LA VENUS EN FOURRURE

Le Malizie di Venere – Italie, Suisse, Allemagne – 1969
Support : Bluray & DVD
Genre : Drame, Erotique
Réalisateur : Massimo Dallamano
Acteurs : Laura Antonelli, Régis Vallée, Loren Ewing, Renate Kashé, Werner Pochath, Mady Rahl…
Musique : Gianfranco Reverberi
Image : 1.85 16/9
Son : Italien et Français LPCM 2.0 mono
Sous-titres : Français
Durée : 87 minutes
Éditeur : Artus Films
Date de sortie : 4 mars 2025
LE PITCH
Séverin, réside dans un hôtel au bord d’un lac pour travailler sur son prochain livre. Arrive alors Wanda, un mannequin au pouvoir de séduction hypnotique. Séverin va d’abord espionner discrètement Wanda, qui aime se promener nue dans son manteau en fourrure. Elle lui rappelle ses premiers émois érotiques de son enfance. Puis il va l’entraîner dans une relation sadomasochiste sulfureuse.
« Moi j’aime l’amour qui fait boum! »
Film érotique méconnu d’un cinéaste italien au final plutôt rare, le Massimo Dallamano de Le Dépravé et Mais… qu’avez-vous fait à Solange ?, La Venus en fourrure ne fut longtemps visible que dans un montage bidouillé et policé. Retour en copie restaurée et réhabilitée pour une évocation presque joyeuse de l’amour qui fait mal.
Roman très personnel et surtout presque philosophique signé Leopold von Sacher-Masosh, La Vénus à la fourrure est devenu avec le temps un véritable manifeste de la culture S&M. D’ailleurs, le terme masochiste vient directement du nom de cet auteur. Une exploration dans l’Allemagne de la fin du 19eme siècle d’une relation tumultueuse et intellectualisée entre un homme appréciant les femmes très dominatrices et les pratiques douloureuse et humiliantes, et une femme, hautement désirable qui se pliera à ses fantasmes mais finira forcément par pousser le jeu un peu trop loin. Sulfureux pour le moins, et forcément intriguant pour le petit monde du cinéma qui le réadaptera à plusieurs occasions, la dernière étant bien entendu la version de Roman Polanski avec Emmanuelle Seigner et Mathieu Amalric. Mais grande époque de libération des mœurs et explosion de l’érotisme à l’écran oblige, ce sont les années 60 qui en seront les plus friandes avec une exploration américaine méconnue en 1967, le délire de l’indécrottable Jess Franco Paroxismus et enfin l’objet en présence ici, sans doute la plus fidèle, produit lui aussi pour les écrans en 1969… fameuse année chantée par Gainsbourg et Birkin. Malheureusement, victime d’une lourde censure, le film sera interdit de distribution durant six ans pour ne finalement sortir qu’en 1975 dans une version édulcorée et remontée, afin de profiter de la notoriété nouvelle de la sublime et désirable Laura Antonelli suite au grand succès de Malicia.
Contrat amoureux
A nouveau visible dans son intégralité, La Venus en fourrure peut aujourd’hui sembler presque prude dans son exploration de la nudité et sa représentation frontale de la sexualité. Certes les actrices sont souvent nues à l’écran, mais le film travaille bien plus une esthétique érotique et une certaine sensualité qu’un bête film d’exploitation polisson. Ce qui a certainement le plus bousculé les comités de censure à l’époque, c’est certainement cette relation perverse, mais partagée, entre les deux protagonistes, lui (joué par le malheureusement très fade Régis Vallée), passant son temps à la pousser dans les bras d’autres hommes, lui réclamant des coups de fouets, des privations, avec une montée crescendo dans la brutalité et la dureté dont l’écho prendra à l’écran l’image d’une extase libératrice. D’ailleurs si le roman original s’achevait par une certaine forme de jugement sociétal et de retour à la normale normalisatrice, cette Venus en fourrure préfère, après un long chemin de croix où le spectateur ne sait plus ce qui est jeu ou souffrance, opter pour une pirouette joyeuse, un éclat de rire commun, célébrant jusqu’au bout leur jeu sexuel et la force de leur couple hors normes. Étonnant, même si effectivement Massimo Dallamano, célébré en particulier pour ses deux excellents giallo Mais qu’avez-vous fait à Solange ? et La Lame infernale, a toujours été un cinéaste de l’ambiguïté, s’intéressant aux perversités de l’Italie contemporaine,en particulier de celle de la bourgeoisie italienne, mais n’optant jamais pour une simple accusation de celles-ci. Ici sa caméra se fait constamment voyeuriste, quêtant les détails sensuels, les apparitions de chairs et les ébats cachés en pleine nature ou derrière les rideaux d’une chambre interdite, plus témoin que jugeant. Si le film ne cache pas les dérives possibles d’un sadomasochisme poussé à l’extrême, il en célèbre tout autant le romantisme échevelé et le don total de soi. Troublant.
Doté d’une très belle réalisation, soignée et presque feutrée, d’une magnifique photographie renvoyant à une esthétique délicieusement romantique et d’une musique chaloupée et yéyé à souhait, La Venus en fourrure traverse plutôt bien les années il faut l’avouer.
Image
Cette tout nouvelle remasterisation en est certainement repassée par les négatifs ou format avoisinant, afin d’obtenir un rendu 2K aussi élégant que savoureux. A de très rares exceptions près, les cadres sont parfaitement propres, délicats, solidement définis et profitent allègrement d’une colorimétrie particulièrement riche et généreuse renouant avec les teintes pastel et pops de la fin des 60’s. Le grain est présent et harmonieux, les reflets argentiques ravissants, et le film peut enfin faire resplendir les particularités de sa superbe photographie.
Son
Version originale italienne et version doublée française nous parviennent dans des pistes monos plutôt sobres et très frontales. Elles ne souffrent cependant pas trop des affres du temps avec des restitutions claires et équilibrées où les petits effets de souffle restent très rares.
Interactivité
Proposé sous la forme d’un digipack avec fourreau cartonné, l’édition Artus contient le disque Bluray et le DVD du film. Sur les deux, on retrouve les mêmes suppléments avec une longue conversation entre les critiques Emmanuel Le Gagne et Sébastien Gayraud, qui reviennent sur le roman de Leopold von Sacher-Masosh et ses particularités, ses multiples adaptations à l’écran ou autres, puis enfin le film en question en mettant l’accent sur le regard particulier, et mystérieux pour eux, du metteur en scène.
Suivent les interviews de Sergio d’Offizi, le directeur photo, et d’Alida Cappellini, directrice artistique, qui évoquent leurs apports sur le film, leurs souvenirs du tournage ou leur relation avec le cinéaste et les acteurs. D’ailleurs s’ils sont plutôt d’accord quand au distant et froid Régis Vallée, elle remet les pendules à l’heure concernant Laura Antonelli, finalement pas si à l’aise que cela avec son premier grand rôle à l’écran et surtout avec les nombreuses scènes de nudité.
Liste des bonus
Présentation du film par Emmanuel Le Gagne et Sébastien Gayraud (42’), « Vénus dévoilée » : Entretien avec Sergio d’Offizi (9’), « Vénus callipyge » Entretien avec Alida Cappellini (17’), Diaporama d’affiches et photos (2’), Bande-annonce originale (3’).