LA TULIPE NOIRE

France, Italie, Espagne – 1964
Support : UHD 4K & Bluray
Genre : Aventure
Réalisateur : Christian-Jacque
Acteurs : Alain Delon, Virna Lisi, Francis Blanche, Adolfo Marsillach, Dawn Addams, Akim Tamiroff…
Musique : Gérard Calvi
Image : 2.20 16/9
Son : Français DTS HD Master Audio 5.0 et 2.0
Sous-titres : Français pour sourds et malentendants
Durée : 115 minutes
Éditeur : L’Atelier d’images
Date de sortie : 13 mars 2025
LE PITCH
Juin 1789, quelques jours avant la prise de la Bastille, les nobles sont attaqués par un mystérieux cavalier qui signe ses exploits en laissant derrière lui une tulipe noire. Ce justicier masqué n’est autre que Julien de Saint Preux, jeune, ardent et passionné qui sacrifierait sa vie pour que triomphent ses idées de liberté…
La fleur à la pointe de l’épée
En pleine ascension après la révélation de Plein Soleil, et la reconnaissance due à Mélodie en sous-sol et Le Guépard, Alain Delon s’offre une belle récréation avec La Tulipe noire, film de cape et d’épée bondissant et plein d’humour. Un pur film populaire orchestré par l’auteur du mythique Fanfan la tulipe : Christian-Jacques.
Une dizaine d’année après l’énorme succès de son Fanfan plein d’esprit et d’irrévérence, le réalisateur de Les Disparus de Saint Agil et L’Assassinat du Père Noël, aimerait effectivement pouvoir renouer avec cet enthousiasme du public et le grand spectacle bondissant à la française. Motivé par la proximité du titre, La Tulipe noire, ce dernier découvre cependant que le roman d’Alexandre Dumas qu’il souhaitait adapter sur grand écran n’a absolument rien des Trois Mousquetaires et se révèle même un ouvrage plutôt politique et bavard. Qu’à cela ne tienne, il imagine avec le coscénariste et dialoguiste Henri Jeanson (Nana, La Vache et le prisonnier…) l’histoire rocambolesque d’un justicier masqué opérant en France à la veille de la Révolution française. Un Zorro bien de chez nous qui pourfend les aristocrates, les détrousse et profite dès lors du soutien de la populace. Noble libertin le jour et brigand la nuit, Guillaume de Saint Preux est obligé de faire appel à son jeune frère, qui lui ressemble comme deux gouttes d’eau, pour le remplacer le temps qu’une méchante cicatrice à la joue qui le ferait reconnaitre, ne cicatrise. Mais Jean, plus idéaliste, est un voltairien convaincu et va transformer La Tulipe noire en symbole de la rébellion.
« La Tulipe noire, c’est la tomate rouge ! »
Vaste programme pour cette luxueuse coproduction européenne qui délivre toutes les cavalcades, duels à l’épée, traquenards nocturnes et plans tarabiscotées pour mener en bateaux quelques nobles provinciaux aussi pédants que dépassés, attendus par le public familial. Les cascades sont nombreuses, les combats enlevés, les décors classieux et superbement colorés par un généreux Superpanorama 70 (formats quasi hollywoodien), la mise en scène soignée de Christian-Jacques est plutôt bien rythmée, mais il faut reconnaitre que l’on se fiche assez rapidement du contexte historique. Instaurée par une introduction volontairement scolaire mais déjà dotée d’une certaine ironie, la Révolution française n’est qu’un contexte parmi d’autre dont la gravité est rapidement balayée sous le tapis. Quitte effectivement à amoindrir les tensions et à gâcher quelques scènes plus dramatiques (la double pendaison finale dont tout le monde semble se moquer comme d’une guigne), éclipsées par la bonne humeur générale. Il faut dire que les dialogues toujours fleuris mais bourrés d’esprit, de sous-entendus et de fantaisies, ont vite tendance à tout emporter sur leur passage… surtout lorsqu’ils sont repris par un fabuleux Francis Blanche, absolument irrésistible en papa protecteur et casseur d’aristo au tempérament explosif.
Ce n’est pas un grand film non, mais cela reste un petit régal où éclatent tous les charmes de la sublime, et espiègle, Virna Lisi (Les Bonnes causes, Romulus et Remus) et où effectivement notre Alain Delon national semble s’amuser à chaque plan. S’il n’a pas forcément le panache et l’aisance d’un Gérard Phillipe ou d’un Belmondo dans Cartouche, il impose définitivement sa beauté animale, mais cette fois-ci couplée avec une décontraction plus juvénile. Adepte des doubles rôles et des personnages à multiples visages (de Plein Soleil à Mr Klein), Delon joue solidement le Delon narcissique et autoritaire habituel sous le nom de Guillaume, mais laisse affleurer un versant plus fragile et comique sous les traits de Julien, véritable héros du film. D’ailleurs les quelques rencontres à l’écran des deux frères sont admirablement orchestrées et truquées, petit plaisir supplémentaire à ce divertissement décidément presque exaltant.
Le public ne s’y trompera pas et lui réservera un bel accueil en salles (en particulier en Italie) et prendra plaisir durant de nombreuses années à le retrouver à chaque rediffusion télévisée. La belle époque d’un certain cinéma français diront certains.
Image
L’Atelier d’images propose ici la même copie richement restaurée proposée par TF1 Vidéo en 2018 mais avec cette fois-ci l’apport non négligeable d’un disque UHD permettant d’apprécier dans son entièreté le travail effectué, sans compter sur l’apport très apprécié du Dolby Vision pour des teintes plus puissantes encore. Effectuée à partir des négatifs 65 mm à 5 perforations, la restauration avait demander de très longues heures de travail avec un nettoyage chimique à la source, suivi de ciblages numériques, pour redonner toute sa propreté et sa stabilité à l’ensemble. Même si quelques petites traces de l’âge persistent, on n’est pas loin de la seconde jeunesse ici avec une définition puissante, un grain délicat, organique et discret et des couleurs parfaitement pétantes. Un peu trop même parfois serions-nous tentés de dire, puisque quelques séquences extérieures semblent baignées dans un environnement doré un peu trop prononcé, avec comme conséquences des aplats blancs qui vrillent vers le brulé. Reste que bien entendu le film n’a jamais été aussi fringuant et que les contrastes et la profondeur accrue de la 4K font clairement leur effet.
Son
Fait rarissime pour une production européenne, La Tulipe noire fut mixé initialement en mode 6 pistes selon le procédé Western Electric Sound System, offrant ce qui se faisait alors de mieux en dimension sonore. Malheureusement certains segments de la source magnétique ont été perdus et les techniciens ont dû composer avec les éléments restants et reconstituer le reste. Le résultat est une piste Dolby Digital 5. 0 extrêmement confortable et équilibrée. Les dialogues y résonnent avec énergie et naturel (même si les acteurs non français ont bien entendu été doublés), mais c’est véritablement la superbe bande originale imaginée par Gérard Calvi (Astérix et Cléopâtre) qui retrouve tout son coffre et son amplitude. Il est aussi possible de visionner le film avec un plus sobre mais tout aussi précis DTS HD Master Audio 2.0.
Interactivité
L’Atelier d’images reprend donc le flambeau de TF1 Vidéo pour son édition « prestige » qui propose sur le disque UHD et le Bluray les mêmes suppléments déjà croisés alors : la petite featurette un peu académique sur le travail de restauration, le très amusant documentaire de 2004 où Michel Wyn (assistant réalisateur) et Claude Carliez (cascadeurs) nous font revivre les coulisses trépidantes et bien remuantes d’un tournage hors normes en Espagne (ou pourquoi et comment Alain Delon et Francis Blanche ont fini en prison), et enfin la discussion croisée de Denise Morlot (scripte) et Olivier Rajchman (historien du cinéma) qui reviennent plus sobrement sur la fabrication du film, ses origines et ses particularités.
Un petit ajout tout de même pour cette sortie UHD avec une présentation inédite signée Philippe Lombard (14’) qui finalement résume plutôt bien les informations déjà délivrées dans les autres segments.
Liste des bonus
Présentation du film par Philippe Lombard, « Autour du film » : Documentaire avec les interventions de Michel Wyn, assistant réalisateur 2ème équipe et Claude Carliez, Maître d’armes et responsable des cascades (30’), « L’Histoire de la tulipe » : Le film raconté par Denise Morlot, scripte du film et Olivier Rajchman, historien du cinéma (18’), La restauration du film (4’).