LE SOLITAIRE DE FORT HUMBOLDT
Breakheart Pass – Etats-Unis – 1975
Support : Bluray & DVD
Genre : Western
Réalisateur : Tom Gries
Acteurs : Charles Bronson, Richard Crenna, Ben Johnson, Ed Lauter, Charles Durning, Jill Ireland…
Musique : Jerry Goldsmith
Durée : 95 minutes
Image : 1.37 16/9
Son : Anglais et Français DTS-HD Master Audio 2.0 Mono
Sous-titres : Français
Editeur : Sidonis Calysta
Date de sortie : 19 août 2021
LE PITCH
Un voyageur solitaire recherché pour meurtre est capturé et emmené dans un train transportant un bataillon de l’armée nordiste à destination d’un fort touché par la diphtérie. Dès son arrivée, plusieurs voyageurs sont victimes de meurtres mystérieux.
Le crime du Wild Wild Express
Alors que sa carrière n’est pas loin d’être au plus haut, Bronson participe, un an après sa première incarnation de l’architecte Paul Kersey, a un drôle de western au goût étrange. Un mélange des genres situé entre Agatha Christie et Les Mystères de l’Ouest. Une entreprise étonnante, bourrée ras la pellicule de trognes légendaires et parachevée par un score encore une fois fabuleux de l’immense Jerry Goldsmith. Presque trop beau pour être vrai.
Si le western est un genre qui s’embarrasse rarement d’un script tordu, Breakheart Pass est sûrement l’exception qui confirme la règle. Avec un scénario qu’on doit à Alistair MacLean, déjà auteur du fameux Quand les aigles attaquent, le film est un savoureux mélange de whodunit sur fond de guerre de sécession qui s’amuse à empiler les couches quitte à en devenir légèrement trop généreux. On a donc un bataillon de l’armée nordiste supposé traverser plusieurs Etats en train pour rejoindre un fort touché par la diphtérie, un personnage de curé un peu louche, un gouverneur qu’on imagine corrompu, sa compagne un peu perdue au milieu de tous ces hommes, un shérif à la gâchette facile et un étrange hors-la-loi sorti de nulle part (Bronson donc) dont le mutisme semble cacher un plan machiavélique. Un groupe de personnages que tout oppose, coincé par la force des choses dans la promiscuité d’un train qui fait inévitablement penser au célèbre Orient Express d’Agatha Christie. Une succession de meurtres étranges va définitivement le confirmer, transformant le film (au moins pour un temps) en une véritable enquête qui va nous apprendre, au fur et à mesure de ses révélations, que tout ce que nous savions depuis le départ n’était qu’un gigantesque écran de fumée.
Locomotive Jerry
Pourtant, dès son générique, Breakheart Pass envoie un signal fort qui en dit déjà long sur son identité et ses choix artistiques. La locomotive de son train, que l’on suivra tout du long, est le premier vrai personnage à apparaître à l’écran et les partitions du grand Jerry Goldsmith (ainsi que quelques images arrêtées et « redessinées » à l’aide de filtres – qui clôtureront également le film) lui donne l’apparence d’une autre célèbre locomotive : celle de James West et Artemus Gordon, les héros de la cultissime série des Mystères de L’Ouest. Une filiation qui ne s’arrêtera pas là, les révélations successives du scénario prouvant clairement le lien étroit du film avec la série au thème inoubliable. Un lien télévisuel que ne renie d’ailleurs pas la première partie du film, avec ses gros plans de personnages, ses champs/contre champs et un côté assez théâtral (dus aussi à l’étroitesse du train). Heureusement, la suite sera plus cinégénique, notamment lors d’une scène où plusieurs wagons contenant le bataillon de soldats quittent la voie de chemin de fer et s’écrasent plusieurs mètres plus bas dans un ralenti à la Peckinpah. Comparaison qui s’arrêtera là, la réalisation certes maîtrisée mais bien sage du méconnu Tom Gries n’ayant pas grand-chose à voir avec celle du réalisateur de La Horde Sauvage.
Les Cow-boys et les indiens
Au-delà de son scénario et de sa réalisation, Breakheart Pass propose aussi un festival de trognes invraisemblables comme seul le cinéma américain de cette époque était capable de nous en offrir ! On retrouve donc, autour de la célèbre moustache impassible de Bronson : Richard Crenna dans le rôle du gouverneur félon, Ed Lauter dans celui d’un gradé nordiste, Ben Johnson en shérif ripou, mais encore Charles Durning, David Huddleston, le géant chauve Robert Tessier et évidemment Jill Ireland, compagne quasi systématique de Bronson dans chacun de ses films dès lors qu’elle le fut à la ville. Un casting de seconds couteaux pour la plupart mais emblématique d’une production décomplexée et tournée avant tout vers la volonté d’offrir un film généreux à ses spectateurs. Générosité qui outrepasse peut-être un peu ses velléités dans une dernière partie nettement moins réussie que ce qui précédait en offrant un climax tonitruant où cowboys, indiens, héros et traîtres se rentrent dedans dans un gros bazar général. Mais qu’importe ! Finalement, Breakheart Pass, malgré des défauts parfois évidents, se regarde avec beaucoup de plaisir et peut rejoindre fièrement l’étagère, déjà bien encombrée, de tous ces films-témoignages d’une époque où le spectacle et la générosité semblaient primer sur la rentabilité.
Image
Un grain subsiste mais donne à l’image, surtout dans sa première partie et dans les scènes se déroulant à l’intérieur du train, une belle patine. La somme de détails encore jamais vue finit le travail. Pas extraordinaire néanmoins, certains passages manquant de clarté, mais le résultat reste nettement au-dessus de la moyenne.
Son
Une unique piste mono en Français et en Anglais mais passée par les platines du numérique qui donne aux partitions du grand Jerry une nouvelle vie et aux effets sonores une belle ampleur. La VO est plus enveloppante et plus chaude, la VF offre surtout de replonger dans son doublage magnifique aux voix inoubliables qui bercèrent nos jeunes années.
Interactivité
Une présentation du film par Jean-François Giré (spécialiste du western) qui revient rapidement sur la carrière du réalisateur et certains éléments du film. Une interview de l’auteur et critique britannique Kim Newman, qui lui revient plus en détail sur la carrière d’Alistair MacLean, vient la compléter.
Liste des bonus
Présentation par Jean-François Giré (12’02), Interview de Kim Newman (25’20), Bande annonce d’époque (3’08).