LE RAYON INVISIBLE
The Invisible Ray – États-Unis – 1936
Support : Bluray & DVD
Genre : Science-fiction
Réalisateur : Lambert Hillyer
Acteurs : Boris Karloff, Bela Lugosi, Frances Drake, Frank Lawton, Violet Kemble Cooper, Walter Kingsford, …
Musique : Franz Waxman
Durée : 79 minutes
Image : 1.37 16/9
Son : Anglais DTS-HD Master Audio 2.0 Mono
Sous-titres : Français
Éditeur : Éléphant Films
Date de sortie : 10 mai 2022
LE PITCH
A l’aide d’un télescope de sa propre fabrication et d’une technologie révolutionnaire exploitant les rayons invisibles provenant de l’espace, le Dr. Janos Rukh parvient à observer la chute d’une météorite sur Terre il y a des centaines de milliers d’années. Avec d’autres scientifiques, Rukh monte une expédition en Afrique pour retrouver les débris de cet astre précieux, …
Tout ce que le ciel permet
Série B de science-fiction au scénario et aux effets spéciaux surprenants, Le Rayon invisible promène Boris Karloff et Bela Lugosi des montagnes des Carpates aux rues de Paris en passant par les régions sauvages et inexplorées d’Afrique à la recherche d’un mystérieux nouvel élément. Une réussite aux accents lovecraftiens insoupçonnés.
Affaire rentable pour les studios Universal, la réunion à l’écran de Boris « Frankenstein » Karloff et Bela « Dracula » Lugosi a déjà porté ses fruits en 1934 et en 1935 avec Le Chat noir et Le Corbeau, deux adaptations d’Edgar Allan Poe réalisées respectivement par Edgar G. Ullmer et Lew Landers. Délaissant, en apparence, l’épouvante gothique et son héritage littéraire du siècle précédent, Le Rayon invisible naît de l’imagination du duo Howard Higgin / Douglas Hodges dont l’histoire originale est transformée en scénario par le dramaturge John Colton. Malgré une ouverture nocturne dans un château nîché tout en haut d’un col des Carpates et la présence d’une vieille femme aveugle obsédée par une malédiction familiale, on nage pourtant en pleine science-fiction. La mine sombre et le regard exalté, Boris Karloff joue les savants fous. Son immense observatoire braqué sur la galaxie d’Andromède, il espère capturer son rayonnement pour observer le passé et, plus spécifiquement, découvrir le lieu où un météorite s’est écrasé il y a plusieurs millénaires. Lequel météorite contiendrait un élément nommé Radium X, bien plus puissant que le radium de Pierre et Marie Curie. S’en suit une expédition en Afrique à laquelle participe le docteur Benet que campe un Bela Lugosi à contre-emploi dans le rôle du gentil scientifique. Irradié par le Radium X, Karloff devient luminescent la nuit et peut désormais tuer par un simple contact de la main. Lugosi guérit Karloff mais le prévient que son antidote peut affecter son mental. Ce qui finit effectivement par arriver puisque Karloff, paranoïaque jusqu’au bout de ses moustaches, fait croire à sa mort et entreprend de se venger de son entourage. Une histoire on ne peut plus rocambolesque mais qui a le mérite d’aligner avec savoir-faire les rebondissements et les ruptures de tons.
Dans l’abîme du temps
Que son influence soit consciente ou pas, l’ombre d’H.P. Lovecraft plane au-dessus du Rayon invisible telle un spectre échappée des abîmes du temps. La quête de savoir obsessionnelle du Dr Janos Rukh, dernier rejeton d’une très ancienne famille, ignorant les mises en garde répétées évoque quantité de protagonistes imaginés par l’écrivain de Providence. Les dialogues factuels, les confréries d’hommes de science, la vision quasi-mystique et fiévreuse du vide intersidéral dissimulant les secrets de temps immémoriaux, la menace tombée du ciel, le regard très colonialiste (et par conséquent raciste) et supersticieux portée sur le continent africain et ses tribus et les thématiques de la contamination et de la déliquescence de l’esprit. Tous ces éléments ne sont pas loin de constituer un best-of des romans de l’auteur de « L’Appel de Chtulhu » et de « L’Affaire Charles Dexter Ward », et ce, un avant sa mort en 1937. Dur de croire qu’il ne s’agit là que d’une coïncidence.
Remplaçant à quelques jours du tournage le réalisateur Stuart Walker (la première adaptation parlante des Grandes Espérances de Dickens en 1934, Le monstre de Londres) mécontent du scénario, le vétéran Lambert Hillyer, pourtant peu familier de l’horreur et de la science-fiction, emballe une série B de luxe au rythme impeccable. S’il néglige un peu l’émotion et si sa mise en image s’installe dans un académisme confortable et peu imaginatif, il a l’intelligence de capitaliser sur le cabotinage toujours délicieux de ses deux stars et de mettre en avant juste ce qu’il faut les superbes effets visuels – très novateurs pour l’époque – de John P. Fulton, celui-là même qui, en 1956, gagnera un Oscar pour son travail sur Les Dix Commandements de Cecil B. De Mille. Ajoutez à ce cocktail désuet mais attachant un très beau score du compositeur Franz Waxman et vous obtenez un classique mineur qu’il serait criminel de ne pas redécouvrir séance tenante.
Image
Issu de la même source que le blu-ray américain paru chez Shout Factory en 2019, à savoir un scan 2K des éléments originaux fournis par Universal, cette sortie inédite sur le territoire français affiche un master richement défini et aux contrastes solides malgré de nombreux points blancs et autres accidents de pellicule imputables au grand âge du film (86 ans tout de même !). Un très bel effort d’édition pour un résultat optimal.
Son
Bien qu’il soit sorti en France à la fin des années 30, Le Rayon invisible nous parvient aujourd’hui avec sa seule piste originale en mono au rendu impeccable mais forcément un peu terne, ce qu’on ne peut pas lui reprocher. Les dialogues ont l’avantage sur les effets sonores et la musique, le tout sans la moindre trace de saturation ou de souffle disgracieux.
Interactivité
Aussi dynamique qu’exhaustive, la présentation du film en moins de dix minutes par un Eddy Moine en mode « Jean-Pierre Dionnesque » rappellera de beaux souvenirs aux nostalgiques du Cinéma de Quartier sur Canal +. Comme quoi, il en faut peu pour rendre les cinéphages heureux (et c’est très bien comme ça) !
Liste des bonus
Le film vu par Eddy Moine (9 minutes) / Bandes-annonces de la collection.