce aux performances du casting. On ne s’éternisera pas sur l’apparition flash-éclair du vétéran Joseph Cotten venant toucher son chèque en échange de son nom sur l’affiche, mais plutôt du duo incarné par l’intriguant Robert Powell (le Jésus de Nazareth de Zeffirelli) et la sublime Jenny Agutter (Walkabout, Le Loup-Garou de Londres, L’âge de cristal…), magnétique et subtile dans le rôle délicat d’une médium hantée par ces appels de l’au-delà.
De nombreux atouts pour un film qui mérite largement d’être redécouvert, surtout dans ce nouveau montage « intégral » qui lui redonne beaucoup de cohésion.
Image
Plus toute jeune, la source utilisée pour le Bluray de The Survivor ne cache jamais vraiment les nombreuses perditions dû à son âge et ses origines : petits points blancs, légères griffures, quelques instabilités sur les bords, légères variations de teintes… On note aussi un grain légèrement neigeux dans certaines séquences plus sombres, voir un peu plus lors de la réintégration de plans pour la version longue du film. Une restauration quasi absente donc, mais le film préserve cependant son rendu organique, cinématographique, grâce à une absence visible de réducteur de bruit ou autres logiciel atténuant. La palette de couleurs est ainsi assez généreuse et chaude (en particulier sur les verts) et les séquences en extérieurs assurent une très belle définition ainsi que de ciels bleus éclatants.
Son
Le film préserve sa source mono d’origine avec une restitution très propre et claire, réussit à braver les compositions expérimentales de Brian May et les voix discordantes venant de l’au-delà pour assurer une clarté efficace. A noter que seule la version originale est proposée sur la version complète du film. Le doublage français, bien écrasé et daté, reste définitivement attaché à la version courte.
Interactivité
Reconstituée en 2017, la version complète du film constitue forcément le premier argument de cette édition. Mais Rimini a gentiment pensé aux nostalgiques, et aux accros de la vf, qui peuvent ici revoir le film dans une copie SD (très neigeuse et légèrement floue) de la version cut (plus de dix minutes en moins), largement distribuée pendant des années. L’occasion d’observer aussi les coups de canifs fait à la dramaturgie du film, avec des ellipses curieuses ne rendant pas forcément le récit plus simple à appréhender.
Plus classiquement on retrouve un nouvel extrait version longue du documentaire Not Quite Hollywood, avec les interviews d’Antony I. Ginnane et du directeur photo John Seale. Le premier délivre essentiellement son point de vue de producteur, tandis que le second se remémore, non sans ironie, un tournage parfois un peu halluciné.
Jolie trouvaille aussi de l’éditeur français que cette émission australienne consacrée au tournage du film avec un petit défilé d’acteurs devant le micro (mais pas Robert Powell ou David Hemmings malheureusement) venant autant évoquer leurs débuts de carrière que le tournage en cours avec un ton presque badin.
Liste des bonus
Le film version courte non restaurée (SD, 85’, VF/VOST), Un livret rédigé par Marc Toullec (24 pages), Reportage sur le tournage (29’), Interview de Antony I. Ginnane (prod.) et John Seale (dir. photo.) (22’).