LE MAÎTRE DU MONDE
Master of the World – États-Unis – 1961
Support : Blu-ray & DVD
Genre : Aventures
Réalisateur : William Witney
Acteurs : Vincent Price, Charles Bronson, Henry Hull, Mary Webster, David Frankham, Richard Harrison, …
Musique : Les Baxter
Durée : 102 minutes
Image : 1.85 16/9
Son : Français & Anglais DTS-HD Master Audio 2.0 Mono
Sous-Titres : Français
Éditeur : Sidonis Calysta
Date de sortie : 15 juin 2023
LE PITCH
Fin du XIXème siècle. Robur, un scientifique d’exception, souhaite mettre fin à la guerre à travers le monde en détruisant toutes les armées depuis sa forteresse volante, l’Albatross…
20000 lieues dans les airs
L’affiche fait rêver : Vincent Price face à Charles Bronson dans une adaptation de deux romans de Jules Verne par l’écrivain et scénariste culte Richard Matheson. Handicapé par un budget bien loin d’être à la hauteur des ambitions affichées et une mise en scène en charentaises, le résultat, malheureusement, ne répond pas aux attentes et n’offre que peu de choses à se mettre sous la dent.
Début des années 60. Alléchés par le joli succès quelques années auparavant de 20 000 lieues sous les mers de Richard Fleischer et du Tour du monde en 80 jours de Michael Anderson (sortis, respectivement, en 1954 et en 1957), James H. Nicholson et Samuel Z. Arkoff, les patrons d’American International Pictures, décident à leur tour de mettre sur les rails un grand film d’aventures tiré des écrits de Jules Verne.
Auteur du roman « Je suis une légende » et scénariste à succès de L’Homme qui rétrécit (adapté de son propre roman), d’une poignée d’épisodes mémorables de La Quatrième Dimension et de La chute de la Maison Usher, premier film du cycle Poe / Corman, Richard Matheson s’impose comme un choix évident pour la firme indépendante. Combinant Robur le conquérant et Maître du monde en une seule histoire, Matheson lorgne ouvertement du côté de 20 000 lieues sous les mers. Grand méchant à l’ego surdimensionné usant de la science pour satisfaire sa mégalomanie chez Jules Verne, Robur devient ici un ersatz du capitaine Nemo, génie affable cherchant à pacifier le monde, citant la Bible et n’usant de la force que pour se protéger ou calmer les ardeurs belliqueuses de gouvernements peu enclins à déposer les armes. Un rôle taillé sur mesure pour l’incontournable Vincent Price.
Étoile montante, Charles Bronson accepte pour sa part d’endosser le costume de John Strock, un envoyé du gouvernement américain retenu prisonnier par Robur en compagnie de Prudent, un vendeur d’armes, de la fille de ce dernier, Dorothy, et de Philip Evans, le fiancé de Dorothy. Un personnage là encore conçu pour rappeler l’iconique Ned Land incarné par Kirk Douglas dans le film de Richard Fleischer.
Derrière la caméra, le vétéran William Witney rassure Nicholson et Arkoff par sa longue expérience dans le serial des années 30 et 40 et ses innombrables westerns de série B pour Republic Pictures.
Low Cost
Technicien confirmé, capable de travailler vite et bien pour pas cher, William Witney ne cherche pas à réinventer la roue et fait de son Maître du Monde la copie conforme des épisodes de Zorro, Dick Tracy et Lone Ranger qu’il emballait à la chaîne deux décennies plus tôt, la couleur en plus. Si une poignée de mouvements de caméra timides peuvent faire illusion, la chose apparaît surtout comme incroyablement statique, étriqué et dépassé. On excusera néanmoins le cinéaste de ne pas prendre le moindre risque au regard d’un budget insuffisant. Avec un demi-million de dollars en poche (leur plus gros investissement à l’époque), A.I.P. n’a clairement pas les moyens de concurrencer Disney ou United Artists et doit se contenter de trois ou quatre plans de la maquette de l’Albatross répétés à l’infini. L’Albatross de profil, l’Albatross en contre plongée, l’Albatross de dos en légère plongée, l’ouverture des soutes à missiles de l’Albatross, une petite explosion en amorce de l’Albatross et roule ma poule ! Pour les scènes les plus spectaculaires, la production s’en est allé piocher dans les stock-shots de la concurrence, recyclant des plans du Londres élisabéthain du Henry V de Laurence Olivier, des batailles navales de Lady Hamilton d’Alexander Korda et des cavaliers africains des Quatre plumes blanches de Zoltan Korda (frère du précédent). Du bricolage qui empêche Le Maître du Monde de prendre son envol, si l’on peut dire.
Les fans de Vincent Price (mais qui n’est pas un fan de Vincent Price ?) y trouveront sans doute leur compte, le comédien éclipsant sans peine ses camarades, Bronson y compris. Par sa voix, son regard et sa gestuelle, Price parvient à rendre son personnage d’anarchiste/pacifiste/mégalomane on ne peut plus attachant, au point de nous faire écraser une larmichette lorsque, tremblant d’émotion, il remercie son fidèle équipage de rester à ses côtés jusqu’à ce que l’Albatros s’écrase en mer et sombre corps et bien. Autre motif de satisfaction, le score flamboyant de Les Baxter dont les orchestrations rutilantes permettent au film de Witney de se sentir pousser des ailes et d’oublier, au détour de quelques envolées lyriques, les maquettes mal incrustées, les décors en contre-plaqué et les accessoires en carton-pâte peints à la va-vite.
Image
C’est la belle surprise de cette édition. Les couleurs ont été restaurées avec soin et la définition, épaulée par une compression solide et un grain discret, permet de se régaler du moindre détail de cette production en Magnacolor (le cousin désargenté du Technicolor). Les arrière-plans nuageux sur lesquels sont incrustés la maquette de la forteresse volante de Robur où les scènes de stock-shots issues des chutes de films plus ancien accusent certes une grosse baisse de piqué mais c’est parfaitement compréhensible.
Son
Oubliez la version française et faîtes place au mixage d’origine nettoyé avec soin. La musique et les dialogues sont les grands gagnants du passage au DTS-HD, parfois au détriment des effets sonores qui ne se réveillent que très ponctuellement.
Interactivité
Seule valeur ajoutée en dehors de la bande-annonce, l’interview carrière de Richard Matheson (qui ne date pas d’hier mais c’est pas grave) de près d’une heure nous invite à découvrir à la première personne l’un des esprits les plus créatifs et marquants de tout un pan de la télévision, du cinéma et de la littérature fantastique américaine.
Liste des bonus
Interview de Richard Matheson (51 minutes), Bande-annonce.