LA COURSE À LA MORT DE L’AN 2000
Death Race 2000 – États-Unis – 1975
Support : Bluray
Genre : Science-fiction
Réalisateur : Paul Bartel
Acteurs : David Carradine, Sylvester Stallone, Simone Grifeth, Mary Woronov, Roberta Collins, Martin Kove, …
Musique : Paul Chihara
Durée : 80 minutes
Image : 1.85:1, 16/9ème
Son : Français & Anglais DTS HD Master Audio 1.0
Sous-titres : Français
Éditeur : Carlotta Films
Date de sortie : 23 août 2022
LE PITCH
Dans un futur proche la course transcontinentale des Provinces-Unies d’Amérique est organisée chaque année pour une population avide de violence. Tous les coups y sont permis et Frankenstein, un pilote ayant survécu à plusieurs accidents de la route sanglants, en est le héros incontesté …
Les fous du volant
Produit à toute vitesse et dans des conditions improbables pour coiffer au poteau le Rollerball de Norman Jewison au box-office de 1975, La Course à la mort de l’an 2000 oscille entre la satire politique et l’ultraviolence cartoonesque et n’a rien perdu de son aura culte. Un morceau de choix pour la Midnight Collection de Carlotta !
C’est en découvrant la campagne promotionnelle de United Artists annonçant la mise en chantier de Rollerball, d’après un roman de William Harrison adapté par ses soins, que le pape de la série B Roger Corman anticipe un coup juteux. Le concept d’un film de science-fiction se coulant dans le moule de l’action à grand spectacle promet en effet d’attirer un public plus large et davantage sensible à la promesse d’un carnage motorisé qu’à un pamphlet sur la manipulation des masses par le sport et la médiatisation de ses athlètes/gladiateurs. Pour une bouchée de pain, le patron de New World Pictures met la main sur les droits de « The Racer », une nouvelle d’Irb Melchior. L’adaptation est confiée à Robert Thom, dramaturge et scénariste du Bloody Mama que Corman réalisa en 1970. Jugé irréalisable, le résultat repasse entre les mains de Charles B. Griffith, collaborateur régulier de Corman depuis It Conquered The World en 1956. La mise en scène est proposée à Paul Bartel, comédien et réalisateur issu du circuit indépendant. Malgré des réticences liées au budget et à un calendrier serré, Bartel accepte, conscient du tremplin que Corman lui offre sur un plateau. Le rôle principal de Frankenstein attire David Carradine, lequel tente de percer sur grand écran et de se défaire de l’image de Caine dans la série Kung-Fu. À ses côtés, deux illustres inconnus : Sylvester Stallone, alors en pleine tournée des studios pour vendre le script de Rocky qu’il vient de terminer, et Martin Kove, encore loin d’enfiler le kimono de John Kreese, terrible sensei du dojo Cobra Kai dans le premier Karate Kid. Côté charme, Simone Grifeth, Mary Woronov et Roberta Collins rejoignent le casting avec la promesse de tomber le haut. Pour un peu moins de 500 000 dollars, assurant des réécritures au jour le jour et luttant contre une météo déplorable, Bartel parvient néanmoins à livrer sa copie en temps et en heures. Et celle-ci sera revue de fond en comble au montage par un Roger Corman pas entièrement convaincu par la farce grinçante et colorée que lui propose le futur réalisateur d’Eating Raoul.
Métal Hurlant
Trop d’humour et pas assez de violence. Au montage, le producteur de La Course à la mort de l’an 2000 fait pencher la balance en faveur de ses exigences commerciales. Paul Bartel le regrette mais se contente des restes et concède à Roger Corman un recul qui lui fait sans doute défaut. Avec ses 80 minutes – générique compris ! – le film qui atterrit dans les salles au mois d’avril 1975 fonce pied au plancher et ses scores donnent raison à Corman.
Exception faîte d’un climax qui manque un peu de mordant au regard de ce qui a précédé et de zones d’ombre sur le fonctionnement de cette société dystopique (le prisme de la manipulation médiatique à grande échelle montre un peu vite ses limites), force est de constater que La Course à la mort de l’an 2000 résiste admirablement à l’épreuve du temps et des visionnages successifs, Paul Bartel ayant su réconcilier l’ironie froide, lucide et visionnaire du Stanley Kubrick de Docteur Folamour et d’Orange Mécanique avec le sadisme incisif et virtuose d’un Tex Avery. L’hilarité est du côté des gags, d’un bébé piégé à une déviation menant à une falaise dissimulée derrière un tunnel en trompe l’oeil (en fait, une simple bâche) que n’aurait pas renié Bip Bip et le Coyote en passant par le personnel médical d’un hospice que Frankenstein renverse comme des quilles au lieu de foncer sur les vieillards disposés au milieu de la route comme autant de victimes sacrificielles. Une belle brochette de journalistes et de présentatrices de talk-shows débiles anticipe le pouvoir de nuisance et d’influence de la télé poubelle et des chaînes d’infos en continu – Ed Neumeier et Paul Verhoeven s’en souviendront pour Robocop et Starship Troopers – et la personnalité des concurrents de la course évoque tout autant une galerie de personnages de dessins animés que la fascination des masses pour la violence et le totalitarisme : barbares, Rome Antique, nazis et rednecks du Sud profond. On n’oubliera pas non plus de sitôt ce président quasi-christique qui balance des allocutions mensongères et vides de sens depuis son palais d’été à Pékin, tel un prédicateur New Age ringard. La résistance qui s’organise ne génère pas plus de sympathie chez Paul Bartel, les révolutionnaires n’ayant rien d’autre à offrir qu’une radicalité désorganisée et enfermée dans le passé.
Mais la plus belle idée du scénario réside sans aucun doute dans le personnage de Frankenstein, un nom et un costume transmis à des anonymes pour donner l’illusion d’un champion increvable, le héros d’une idéologie fabriquée de toute pièce, faux monstre et véritable victime du système. L’épilogue lui donne la chance de tomber le masque et de prendre le pouvoir pour mettre un terme aux jeux du cirque, à la dictature et à la violence. Quelques secondes après ces belles promesses, Frankenstein ne résiste pourtant pas à la tentation d’écraser un journaliste en rigolant. L’horreur est bel et bien humaine !
Image
Quelques plans affichent encore des défauts de pellicule et une définition en retrait mais ils ne gâchent en rien le plaisir éprouvé devant cette superbe restauration en 2K qui nous fait oublier les copies ternes et recadrées des éditions précédentes. Les couleurs sont superbes et le grain discret.
Son
Du mono propre mais sans éclat. La version originale est plus équilibrée que la version française dont le doublage sans relief empiète sur le reste des effets.
Interactivité
L’édition US de Shout Factory datée de 2010 (et dont le master a servi pour le présent pressage) était remplie de suppléments fascinants avec, par exemple, un excellent commentaire audio de Lewis Teague et de la monteuse Tina Hirsch. Il faut ici en faire le deuil, la sobriété de la Midnight Collection n’allant pas sans créer de frustrations.
Liste des bonus
Bande-annonce.