L’APPEL DE LA CHAIR & LA DAME ROUGE TUA SEPT FOIS
La notte che Evelyn uscì dalla tomba, La dama rossa uccide sette volte – Italie – 1971, 1972
Support : Bluray & DVD
Genre : Thriller, Horreur
Réalisateur : Emilio Miragua
Acteurs : Anthony Steffen, Enzo Tarascio, Giacomo Rossi Stuart, Marino Masé, Barbara Bouchet, Ugo Pagliai, Marina Malfatti, Erika Blanc…
Musique : Bruno Nicolai
Durée : 102 et 99 minutes
Image : 2.35 16/9
Son : Français et italien PCM 2.0
Sous-titres : Français
Editeur : Artus Films
Date de sortie : 07 septembre 2021
LE PITCH
Depuis la mort de son épouse Evelyn, Alan Cunningham, un lord anglais, voit sa santé mentale s’effondrer. Il passe son temps à se livrer à des jeux sadomasochistes avec des prostituées dans son château en ruines. Un jour, il rencontre la belle Gladys, sosie parfait d’Evelyn. Il la demande en mariage et la fait venir vivre au château. Peu à peu, il devient alors victime d’hallucinations, hanté par le fantôme de se première femme.
Au cours d’une dispute dans le jardin du château familial, Kathy Wildenbrück tue sa sœur Evelyn. Peu après, un étrange personnage vêtu de rouge assassine des proches de Kathy. Des témoins affirment avoir reconnu Evelyne qui est pourtant morte. Ceci serait la continuation de la malédiction qui touche la dynastie des Wildenbrück : tous les cent ans, la « Dame rouge » posséderait le corps d’un membre de la famille, l’obligeant ainsi à tuer sept personnes.
A Dame to kill for
En Italie comme ailleurs, certains réalisateurs ont besoin de conditions particulières, de genres définis pour véritablement s’épanouir. Ce fut brillamment le cas pour le méconnu Emilio Miragua qui livra avec ses deux seuls giallos deux petits classiques du genre, marchant brillamment dans les pas de Dario Argento, tout en présageant ses évolutions à venir.
Longtemps assistant réalisateur sur une petite pelletée, entre autres, de péplums (Hercule contre les fils du soleil), Emilio Miragua passa finalement à la réalisation avec trois petits délires d’espionnages / casses (La Peur aux tripes, Ce salaud d’inspecteur Sterling, L’Affaire Vatican) suivis d’un western plutôt anonyme résonnant au doux nom de Tire Joe et … amen ! Tous furent signés sous le pseudonyme américanisant d’Hal Brady et ne laissèrent que peu de souvenirs dans la mémoire des spectateurs. Disparu des radars aujourd’hui, Emilio Miragua aurait pu définitivement s’évanouir en note de fin de page sur un guide des petits artisans du cinéma italien, s’il n’avait pas signé coup sur coup les deux giallos en question ici, justement signés là de son véritable patronyme. Des productions naturellement opportunistes comme tous les films associés à ce genre, sorties dans la foulée de L’Oiseau au plumage de cristal de Dario Argento, mais où pointent à la fois une vraie maîtrise technique et une personnalité très particulière.
La tombe de l’être aimé
Visuellement déjà donc, L’Appel de la chair et La Dame Rouge tua sept fois, dont les sorties sont séparées de quelques mois seulement, se hissent au-dessus de la pléthore de gialli bazardés par des producteurs et réalisateurs peu soigneux, travaillant des scopes particulièrement léchés, jouant de compositions sobres mais toujours admirables, où viennent percer des recherches photographiques (séquences nocturnes, éclairages aux filtres primaires citant Argento ou Bava). Une belle facture mettant forcément en valeur les généreux castings de superbes actrices à l’érotisme plus ou moins divulgués, mais aussi des environnements tour à tour urbains, modernes, ou beaucoup plus baroques. Si les deux films se déroulent dans un contexte contemporain, l’un au sein d’un domaine aristocrate anglais, l’autre dans les coulisses d’une grande marque de prêt à porter allemande (autre signe de l’hommage au fondateur Six femmes pour l’assassin), ils sont constamment attirés vers des atmosphères beaucoup plus traditionnelles, fantastiques, ultimes traces de l’âge d’or du gothique à l’italienne. L’Appel de la chair voit ainsi Anthony Steffen (Viva Django !) inviter ses conquêtes dans le donjon de sa demeure, meublée comme une salle des tortures médiévales tandis que la voix de sa défunte épouse le pousse au crime, alors que La Dame Rouge tua sept fois invoque une ancienne malédiction familiale, un caveau secret et les apparitions du fantôme d’une sœur meurtrière revêtue d’une cape rouge.
En jaune et rouge
L’ombre d’Edgar Alan Poe, et par ricochet des adaptations cinématographiques signées Roger Corman, planent lourdement provoquant des mélanges étonnants, mais toujours harmonieux et efficients, faisant glisser ces gialli aux frontières d’un fantastique qui vient souligner non pas un surnaturel crédible, mais un onirisme révélateur des troubles psychologiques de ses deux figures centrales, Alan Cunningham dans l’un, Kathy Wildenbrück (Barbara Bouchet), tous deux hantées à la fois par un trauma personnel et par une mécanique de complot aussi sadique que parfaitement huilée. On leur veut du mal assurément, pour des questions d’héritage naturellement, et les seconds rôles passent allègrement de suspects envisageables à victimes malheureusement, dans des scénarios certes aussi alambiqués que de vrais giallos de machination. Des fausses pistes à foison, des suspects idéals aux troubles secrets et des révélations finales à tiroir, structurent les whodunnit d’arrière-plan, classiques certes, mais construits avec un réel sérieux et une machinerie assez bien huilée et prenante.
Deux belles réussites du giallo de ce début des années 70 et l’affleurement remarquable d’un cinéaste au fort potentiel, mais qui n’auront malheureusement jamais de suite directe, Miraglia s’étant par la suite évanoui dans la nature. A tel point que personne ne sache aujourd’hui s’il est encore de ce monde.
Image
Voici deux superbes copies dégottées par Artus Films. Traitées avec énormément de déférence les masters HD sont issus manifestement de restaurations à la source délivrant donc des cadres extrêmement propres et stables, et un piqué aussi pointilleux que cinématographique. Les matières sont bien là avec un grain de pellicule délicatement présent et des reflets argentiques très agréables en sus. La Dame Rouge tua sept fois se hisse tout de même légèrement au-dessus du premier film avec une palette de couleurs plus riche encore et une définition à la profondeur accrue. Du bel ouvrage dans les deux cas.
Son
Disponibles à chaque fois avec leur piste française d’époque, les deux métrages sont marqués par des doublages pas forcément à la hauteur avec en outre des mixages étouffés et quelques chuintements un peu vieillots. Les versions originales s’en sortent largement mieux avec des pistes nettoyées et aérées pour un rendu très propre et bien posé, sans perdition notable.
Interactivité
Proposés dans de très joli digipack cartonnés avec fourreau, L’Appel de la chair & La Dame Rouge tua sept fois sont accompagnés à chaque fois d’une présentation par le journaliste Emmanuel Le Gagne. Un petit rappel des faits, des codes du giallos, un petit détour par la filmographie (succincte) du réalisateur et les hauts faits des têtes d’affiche… L’exercice est classique mais efficacement mené. Petit guest en prime pour le second film avec un entretien avec la réalisatrice Lucile Hadzihalilovic (Innocence, Evolution…) marquée à treize ans par la double découverte de L’Oiseau au plumage de cristal et de La Dame Rouge tua sept fois.
Liste des bonus
L’Appel de la chair : Présentation du film par Emmanuel le Gagne, Diaporama d’affiches et de photos, Film-annonce original
La Dame Rouge tua sept fois : Présentation du film par Emmanuel le Gagne, Entretien avec Lucile Hadzihalilovic, Diaporama d’affiches et de photos, Film-annonce original