L’EXÉCUTRICE
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France – 1986
Support : Bluray
Genre : Policier
Réalisateur : Michel Caputo
Acteurs : Brigitte Lahaie, Michel Modo, Pierre Oudrey, Michel Godin, Betty Champeval, Richard Allan
Musique : Aucune
Durée : 94 minutes
Image : 1.66
Son : Français DTS HD Master Audio 2.0
S-T : Aucun
Editeur/distrib. : Le Chat qui fume
Date de sortie : 31 décembre 2022
LE PITCH
Inspectrice à la brigade des mœurs de Paris, Martine cherche à inculper Nadine Wenders, patronne d’un night-club, le Cloître, mais surtout à la tête d’un vaste réseau où se mêlent trafic de drogue, tournages de films pornos clandestins et traite des blanches. Pour y parvenir, notre flic de choc pourra compter sur son équipe, qui aura fort à faire dans cette mission, d’autant plus que Madame Wenders bénéficie du soutien de la mafia chinoise et d’une personne haut placée au sein de la police.
Brigitte aux arrêts
Peut-on véritablement échapper à son destin ? Peut-on s’offrir une carrière traditionnelle lorsqu’on a été l’icone féminine du cinéma X pendant 10 ans ? Peut-on réaliser un polar à la française lorsqu’on a construit sa carrière sur un porno potache et particulièrement viandard ? L’Exécutrice n’offre pas beaucoup d’espoir à cet endroit.
Il y a forcément quelque chose de profondément touchant à (re)découvrir L’Exécutrice, échec cuisant lors de sa courte sortie dans quelques rares salles françaises en 1986. Tout simplement parce qu’on sent tout un milieu totalement ostracisé par le reste du cinéma français qui tente vaille que vaille de s’extirper de sa condition. Comme Brigitte Lahaie ex-icône du genre mais alors au creux de la vague, qui obtient là pour la première, et la dernière fois, un véritable premier rôle dans un film traditionnel. La première fois qu’elle eu le temps de préparer son rôle (la production lui offrit même un petit stage dans la police), qu’elle put s’efforcer de créer des émotions autres que le désir et même de s’envoler pour quelques poursuites, castagnes et autres échanges musclés. Un peu comme une Bebel au féminin comme tente de nous le faire croire l’affiche typé imaginée par son conjoint d’alors, le fameux René Châteaux. L’Exécutrice, c’est aussi l’ultime tentative pour Michel Caputo de faire autre-chose que des spectacles hardcores répondants aux doux noms de J’ai très envie de nymphettes à sodomiser, Maitresses dociles, salopes par derrières ou Embrochez-mois par les deux trous, lui qui justement n’avait connu que de cuisants échecs avec ses comédies lourdingues pourtant typiques de l’époque Arrête de ramer t’attaques la falaise, Si ma gueule vous plait et Les Planqués du régiment. Et en l’occurrence l’idée de L’Exécutrice il ne serait pas allé la chercher plus loin que dans l’un de ses petits bestseller ixé, Sybil tous les trous sont permis dont il n’hésite pas à produire un simple remake.
Arrête de tourner t’es dans les choux
Une nouvelle version sans le sexe non simulé bien entendu, avec une atmosphère beaucoup plus tendue vers le polar urbain franchouille qui faisait florès en ce milieu des années 80, décor de banlieue, flicaille bad-ass et un poil ripoux, truands crapoteux et dialogues fleuries (parfois bien réussis) à l’appui. Mais malgré toutes les bonnes intentions, et certainement aussi plombé par un tournage éclair et un budget fermement limité, l’objet ne réussit jamais à convaincre avec son petit scénario bout de ficelle sans réelle structure, ses cascades (pourtant par l’équipe de Remi Julienne) jamais vraiment mise en valeur par une mise en scène tristoune, et une interprétation terriblement inégale. Si Brigitte Lahaie s’en sort plutôt bien malgré d’évidente fragilité et que l’inattendu Michel Modo, habitué des seconds rôles dans les vieilles comédies bien de chez nous, y donne un peu de hauteur, la plupart des seconds rôles sont le plus souvent très mécaniques et rigides (rien plus anormal pour Richard Allan, dit Queue de béton), de toute façon empêtrés dans des personnages franchement caricaturaux. Mention spéciale a cet étrange gangster qui semble déterminer à nous offrir son hommage au Marlon Brando du Parrain. Et des séquences gênantes de cet acabit, le film nous en sert régulièrement, comme cette tentative de viol sur notre brave Martine sauvé in extremis d’un employé des postes qui se trimbale dans les parkings avec son fusil (au cas où) ou la même héroïne qui noie son chagrin et ses petits coups de pompe en se prélassant dans son jacuzzi… tant qu’à faire.
Mal fagoté, constamment maladroit, souvent bordélique, voir limite amateur par moments, L’Exécutrice est surtout attendrissante dans cette envie presque irréalisable de bien faire (Caputo n’a jamais été un bon cinéaste, même de X), de s’échapper d’un genre qu’il remet ici en scène comme un milieux presque uniquement crapuleux, salace et limite déviant. On appelle ça aussi cracher un peu dans la soupe, mais bon.
Image
Produit en partenariat avec les américains de Severin, cette restauration de L’Exécutrice peut se vanter d’un luxueux scan 2K des négatifs pour un résultat des plus éclatants. Le travail a, comme toujours avec les deux éditeurs, été particulièrement soigné et creusé, délivrant des images simplement virginales, impeccablement stables, et constamment rehaussées par des matières 35mm organiques, vibrantes et naturelles. Les couleurs sont splendides, la définition idéale, et ce traitement améliore effectivement très efficacement l’esthétique du film, lui donnant un peu de la solidité qui lui manquait. Imaginions-nous un jour pouvoir découvrir ce film dans de telles conditions ? Certainement pas.
Son
Rien à reprocher non plus à la restauration de la stéréo d’origine, bien au contraire, avec un nettoyage de circonstance, une stabilité nouvelle, qui donne un peu plus de coffre aux dialogues, tout en laissant les petites disparités de la captation directe bien en évidence.
Interactivité
La classe jusqu’au bout pour L’Exécutrice avec un digipack et fourreau cartonné reprenant la célèbre affiche du film. Sur le disque Bluray on découvre en premier lieu le même suppléments (et produit par Le Chat) que l’édition américaine à savoir une rencontre inédite avec Brigitte Lahaie et Michel Caputo, où le second se montre bien plus loquace et surtout manifestement heureux de revenir sur cet opus de sa carrière. Quelques petits souvenirs de tournages échangés, le manque de budget, le travail d’actrice de Brigitte et même les cascades sont abordés avec bonne humeur… sans jamais totalement mettre de coté les défauts évidents du film. Passé un court détour du côté de l’un des décors du film ayant servi de cadre, entre autres, à une cascade enflammée, l’édition laisse la parole au journaliste vétéran (désolé) Christophe Lemaire. Un vieux de la vieille désormais qui se souvient de ses découvertes X en salle, de sa fascination pour Brigitte Lahaie, de la projection presse de L’Exécutrice et donc d’une époque révolue de l’exploitation à la française. Comme toujours assez sympa.
Liste des bonus
La flic au bas nylon avec Brigitte Lahaie et Michel Caputo (19 mn), Souvenirs de Christophe Lemaire (29’), Bonus cascade (3’)