LE PRINCE ET LE PAUVRE
Crossed Swords – Royaume-Uni, Etats-Unis – 1977
Support : Bluray & DVD
Genre : Aventure
Réalisateur : Richard Fleischer
Acteurs : Oliver Reed, Raquel Welch, Mark Lester, Ernest Borgnine, George C. Scott, Rex Harrison, David Hemmings, Harry Andrews, Lalla Ward, Charlton Heston, Murray Melvin…
Musique : Maurice Jarre
Image : 2.20 16/9
Son : Angais et français DTS HD Master Audio 2.0
Sous-titres : Français
Durée : 113 minutes
Editeur : StudioCanal
Date de sortie : 31 janvier 2024
LE PITCH
Un jeune voleur, pour échapper à la police, escalade un mur et se retrouve face à face avec le prince Edward, dont il est le parfait sosie. Pour une nuit, les deux garçons vont échanger leur vie. Mais il est aussi difficile pour le prince de se retrouver dans la rue que pour le pauvre d’être au palais !
La petit roi et les grandes stars
Grosse production faite d’aventure, de comédie et de drame en costume, Le Prince et le pauvre est l’un de ces divertissements all-star que le cinéma anglo-saxon produisait à grand frais dans les années 70 pour ramener les spectateurs dans les salles. Mais en 1977 y-a-t ’il encore la place pour une adaptation de Dickens et du swashbucler ?
De toute façon, même sans compter l’énorme révolution qui va frapper le cinéma mondial en cette belle année 1977 (doit-on vraiment donner le titre ?), une production comme celle du Prince et le pauvre avait déjà un petit quelque chose d’assez anachronique. L’ère est certes parfois aux divertissements nourris de défilés de stars, mais plutôt du coté des films catastrophe, mais surtout la décennie a été marquée par les ambitions du nouvel Hollywood des grandes transformations formelles, du polar âpre et des revendications générationnelles. Pourtant c’est dans ce contexte qu’en 1974 le diptyque Les Trois mousquetaires / On l’appelait Milady fait littéralement un carton et donne forcément envie au producteur Michael Salkind de remettre le couvert avec le succès. Ce sera alors par une nouvelle itération du célèbre conte de Charles Dickens, Le Prince et le pauvre, déjà adapté avec une certaine réussite en 1937 avec Errol Flynn. Ici forcément quelques changements sont apportés au texte original afin de le plier au modèle des « Mousquetaires » avec un Prince qui passe de gamin de neuf an à jeune adolescent de 18 (le malheureusement très fade Mark Lester vu dans le Oliver ! de Carol Reed), une mise avant des scènes de bagarre et de duels à l’épée pour faire plus populaire, et une galerie de portraits particulièrement généreuse qui permet d’imposer une affiche assez grandiose.
La cour et le chevalier
On croise ainsi Charlton Heston toujours solide et royal en Henri VIII vieillissant, George C. Scott en charismatique roi des voleurs veillant sur sa petite cour des miracles, Ernest Borgnine en père sans le sou et violent, Raquel Welch en Lady en détresse, David Hemmings en traitre familial… Et puis il y a Oliver Reed, qui certes fit manifestement encore des siennes durant le tournage, mais qui a l’écran est tout simplement impérial en chevalier déchu, castagneur, gouailleur mais noble voir tragique quand il tente de reprendre le titre qu’on lui a usurpé. Le véritable moteur du film, c’est clairement (encore une fois) lui. Des personnalités pas toujours faciles à dompter, mais que le déjà vétéran Richard Fleischer réussit à efficacement équilibrer à l’écran. Marqué par l’échec retentissant de son pourtant fabuleux Mandingo, le cinéaste de L’étrangleur de Boston, Les Flics ne dorment pas la nuit ou Soleil vert, a définitivement décidé d’enterrer sa carrière d’auteur et entame une ultime décennie en tant que mercenaire. Attention, un mercenaire particulièrement efficace tout de même, composant un joyeux spectacle rythmé et relevé, constamment généreux, superbement porté par la photographie quasi-technicolor du grand Jack Kardiff (Le Narcisse noir), mais où l’essentiel de l’énergie se tourne vers le divertissement populaire et l’illustration relativement sage du conte moral. Relativement sage car Fleischer ne peut totalement s’empêcher de glisser ici ou là quelques considérations plutôt acerbes sur l’ordre des choses avec en particulier un épilogue aux airs légers, mais qui par son ironie particulièrement cruelle remet en cause toutes les belles vérités et les bonnes volontés affichées durant le reste du métrage.
On ne peut plus sympathique et bien emballé, Le Prince et le pauvre va malheureusement sortir au pire moment possible au Royaume-Uni, alors que Star Wars emporte tout sur son passage, et ne sera même finalement distribué que l’année suivante aux USA et en France, peu relayé par la presse et un peu injustement mis de côté, oublié poliment. Toujours un peu injuste.
Image
StudioCanal propose ici un master qui n’est pas forcément de prime jeunesse, hérité sans doute d’une restauration pour l’ancien DVD, mais ce dernier reste cependant de très bonne qualité. Cadres propres, stables, piqué plutôt soigné même si un peu de profondeur supplémentaire aurait été bienvenue et les couleurs sont une excellente surprise avec un rendu très riche et généreux. Certes les contrastes semblent parfois un peu poussés et certains rouges par exemple sont un peu bouchés mais cela ne détonne pas trop dans le tableau général.
Son
La version mono originale en DTS HD Master Audio 2.0 est en jolie forme avec une écoute franche, claire et même joyeusement dynamique. Rien à redire sur la prestation. Le doublage français, plutôt sympa et énergique, est un peu plus égalisé et plat, mais néanmoins agréable.
Interactivité
Nouveau titre de la collection Make My Day et donc profitant d’une introduction toujours aussi essentielle du directeur de collection Jean-Baptiste Thoret qui ne cache pas son léger manque de considération (compréhensible) pour la dernière partie de la carrière de Fleischer, mais garde tout de même un regard plutôt tendre sur ce Prince et le pauvre. La carrière du cinéaste, les thèmes sociaux légèrement brossés, l’efficacité du spectacle et plus largement les thèmes et figures récurrentes de son cinéma sont largement approfondis dans l’intervention de Nicolas Tellop, auteur justement d’un ouvrage sur le bonhomme.
Plus surprenant, on trouve aussi une intervention d’Olivier Assayas qui fut assistant sur le tournage, et qui raconte de l’intérieur les petites anecdotes (parfois truculentes) d’un tournage hors-norme, les excès d’Oliver Reed, la personnalité et les grands projets des Salkind mais aussi un cinéma qui était déjà à des kilomètres de ses propres envies de jeune cinéphile mais qu’il a finalement redécouvert ici avec un certain plaisir.
Un peu dommage cependant de ne pas retrouver sur l’édition française la version longue internationale du film (122 minutes) disposée en SD sur l’édition US de Kino Lorber.
Liste des bonus
Préface de Jean-Baptiste Thoret, « Le Prince et le pauvre » revu par Nicolas Tellop (43’), Souvenirs d’un troisième assistant : Olivier Assayas (28’).