LA LÉGENDE DU SAINT BUVEUR
La Leggenda del santo bevitore – Italie, France – 1988
Support : Bluray
Genre : Drame
Réalisateur : Ermanno Olmi
Acteurs : Rutger Hauer, Anthony Quayle, Sandrime Dumas, Dominique Pinon, Sophie Segalen, Jean-Maurice Chanet
Musique : Divers
Image : 1.85 16/9
Son : DTS HD Master Audio 5.1 anglais, DTS HD Master Audio 2.0 anglais, français et italien
Sous-titres : Français
Durée : 128 minutes
Éditeur : Carlotta Films
Date de sortie : 22 août 2023
LE PITCH
Un vieux monsieur élégant et mystérieux choisit parmi plusieurs clochards qui peuplent les quais de la Seine Andreas Kartak, ancien mineur de Silésie, ayant fait de la prison pour meurtre. Il remet à son protégé un prêt de 200 francs qu’Andreas doit rapporter le dimanche matin après la messe, à l’église Sainte-Marie des Batignolles où se trouve la statue de sainte Thérèse de Lisieux. Ce prêt inespéré va précipiter la vie d’Andreas qui va rencontrer une série de personnages clés, personnages qui le détermineront à rapporter le billet à la sainte.
Paris d’exil
Toujours promptes à nous délivrer des pépites oubliées du cinéma italien, les éditions Carlotta Films sortent pour la première fois en Blu-Ray La Légende du Saint-Buveur. Présentée dans un Master de toute beauté, cette fable ironico-onirique d’Ermanno Olmi se révèle être un petit bijou magnifié par son décor, un Paris sans-âge, et son interprété principal, Rutger Hauer.
Encore trop méconnue dans nos contrées, l’œuvre d’Ermanno Olmi mérite clairement la (re)découverte. Après avoir fait ses armes en tant que documentariste dans les années 1950, le réalisateur signera quelques classiques d’un cinéma italien alors encore teinté de néo-réalisme avec notamment les excellents Il posto (1961) et Les fiancés (1963). Son cinéma, influencé par la religion et un regard quasi-sociologique de la société italienne (qui l’amènera à constituer ses castings avec des non-professionnels à l’image de Roberto Rossellini) finira par avoir une reconnaissance internationale avec L’arbre aux sabots qui remporta la Palme d’or du Festival de Cannes de 1978.
Dix ans après ce succès et une maladie l’ayant éloigné des tournages, le cinéaste semble tenter une sorte de pari en adaptant La légende du Saint-Buveur, nouvelle quasi-autobiographique d’un Joseph Roth qui à l’image du « héros » du film finira également son existence dans la misère et l’alcoolisme. Un pari, car jusqu’alors Olmi partait d’idées originales et de plus n’avait jamais tourné en dehors de son Italie natale, et encore moins avec des acteurs professionnels. Surprenant à plus d’un titre, le film, 35 ans après sa sortie, semble avoir aussi gagné un caractère universel et toujours d’actualité. En effet, à l’image du Pain et chocolat de Franco Brusati, Olmi pose son regard humaniste sur la pauvreté ainsi que sur les immigrés en situation d’illégalité et en recherche de dignité dans un exil les reléguant sous les ponts parisiens…
Un clochard magnifique
Alors que l’acteur hollandais, véritable « muse » de Paul Verhoeven, Rutger Hauer sort du tournage de séries B américaines comme Mort ou vif ou Hitcher, on pourrait être surpris de le retrouver dans ce film d’auteur italo-français. Mais la présence de l’acteur est en fait une véritable bénédiction puisqu’on assiste à l’une de ses interprétations les plus touchantes, en clochard céleste aux yeux rougis, pris dans le tourbillon de l’ivresse et des petits « miracles » qui lui tombent dessus. Dans un film, où les dialogues (en anglais et en français) se font rares et où l’ambiance prévaut, la présence magnétique de l’acteur de Blade Runner renforce indéniablement la qualité du film qui remportera, entre autres distinctions, le Lion d’or de la Mostra de Venise. Tournant sa Légende à la manière d’une fable, Ermanno Olmi se voit bien aidé par la présence de Dante Spinotti à la photographie. Grâce au travail du directeur de la photo (Manhunter de Michael Mann), la ville de Paris se retrouve magnifiée, sans-âge (entre-deux guerres, après-guerre ?), brumeuse et lumineuse à l’image de son Saint-Buveur déambulant sur les notes de pièces classiques écrites par Stravinsky.
Œuvre exigeante qui divisa quelque peu la critique par son côté abscons et mystérieux, ainsi qu’une certaine lenteur, La légende du Saint-Buveur mérite pourtant d’être réévaluée. Avec son acteur principal au sommet de son art, ses superbes décors et sa mise en scène qui ponctue le récit de véritables tableaux visuels, le film d’Ermanno Olmi peut fièrement figurer au Panthéon des grand films italiens.
Image
Carlotta Films propose ici la dernière restauration du film telle que présentée dans la sélection cinéma Redécouvertes et raretés du cinéma italien. Une petite merveille retravaillée à partir d’un scan 4K des négatifs 35mm et nettoyée de la moindre trace, défauts ou débris. Les nombreuses séquences en clair-obscur et la photographie aussi floue que lumineuse de Dante Spinotti sont admirablement rendues. Les cadres sont superbes, propres, délicats et pointus, et manie habilement le léger grain de pellicule, organiques, et les reflets argentiques. Les couleurs ne sont pas en reste avec un rendu très naturel et des contrastes finement ciselés qui donne à ce Paris d’autrefois un charme évident.
Son
Plusieurs choix s’offrent au spectateur à commencer par une version anglaise dans un DTS HD Master Audio 5.1 inédit. Un rendu pas toujours totalement convaincant avec la disparition régulière en plan lointain des musiques au profit de quelques rares bruitages et des dialogues. Les DTS HD Master Audio 2.0 semble plus à même de respecter l’identité du film avec une version italienne très agréable et une version française qui ne démérite pas même si les dialogues semblent toutefois légèrement feutrés.
Interactivité
Seule la bande annonce est disponible ici. Dommage pour l’interview d’archive de Rutger Hauer et la rencontre avec le scénariste Tullio Kezich présents sur l’édition anglaise d’Arrow Video.
Liste des bonus
Bande-annonce.