LE NEUVIÈME CŒUR
Deváté srdce – République Tchèque – 1979
Support : Bluray & DVD
Genre : Fantastique, Conte
Réalisateur : Juraj Herz
Acteurs : Ondrej Pavelka, Anna Malovà, Julie Juristovà, Josef Kemr
Musique : Petr Hapka
Durée : 91 minutes
Image : 1.37 16/9
Son : Français et Tchèque 2.0 mono
Sous-titres : Français
Éditeur : Artus Films
Date de sortie : 04 octobre 2022
LE PITCH
La jolie princesse Adriana est frappée d’un mal étrange : elle est comme absente le jour et disparaît la nuit. Après les échecs successifs de plusieurs enquêteurs, l’étudiant Martin se porte volontaire pour aider la princesse. Il va découvrir que l’astrologue Aldobrandini cherche à collecter neuf cœurs pour fabriquer son élixir de jouvence.
L’étudiant et la princesse
Tourné en parallèle de son superbe La Belle et la bête, Le Neuvième cœur est un autre conte étrange signé par Juraj Herz, artiste prolifique mais si peu connu chez nous. Un univers onirique et fantastique qui cherche à créer un sentiment de magie plutôt que de le recréer.
Malgré une carrière impressionnante étalée entre la République Tchèque et l’Allemagne, entre des réflexions profondes sur l’histoire de son pays, sa part d’ombre, et des divertissements bien plus féeriques et grand publique, Juraj Herz n’est pas finalement un nom des plus connus. D’ailleurs en France, rare sont ses films à avoir véritablement été distribués si on excepte le terrifiant L’Incinérateur de cadavres (évocation glaçante de la folie du nazisme), son incontournable et originale adaptation de La Belle et la bête et le présent Le Neuvième cœur. Un autre conte, mais totalement inédit celui-là, qui fut d’ailleurs tourné en parallèle de La Belle et la bête, l’un le matin l’autre l’après-midi, avec les mêmes costumes et surtout les mêmes décors afin de réduire les coups de production. Du cinéma artisanal en sommes mais dont le cinéaste se sort haut la main réussissant à donner véritablement deux identités distinctes à ses films. Le Neuvième cœur en l’occurrence serait certainement le plus léger des deux, se présentant directement comme une aventure plus enjouée, beaucoup moins inquiétante et au sous-texte quasiment absent. Certes il y est question d’une aristocratie toujours prompte à incarcérer les artistes et les braves gens, d’une princesse qui une fois sauvée se révèlera être une sacrée pimbêche, le héros préférant revenir dans les bras de la gentille marionnettiste, mais rien de plus qu’un conte à l’ancienne en définitive.
Livre en images
Là où le film surprend plus c’est dans son rythme posé, dans sa lente mise en place avant d’entrer de plein pied dans le vif du sujet. Le film suit donc Martin jeune étudiant fauché mais au grand cœur, plein de courage et d’entrain qui ne s’intéressera finalement à cette pauvre princesse hantée toutes les nuits par un vilain astrologue, qu’une fois que ses camarades du cirque seront en danger. Juraj Herz prend effectivement un grand plaisir à suivre les petites échauffourées avec la police locale aux péripéties et aux gags dignes d’un film de cape et d’épée, et surtout la description de ce petit monde d’artistes, entre magie, divination, chant, danse, jonglages et marionnettes, ces dernières venant justement raconter les origines de la terrible malédiction d’Adriana. Un art dans lequel le réalisateur a débuté sa carrière et qui, tout comme le superbe générique d’ouverture en animation, vient témoigner d’un amour pour un cinéma forain. Mais il faut reconnaitre que malgré le soin apporté à ces séquences, et la mise en place de futurs ressorts magiques (la cape d’invisibilité, la bague scie…), Le Neuvième cœur se montre beaucoup plus enthousiasmant durant sa dernière demi-heure s’engouffrant totalement dans le royaume ensorcelé tant vanté, s’ouvrant par la barque emportant la princesse vers une inquiétant demeure souterraine comme une balade sur le Styx. Désormais teinté d’accents plus gothiques, plus angoissants (mais cela reste soft), le film s’appuie sur superbe photographie et ses nombreuses qualités esthétiques pour enchainer les superbes tableaux entre un manoir macabre digne de la maison fantôme de Disneyland, un laboratoire que n’aurait pas renier la Hammer ou une salle où les heures s’écoulent comme des jours entrainant le vieillissement accéléré des protagonistes.
De belles prouesses et une atmosphère onirique très particulière qui fait un peu oublier une première heure pas désagréable mais qui manque somme toute d’un peu d’énergie.
Image
Première mondiale pour cette nouvelle copie HD que présente fièrement Artus Films. Il faut dire que la définition y est d’excellente facture et permet de dessiner avec beaucoup plus de générosité les décors intérieurs et les scènes plus réalistes en extérieurs, tout en rehaussant une colorimétrie joliment contrastée. Agréable surprise toute fois toujours marquée par de nombreux défauts de pellicules (taches, griffures, léger tremblement sur certains photogrammes) qui ont été laissés là sciemment, sans doute pour ne pas dénaturer l’objet. Peut-être aussi pour des questions de coût de restauration.
Son
Toujours sympa de retrouver pour ce type de productions familiales le doublage français d’origine. Pas toujours des plus intenses ou adéquate, mais confortable en tout cas et accessible pour les enfants. Plus nette et mieux équilibrée, la version originale tchèque en mono est bien évidemment présente.
Interactivité
Proposé sous la forme d’un fin digipack avec fourreau, Le Neuvième cœur ne propose, en dehors de l’habituelle galerie d’images et la bande annonce, aucun suppléments sur ses copies Bluray et DVD. Cette absence est cependant rattrapée par le livret conséquent, rédigé par Christian Lucas, qui a la lourde tache d’explorer un cinéma très méconnu par chez nous. Il rappelle donc l’apparition de la nouvelle Vague Tchèque dont faisait partie aussi Milos Forman, souligne déjà la place particulière de Juraj Herz, avant d’explorer thématiquement les grandes phases de sa filmographie. De ses contes assez connus à ses drames politique en passant par ses polars (dont deux épisodes de Maigret) ou ses regards historiques des plus frontaux… Avec une quarantaine de films, téléfilms ou documentaires à son actif, il y a de quoi dire et de donner inévitablement envie d’en découvrir d’autres. Un bel objet comme souvent avec Artus.
Liste des bonus
Le livre « Les 9 coeurs de Juraj Herz » par Christian Lucas (64 pages), Diaporama d’affiches et de photos, Bande-annonce originale.