LA BRIGADE DU SUICIDE
T-Men – Etats-Unis – 1947
Support : Bluray & DVD
Genre : Policier
Réalisateur : Anthony Mann
Acteurs : Dennis O’Keefe, Mary Meade, Alfred Ryder, Wallace Ford, June Lockhart…
Musique : Paul Sawtell
Durée : 92 minutes
Image : 1.33 16/9
Son : Anglais DTS HD Master Audio 2.0 mono
Sous-titres : Français
Editeur : Rimini Editions
Date de sortie : 24 août 2021
LE PITCH
agents du département du Trésor Américain sont désignés pour infiltrent le Milieu : ils devront mettre fin aux agissements d’un gang de faux-monnayeurs. Ils endossent une nouvelle identité et remontent peu à peu toute la filière.
Les infiltrés
Après une première sortie Bluray consacrée au superbe Marché de brutes, Rimini poursuit son exploration du film noir par le grand Anthony Mann avec ce qu’il considère comme son premier vrai film : La Brigade du suicide, alias T-Men, croisement rare entre la verve documentaire et la vigueur du polar.
Ancien acteur et metteur en scène de théâtre, Anthony Mann a longtemps fait ses armes dans les méandres d’Hollywood, acceptant les projets à droite à gauche, de la comédie musicale aux mélodrames avec soin mais sans passion, attendant son heure. C’est en prenant le cap des petits budgets et des studios indépendants et en particulier du Studio Eagle-Lion, qu’il trouve finalement un sujet à l’aune de ses ambitions. Un film policier cependant pas vraiment des plus original sur le papier, reprenant les racines documentaristes des essais d’Henry Hathaway comme La Maison de la 92ème Rue (1945) ou Appelez Nord 777 (1948), en suivant pas à pas le fonctionnement de l’institution policière, en l’occurrence ici les agents du Trésor des États-Unis, alias les T-Men. Un scénario et un dispositif entièrement voué à leur gloire, entamant le métrage par une introduction dans laquelle l’un de ses employés haut placé en désigne l’une des affaires les plus symptomatiques après avoir rappelé les missions du service. Un ton sentencieux qui va rester très présent tout au long du film, par le biais d’interruptions décrivant la méthode des cellules scientifiques ou autres, et par une voix of omniprésente, soulignant sans cesse le courage de ces agents infiltrés et la vilénie du monde de la pègre.
Au service de la nation
A la limite du film institutionnel dans son scénario, T-Men en dépasse cependant les instances grâce au traitement visuel que lui réserve Anthony Man et son directeur photo John Alton (futur partenaire sur Marché de brutes, Le Livre noir, Incident de frontière et La Porte du diable) sublimant les faibles moyens de la série B par des cadres fixes minutieusement ciselés, aux ombres frappés par des faisceaux lumineux contrastés, et à la profondeur de champs habitée. Des atmosphères lourdes, inquiétantes et pesantes, très loin justement du divertissement angélique attendu. Surtout, en s’appuyant justement sur ce cadre presque propagandiste du film, le réalisateur peut se permettre de scruter avec une frontalité étonnante toute la violence suffocante de ce milieu opaque et brutal. Une violence aussi bien physique, jaillissant dans quelques scènes aussi sèches que sans retour (le meurtre dans le sauna), mais aussi et avant tout psychologique soulignant la porosité entre flics sous couverture et malfrats. La séquence durant laquelle l’un des deux héros doit assister impassible au passage à tabac de son collègue, puis son élimination, reste aujourd’hui encore remarquable par la tension et le fatalisme qu’elle dégage. Au titre américain, T-Men aux accents presque super-héros de strips, on préféra peut-être le titre français, La Brigade du suicide beaucoup plus proche du danger qui attend les personnages.
Exit l’héroïsme simplet, l’enquête policière distanciée, ce premier film noir d’Anthony Mann porte déjà cette marque d’une agressivité sourde et psychique qui deviendra l’une des forces de son cinéma.
Image
Encore une superbe copie pour Rimini et Anthony Mann avec La Brigade du suicide qui rejoint aisément celle de Marché de brutes proposée il y a quelques mois. Ici aussi quelques plans se montrent moins pointus, moins creusés (inévitable d’ailleurs sur les fondus enchaînés), mais la propreté de l’ensemble et la netteté générale force le respect. Les contrastes sont parfaitement gérés, tout comme la densité des noirs, et le tout sans abimer le grain de pellicule.
Son
Classiquement sobre, la piste anglaise DTS HD Master Audio 2.0 mono fait preuve d’une restauration, là aussi, très soignée, délivrant une restitution nette et clair. Si l’équilibre est mis à mal à quelques occasions, avec quelques dialogues un poil trop bas, rien de vraiment choquant pour un film indépendant des 40’s.
Interactivité
Suite logique de l’édition de Marché de Brutes par Rimini, La Brigade du suicide en reprend le très réussi design général, ainsi que le fourreau cartonné et le digipack trois volets. D’ailleurs si la couverture a changé c’est bel et bien le même livret qui est glissé ici. Logique puisque celui-ci se consacrait déjà largement aux débuts d’Anthonny Mann et à T-Men. Côté vidéo, c’est à nouveau Jacques Demange, de la revue Positif qui se charge de la présentation du film. Un intervenant qui réussit une nouvelle fois à tracer les grandes lignes du projet tout en soulignant ses singularités (l’aspect documentaire, la photographie) et à les mettre en perspective avec la carrière et le style du cinéaste.
Liste des bonus
Le livret « La Fureur des hommes » écrit par Christophe Chavdia (28 pages), « Un film noir documentaire » : interview de Jacques Demange (15′).