LA CHARTREUSE DE PARME

France, Italie – 1948
Support : Bluray & DVD
Genre : Drame
Réalisateur : Christian-Jaque
Acteurs : Gérard Philipe, Renée Faure, Maria Casarès, Louis Salou, Lucien Coëdel, Tullio Carminati, Louis Seigner, …
Musique : Renzo Rossellini
Durée : 173 minutes
Image : 1.37 16/9
Son : Français DTS HD Master Audio 2.0 Mono
Sous-titres : Sans
Editeur : Coin de Mire Cinéma
Date de sortie : 04 décembre 2020
LE PITCH
En 1821, Fabrice Del Dongo quitte Naples où il a terminé ses études ecclésiastiques et arrive chez sa tante, la duchesse de Sanseverina, à Parme. Fasciné par Napoléon,
Fabrice rêve de grandes actions et d’aventures guerrières, mais, destiné par sa famille à être prélat, il ne fera que multiplier les aventures amoureuses…
Épique époque
Moins présent dans l’imaginaire collectif que les adaptations au cinéma de ses contemporains Hugo, Balzac ou Zola, Henri Beyle dit Stendhal aura tout de même inspiré quelques grands cinéastes français dont le très productif Christian-Jaque qui signe avec La Chartreuse de Parme une fresque intimiste étourdissante menée par un Gérard Philipe au sommet de son aura juvénile et romantique.
Envoyé par ses cousins et le ministère de la guerre à Milan à l’âge de 17 ans, l’auteur du Rouge et le Noir découvrit une nation et toute une culture qui eurent sur sa jeune personne une influence considérable. L’Italie, à vrai dire, est au cœur (au propre comme au figuré) de l’œuvre littéraire de Stendhal. Paru en deux volumes en 1839, La Chartreuse de Parme en demeure l’exemple le plus éclatant. De 1796 à la décennie suivant la chute de Napoléon, le roman mélange Histoire et fiction et confronte les idéaux romantiques aux intrigues politiques, à l’injustice des puissants et à la tyrannie des règles de la société. Un classique taillé dans le marbre et dont la postérité fut assurée par un article aussi célèbre qu’élogieux signé Balzac.
Lorsque Christian-Jaque et ses collaborateurs et scénaristes Pierre Jary et Pierre Very s’attaquent à l’adaptation de ce pavé, ils choisissent d’en évacuer toute la première partie et d’ouvrir le récit sur l’arrivée du jeune Fabrice Del Dongo à Parme. Mais la bataille de Waterloo n’est pas la seule victime de cet élagage nécessaire et la fin est modifiée de façon substantielle. Exégète de Stendhal, le journaliste et critique littéraire Henri Martineau ne manquera d’ailleurs pas de souligner la trahison que représente le film de Christian-Jaque … avec un effet quasi-nul sur sa réception auprès du public. Le fait est que le réalisateur des Disparus de Saint-Agil et de L’assassinat du Père Noël n’a que faire de la fidélité à sa source et préfère puiser dans ses innombrables péripéties au gré de ses envies pour concevoir un certain idéal de cinéma populaire foisonnant, un authentique exercice de style. De l’attachement de Stendhal à l’Italie, cette Chartreuse de Parme taillée pour le grand écran garde toutefois des traces avec un casting à moitié transalpin et en s’offrant un tournage et une coproduction avec la Scalera Film de Rome, vestige fragile de la politique culturelle menée par Mussolini.
Des oiseaux en cage
Étrangement, La Chartreuse de Parme, en dépit de ses grandes qualités, échoue à retranscrire une atmosphère italienne, ou même vaguement latine. Par son écriture et les tonalités de son interprétation, le film « sonne » profondément français. On pourrait ainsi remplacer Parme par Paris que l’on n’y verrait guère de différences. Jouant de ses moustaches et de son apparente médiocrité avec un génie comique inné, Aldo Silvani est sans doute le seul à nous rappeler que oui, effectivement, quelque part, l’histoire de La Chartreuse de Parme prend sa source dans l’Italie du XIXème siècle.
Ce décalage culturel admis, le film de Christian-Jaque demeure un véritable festin pour les sens dont l’incroyable audace formelle lui permet de traverser les décennies avec une belle insolence. Comédie de mœurs, satire politique, drame carcéral, tragédie amoureuse, La Chartreuse de Parme enchaîne les duels, les scènes de bals, les conspirations, les évasions et les déclarations enflammées jusqu’à exploser dans un climax insurrectionnel violent, spectaculaire mais aussi teinté d’amertume. Tirant partie de la très belle photographie de Nicolas Hayer (qui flirte avec l’expressionnisme lors d’une surprenante et terrifiante procession macabre entre les murs d’une tour servant de prison) et puisant son énergie dans le montage alerte de Jacques Desagneaux et Giulia Fontana, Christian-Jaque multiplie les ruptures de tons, les décadrages inattendus et les gros plans privilégiant l’expressivité d’un casting dirigé de main de maître.
En plein essor dans le cœur des spectatrices et des spectateurs, Gérard Philippe impose au film son tempo et un jeu parfois fiévreux. Il est de notoriété que l’acteur, alors âgé de 25 ans, finit le tournage sur les rotules, totalement lessivé, et on veut bien le croire. Mais il n’est pas le seul à briller et l’on n’oubliera pas de sitôt les prestations de Maria Casarès et Louis Seigner. La première excelle dans l’ambiguïté des sentiments et dégage une prestance royale tandis que le second inquiète et interpelle en geôlier consciencieux, bien décidé à garder en cage celles et ceux qu’il appelle ses « oiseaux », souvenir d’un crime pédophile évoqué à demi-mot.
Stendhal a beau y laisser quelques plumes, La Chartreuse de Parme impressionne et rappelle l’extraordinaire vitalité du cinéma français d’après-Guerre. Gérard Philippe, lui, retrouvera l’écrivain à l’occasion de l’adaptation par Claude Autant-Lara du Rouge et le Noir en 1954.
Image
Une première édition en DVD datée de 2007 (chez M6 Video) proposait déjà une restauration effectuée avec le CNC pour un résultat très inégal. Impossible d’affirmer qu’il s’agit du même master mais cette nouvelle parution en haute-définition ne gomme pas les nombreux accidents de pellicule et la qualité peut varier d’une scène à l’autre avec un piqué plus ou moins aiguisé. Mais on peut sincèrement vanter les efforts de l’éditeur pour offrir un encodage solide et à la hauteur des exigences du support avec de très belles textures argentiques sur toute la durée.
Son
Le mixage part de loin et atténue autant que faire se peut un souffle persistant et des voix tremblotantes. Résultat, il ne faut pas hésiter à monter le volume pour comprendre ce qui se dit, au risque de devoir le baisser tout aussi vite pour éviter le cafouillis des scènes les plus bruyantes. Un équilibre délicat.
Interactivité
On a beau connaître la formule, le charme dégagé par la ligne éditoriale de Coin de Mire ne faiblit pas. Logés dans un mediabook riches en goodies (cartes postales, affiche), les disques proposent un avant-programme restauré qui replonge immédiatement le spectateur à l’époque de la sortie du film et ne fait quasiment pas regretter l’absence de suppléments « classiques ». Ici, on retiendra tout particulièrement un grand prix de Monaco, la longue visite parisienne de la princesse Elizabeth, pas encore reine, ainsi que les honneurs rendus à Winston Churchill, ancien premier ministre. Des actualités qui remettent en mémoire le climat apaisé de l’après Seconde Guerre Mondiale.
Liste des bonus
Actualités Pathé d’époque (HD), Réclames publicitaires d’époque, Bandes-annonces d’époque, Bandes-annonces de la collection « La Séance ».