LA MORT A SOURI AVEC L’ASSASSIN
La morte ha sorriso all’assassino – Italie – 1973
Genre : Horreur
Réalisateur : Joe d’Amato
Acteurs : Ewa Aulin, Klaus Kinski, Giacomo Rossi Stuart, Angela Bo, Sergio Doria
Musique : Berto Pisano
Durée : 84 minutes
Image : 2.35
Son : Italien DTS HD Master Audio 2.0
Sous-titres : Français
Editeur : Le Chat qui fume
Date de sortie : 31 août 2022
LE PITCH
1909, en Europe – Greta von Holstein, qui entretient une liaison incestueuse avec Franz, son frère bossu, perd la mémoire à la suite d’un accident de calèche survenu devant la demeure des von Ravensbrück. Appelé au chevet de la malade, le Dr Sturges semble surtout s’intéresser à l’étrange médaillon inca qu’elle porte autour du cou et qui pourrait l’aider dans ses recherches sur la résurrection. Restée auprès de Walter et Eva von Ravensbrück qui se sont entichés d’elle, la belle Greta semble en proie à une ombre. La maisonnée est bientôt la cible d’une vague de crimes particulièrement violents…
Et mourir de désir
Première réalisation officielle d’un Joe d’Amato rapidement surtout connu pour ses excès, son bon goût et un glissement progressif vers l’exploitation Z puis le porno, La Mort a souri à l’assassin nécessitait bel et bien une redécouverte HD. Un conte gothique, surprenant, fascinant et… agréablement abstrait.
Tel un conte macabre, La Mort a souri à l’assassin s’ouvre sur le visage d’une belle endormie, Greta von Holstein (mignonne Ewa Aulin alors starifié par le très 60’s Candy), belle au bois dormant dont la mort provoque le désespoir de son frère, décidant de s’en prendre à ses bourreaux. Décors gothiques, référence à Edgar Alan Poe (il y en aura beaucoup d’autres), première allusion à une relation incestueuse où la demoiselle serait à la fois victime et séductrice des plus consentante, voilà la porte d’entrée dans un film qui va se construire ensuite à rebours, entremêlant les flashbacks et les temporalités dans un entre-deux des plus déstabilisants. Avec une photographie chaude et lugubre, des compositions sensuelles et inquiétantes signées Berto Pisano (Kill, Nue pour l’assassin) et des acteurs qui traversent les cadres comme des fantômes hébétés et le plus souvent silencieux, Joe D’Amato compose un étrange tableaux où peuvent se projeter quelques caresses saphiques après une tentative de noyade durant le bain, des expériences contre-nature perpétrées par un Klaus Kinski parfait en Frankenstein nouveau et même un tueur masqué et ganté échappé d’un giallo.
Corps encore chauds
On reconnait constamment les futurs traits caractéristiques du cinéaste qui tend déjà vers une certaine forme de flottement, qui se complait dans un amalgame de genres et de codes aux airs de patchwork, mais ce dernier ne semble pas encore totalement happé par sa complaisance commerciale et son sens inimitable du caviardage et du remplissage. Ainsi malgré l’omniprésence de pulsions sexuelles qui relient tous les personnages aux corps et aux yeux de biche d’une créature amnésique qui ne cesse de revenir d’entre les morts, les scènes érotiques ne sont que suavement suggérées, et les quelques détails gores qui viennent marquer les cadavres attendus (tripes à l’air, visage explosé par un coup de fusil ou défiguré par les griffes d’un chat) jaillissent littéralement à l’écran pour assurer leur effet. Alors qu’il n’était jusque-là connu que pour ses talents de chef opérateur et qu’il avait plus ou moins achevé les westerns d’autres collègues (Planques toi minable, Trinita arrive…, Le colt était son dieu, Un Bounty Killer à Trinita), D’Amato impressionne par sa gestion admirable d’un cauchemar onirique, d’un film d’horreur fantasmé, où le réel et le rêve ne cessent de s’interchanger, de se mêler d’une bobine à l’autre. Contemplatif certes, vaporeux certainement, mais jamais ennuyeux, jamais lassant car constamment cadré avec soin, relancé par des séquences délirantes et déroutantes (la fuite éperdue de la domestique), par des meurtres aussi scabreux que ces reflux constants de perversité et de nécrophilie qui imprègnent une atmosphère surnaturelle déliquescente. Avec un style déjà bien affirmé mais une pondération qu’on ne lui imaginait pas, Joe D’Amato signe là l’un de ses meilleurs films et certainement le plus élégant.
Image
Nouvelle remasterisation 2K à partir d’un scan du négatif 35mm pour La Mort a souri à l’assassin qui permet de redécouvrir le film dans des conditions admirables. L’image a été nettoyée avec soin, les couleurs légèrement raffermies (mais un peu changeantes), les contours stabilisés… Voila qui redonne une vraie patine au métrage dont tout de même on notera un grain qui hésite parfois entre le rendu organique de la pellicule et un petit bruit plus neigeux et moins percutant. Pas vraiment gênant cela dit.
Son
Seule la version originale italienne mono a survécu (pas de vf donc), mais délivrée dans un DTS HD Master Audio 2.0 du plus bel effet. Si quelques légères saturations se font parfois entendre, les dialogues sont bien clairs et équilibrés, et surtout les atmosphères musicales inquiétantes de Berto Pisano.
Interactivité
Edition limitée à 1000 exemplaire, superbe fourreau cartonné avec digipack trois volet bien classieux… Pas de raison que Le Chat qui fume ne change sa formule gagnante. Ni qu’il arrête d’aller dégoter des interviews inédites avec les témoins d’un cinéma populaire italien disparu. Ici c’est le caméraman et assistant Gianlorenzo Battaglia qui vient partager les souvenirs de ses débuts avec Mario Bava et sa longue collaboration avec Joe D’Amato et entre autres La Mort souri à l’assassin. Quelques souvenirs de tournage, une admiration évidente pour l’artisan, quelques regrets aussi quant à la dernière partie de carrière du bonhomme. C’est ensuite l’actrice Ewa Aulin qui prend la main pour délivrer ses quelques anecdotes encore en mémoire où là aussi pointe un vrai respect pour les choix esthétiques et la méthode de Joe D’Amato.
Liste des bonus
Le talentueux Mr D’Amato avec l’assistant réalisateur Gianlorenzo Battaglia (19 min), Ewa a souri à l’assassin avec l’actrice Ewa Aulin (10 min), Film annonce.