LE SOMMET DES DIEUX
France – 2021
Support : Bluray
Genre : Animation
Réalisateur : Patrick Imbert
Acteurs : Damien Boisseau, Lazare Herson-Macarel, Eric Herson-Macarel, Elisabeth Ventura…
Musique : Amine Bouhafa
Durée : 95 minutes
Image : 1.85 16/9
Son : Français DTS-HD Master Audio 5.1
Sous-titres : Anglais
Editeur : Wild Side Video
Date de sortie : 02 février 2022
LE PITCH
Un reporter tombe accidentellement sur la piste d’un appareil photo qui relance la question de la première ascension de l’Everest. Son enquête va l’emmener dans le sillage d’un mystérieux alpiniste qui va devenir le véritable sujet de son article.
Une œuvre universelle
Si, pour le grand public, l’animation française peut parfois faire malheureusement figure de parent pauvre, elle a pourtant son armée d’artistes talentueux mue par quelques ambassadeurs. Dont Patrick Imbert, derrière lequel on trouve d’excellents titres comme Avril et le Monde Truqué, Ernest et Célestine ou bien encore Le Grand Méchant Renard et Autres Contes… Cette fois, l’animateur passe à la réalisation, délaisse un peu les plus jeunes, pour embarquer leurs aînés dans l’adaptation d’un roman graphique signé du Maître japonais Jiro Taniguchi.
Pour ceux qui l’ignoreraient encore, Jiro Taniguchi est un mangaka au succès mondial, travaillant uniquement autour d’œuvres résolument adultes et dramatiques, aux thèmes très réalistes et dont le style épuré le rapproche assez de la bande dessinée européenne. Une sorte d’Hergé (stylistiquement parlant) au pays du soleil levant, d’ailleurs édité principalement par Casterman chez nous, ce qui le rapproche un peu plus de l’auteur du fameux reporter à la houppe. Parmi ses œuvres les plus célèbres, on peut citer Quartier Lointain, Un Ciel Radieux, Elle s’appelait Tomoji… dont certaines furent adaptées au cinéma dans son pays natal mais aussi chez nous, et toujours en prises de vue réelles, avec des acteurs de chair et de sang. Un fait pour le moins inhabituel pour un auteur de bande dessinée et qui prouve encore une fois à quel point sa sensibilité et l’universalité de ses histoires et de ses thèmes peuvent trouver un écho chez certains de ses pairs, fussent-ils réalisateurs de films et européens de surcroît. Et c’est le cas ici, avec Le Sommet des Dieux.
Toujours plus haut
A la base de son histoire, un fait véridique : la légendaire ascension de l’Everest par l’Anglais George Mallory en juin 1924. Légendaire car Mallory disparu corps et biens durant son exploit, laissant pour toujours le doute quant à son succès, ce qui aurait fait de lui le tout premier alpiniste à gravir le plus haut sommet du monde. Le Sommet des Dieux part donc de cette légende et invente un mystérieux appareil photo qui va croiser la route d’un jeune reporter japonais en quête d’un article retentissant sur le sujet. Sa trace va le mener jusqu’à Habu, un alpiniste, lui aussi japonais, taciturne et rugueux. Un homme obsédé par l’ascension des plus hautes montagnes du monde et hanté par des démons intérieurs que le journaliste va tenter d’identifier.
Au-delà de son rendu esthétique, dont les dessins (en 2D) épurés aux couleurs douces et froides offrent un relief parfait au noir et blanc des planches de Taniguchi, le film de Patrick Imbert (qui signe scénario et dialogues) sait en capter aussi l’atmosphère, faite de nombreux silences et de regards appuyés, qui trahissent les esprits tourmentés. Les partitions d’Amine Bouhafa s’occupant quant à elles de donner une musique à la montagne, qui devient pour le coup personnage à part entière et ne cesse de narguer ses prétendants au titre de héros de toute sa grandeur et sa majesté immuables. La beauté le dispute donc à la souffrance et offre des moments véritablement puissants. Notamment lorsqu’on est face au drame d’Habu, dont la mise en scène touche par ses choix pudiques et jamais ostensibles, rejoignant une nouvelle fois la pureté formelle, douce et claire des crayonnés de Taniguchi.
Le Sommet des Dieux est donc la réussite éclatante du savoir-faire prodigieux de plusieurs artistes de cultures totalement différentes, officiant sur différents médiums et se comprenant pourtant parfaitement bien. Jiro Taniguchi s’est éteint durant la production, laissant à tout jamais l’œuvre d’Imbert et son équipe orpheline.
Image
Parfaite. Les couleurs douces sont un régal pour l’œil et les contrastes (l’intro dans les rues sombres vs. les plans magnifiques des montagnes blanches) sont saisissants. Probablement parmi les plus belles images vues sur un écran récemment.
Son
Aussi important que l’image, il participe ici énormément à l’expérience de visionnage. Tandis que la musique habille les longs silences voire fait chanter les montagnes, les éléments sonores se répercutent, eux, aux quatre coins du système d’enceintes dans un 5.1 énergique et vivifiant. Les bourrasques, le son si particulier de la neige s’écrasant sous les pas ou le simple frottement d’une corde qui menace de céder nous immergent totalement dans ce spectacle techniquement impressionnant.
Interactivité
Plusieurs mini documentaires très intéressants. Le premier revient sur la production du film et surtout l’épisode de confinement national qui risqua d’en marquer la fin. Le deuxième s’attache à tous ses aspects et choix techniques, de dessins à l’animation en passant par la musique. Le troisième revient sur Cannes et ses fameuses marches. Un commentaire audio de Patrick Imbert lui-même et une bande annonce viennent s’y ajouter.
Liste des bonus
Chronique d’un film d’animation (19’05), La fabrication du film (14’11), Les coulisses de Cannes, Commentaire audio, Bande annonce (1’49).