LE DERNIER MÉTRO
France – 1980
Support : Bluray, DVD & Livre
Genre : Comédie dramatique
Réalisateur : François Truffaut
Acteurs : Catherine Deneuve, Gérard Depardieu, Jean Poiret, Andréa Ferréol, Jean-Louis Richard, Paulette Dubost, Heinz Bennent…
Musique : George Delerue
Durée : 132 minutes
Image : 1.66 16/9
Son : Français DTS HD Master Audio 1.0
Sous-titres : Aucun
Editeur : Carlotta Films
Date de sortie : 02 juin 2021
LE PITCH
Sous l’Occupation de Paris, Marion Steiner reprend la direction du Théâtre Montmartre que son mari juif allemand Lucas a abandonné. Leur ami Jean-Loup Cottins doit assurer la mise en scène de la nouvelle pièce et le comédien Bernard Granger, amoureux de Marion, en tient le premier rôle. Caché dans la cave, Lucas surveille la mise en scène…
Ultime représentation
Grandes retrouvailles de François Truffaut avec la reconnaissance après les échecs de La Chambre verte et L’Amour en fuite, Le Dernier métro est surtout son plus grand succès populaire, et son triomphe le plus éclatant : dix césars dont meilleur film et meilleur réalisateur. Une histoire d’amour, une histoire de théâtre, une histoire de guerre… Surtout une histoire de François Truffaut.
En guise de note d’intention précise et, sans doute décontenançante pour certains, François Truffaut avec affiché en préambule du scénario du film « Le Dernier métro ne sera ni un film sur le théâtre, ni un film sur l’occupation mais une histoire d’amour et d’aventures ». Intention réelle du cinéaste ou petite coquetterie ironique, la citation définie parfaitement le métrage final parce qu’il est tout ça, plus, et son contraire. Conjugaison de deux envies profondes qu’il cherchait à concrétiser, Le Dernier métro est donc bel et bien à la fois un film sur le monde du théâtre et un film sur la France durant l’occupation. A la manière de La Nuit américaine, son chef d’œuvre méta, on y suit donc la vie d’un grand théâtre parisien préparant une nouvelle pièce de théâtre. L’arrivé d’un nouveau jeune acteur prometteur, la construction de la mise en scène, les costumes, les décors, le fonctionnement de troupe, la débrouillardise du sympathique régisseur… et bien entendu leurs frictions, leurs rencontres, leurs amitiés, et pourquoi pas un triangle amoureux, étouffé et suggéré le plus souvent, comme un écho à celui de Jules et Jim. Mais si cette chronique faite autant d’instantanés presque volés et de scénettes à la précision rigoureuse frappe et fascine autant, c’est par son contexte historique intensément dramatique.
Lumières sur le couvre-feu
Celui de la France sous surveillance allemande, où l’excitation de la création théâtrale devient nécessitée et ce malgré des difficultés décuplées. Le couperet de la critique s’adjoint celui de la censure et de la propagande, le marché noir s’invite entre deux répétitions, Lucas Steiner, dramaturge et propriétaire de la salle est obligé de se terrer dans la cave à cause de ses origines juives… Truffaut ne prétend pas ici à exhaustivité, au film dossier, mais plutôt à une illustration profondément cinématographique, à la fois romancée et sans détour, qui donne alors corps à une fresque aussi simple qu’évocatrice. Les petites histoires au cœur de la grande, la romance les plus complexe étouffée par sa concrétisation sur scène, et cette manière d’offrir une véritable existence à chacun, Deneuve, Depardieu, Carmet, Bennent, ou autres, en observant leurs rapports au métier tout autant que leurs rapports personnels à la situation extraordinaire et effrayante dans laquelle était plongée le pays. Un tableau humain, minutieux et particulièrement subtile dans sa construction ou son image, où finalement Truffaut va une nouvelle fois piocher dans ses souvenirs les plus personnels. Si effectivement nombres d’anecdotes décrites à l’écran proviennent de témoignages de grands noms du théâtre (dont le fameux coup de poing de Jean Marais asséné à un critique), beaucoup proviennent justement de son enfance à lui, gamin d’à peine 10 ans dans une France en guerre et qui découvrait alors ses premiers amours cinématographiques, ses premières évasions. Encore un de ces superbes « films de ma vie ».
Image
On écarte gentiment l’ancien transfert Bluray MK2 et on se réjouie de pouvoir redécouvrir Le Dernier métro avec une toute nouvelle copie assez exceptionnelle. Un travail de restauration effectué en 2K à partir d’un scan du négatif original en 4K. Une petite valse des formats qui ne change rien au résultat en Bluray. Les cadres sont d’une propreté et d’une stabilité inédite, mais sans jamais dénaturer la nature profondément filmique de l’objet. Le grain de pellicule vient se marier élégamment avec la définition la plus pointilleuse, tandis que les clairs obscurs de Néstor Almendros (Les Moissons du ciel, Kramer contre Kramer) exposent enfin toutes leurs finesses.
Son
Sobre et direct le mono d’origine n’a aucunement été dénaturé par quelques retouches modernistes. La source est donc frontale, mais toujours claire et équilibrée grâce à un nettoyage minutieux et un DTS HD Master Audio limpide.
Interactivité
19ème volume de la collection Ultra Collector de Carlotta, toujours limitée à 3000 exemplaires, Le Dernier métro est peut-être aussi l’un des plus chargé de la gamme. La preuve avec les bonus vidéo disposés sur la galette Bluray que l’éditeur est allé rechercher dans les éditions Bluray et DVD précédentes, comme le commentaire audio entre historiens du cinéma et Gérard Depardieu, la présentation du film par Serge Toubiana ou le long entretien radiophonique de François Truffaut, accompagné d’images du film pour l’occasion. A cela s’ajoute des extraits de rendez-vous télévisuels enregistrés lors de la promo du film (dont une interview assez hallucinante de Christine Deneuve par une « journaliste » anté-féministe) et une discussion plutôt sur le versant historique entre le cinéaste et Anne Sinclair. Un époque mine de rien où l’on prenait le temps de s’entretenir au-delà de la simple promo, et d’aborder de véritables notions esthétiques et thématiques profonde. Vaste programme auquel s’ajoute aussi un documentaire rétrospectif assez conséquent, Le Plaisir du partage : souvenirs personnels du Dernier métro, qui donne la parole à quelques membres de l’équipe technique et du casting, afin de livrer un angle cette fois-ci plus intime, subjectif et donc forcément chaleureux et un peu nostalgique. Enfin, en guise de petite conclusion inattendue le court métrage La Petite Graine donne corps à une véritable lettre envoyé par Truffaut à la naissance de Sarah, fille de Tessa Racine, assistante caméra sur Le Dernier métro et Vivement dimanche !, et se transforme, non sans maladresse, en une déclaration d’amour à son cinéma.
Et si la partie vidéo se consacre en très grande partie à la sortie du film, le livre de 200 pages présent dans le fourreau, tente pour sa part de dégotter quelques informations et documents sur sa fabrication. Dirigé par Jérôme Wybon, l’ouvrage contient alors autant d’éléments précieux pour les archivistes comme ces très rares photos de tournage (Truffaut avait interdit l’accès aux journalistes), les différents traitements du sujet, des lettres envoyées ou reçues par le réalisateur, et un long entretien inédit mêlant sa jeunesse et ses souvenirs de cinéma qui aurait dû être la première marche vers une biographie complète pour Claude de Givray, coscénariste de Baisers volés et Domicile Conjugal.
Liste des bonus
Le livre inédit « Dans les coulisses du Dernier métro » dirigé par Jérôme Wybon avec textes inédits et archives exclusives (200 pages), Commentaire audio de Jean-Pierre Azéma avec Serge Toubiana et Gérard Depardieu, Présentation du film par Serge Toubiana, Scène coupée (5’), Bande-annonce originale, « Les Nouveaux Rendez-vous » avec François Truffaut, Gérard Depardieu et Catherine Deneuve (INA, 1980, 11’), « Ciné-regards : le film de la semaine » avec Néstor Almendros, directeur de la photographie (INA, 1980, 2’), « Le Cinéma des cinéastes : François Truffaut parle du Dernier Métro » : Truffaut au micro de Claude-Jean Philippe (INA, 23/09/1980, 46’), « L’Invité du jeudi : François Truffaut » d’Anne Sinclair avec François Truffaut, Henri Amouroux et Jean-Pierre Faye (56’), « Le Plaisir du partage : souvenirs personnels du Dernier métro » : documentaire de Robert Fischer, avec Paulette Dubost, Andréa Ferréol, Sabine Haudepin, Alain Tasma, Florent Bazin et Tessa Racine (67’), Court métrage : « La Petite Graine » de Tessa Racine (1998, 19’).