L’ÉPÉE SAUVAGE
The Sword and the Sorcerer – États-Unis – 1982
Support : UHD 4K
Genre : Aventure, Fantastique
Réalisateur : Albert Pyun
Acteurs : Lee Horsley, Kathleen Beller, Simon MacCorkindale, George Maharis, Richard Lynch
Musique : David Whitaker
Image : 1.85
Son : DTS HD Master Audio 5.1 anglais, DTS HD Master Audio 2.0 anglais et français
Sous-titres : Français
Durée : 99 minutes
Éditeur : Carlotta Films
Date de sortie : 04 avril 2023
LE PITCH
Le tyrannique Lord Cromwell est prêt à tout pour conquérir le royaume d’Ehdan, même à recourir à la magie noire. Avec l’appui du sorcier démoniaque Xusia de Delos, il parvient à anéantir ses ennemis et à neutraliser le roi Richard et sa famille. Seul son fils Talon réussit à échapper au massacre. Onze ans plus tard, le jeune homme, devenu un guerrier redoutable, est de retour au royaume où un complot contre Cromwell se prépare…
Albert le conquérant
Premier film déjà très modeste financièrement d’un Albert Pyun (Cyborg, Captain America… bien avant le MCU) qui restera éternellement abonné aux productions bis méchamment fauchées, The Sword and The Sorcerer a de jolis airs de petit miracle dépassant constamment ses petites origines pour embarquer avec énergie et ferveur le spectateur dans une ambitieuse aventure de Fantasy. Elle s’offrit même le luxe de sortir sur les écrans américains quelques semaines avec Conan Le Barbare de John Millius !
Que l’on ne s’y trompe pas, c’est bien entendu l’annonce du projet de l’adaptation des romans de Robert E. Howard et des comics dérivés chez Marvel par Universal, qui convainc finalement le producteur Brando Chase (L’Incroyable Alligator) de mettre un peu la main à la poche pour financer cet étrange script que le jeune Albert Pyun tentait de glisser sous toutes les portes depuis quelques mois. Une histoire de prince déchu, d’usurpateur de trône, d’épée magique à trois lames, de sorcier nécromant et de très jolie princesse qui trouvait effectivement un écho certains en ce début des années 80 alors bercé par un regain de la Fantasy avec des films allant du très sérieux Excalibur au plus enchanté Dark Crystal… Sans compter sur les multiples rip off de Conan qui vont rapidement montrer le bout de leur nez comme Dard l’invincible aux États-Unis ou The Barbarians et Conquest du côté de l’Italie. Mais à la différence de ces derniers Albert Pyun n’a aucunement copié le film de John Milius (même si naturellement certaines références sont identiques) mais s’est surtout nourri de ses passions adolescentes brassant les comics, des œuvres littéraires plus classiques, les grands films de cape et d’épée américains et les films de sabre japonais (les Baby Cart en particulier).
Le merveilleux frappe trois fois
Détonnant mélange qui permet alors toutes les ruptures de tons, habillant le film avec les atours d’un récit cruel pour adulte avec un humour parfois enfantin, passant d’une sauvagerie barbare à une légèreté plus bondissante proche du swashbuckler d’entant. Il est particulièrement étonnant de voir comment l’ensemble du spectacle réussi cependant à rester cohérant, boosté par un rythme des plus soutenus qui n’exclue pas quelques ellipses plutôt culotées, mais effectivement nécessaire pour tenir le budget, laissant les grandes batailles épiques hors champs. C’est que Pyun doit faire beaucoup avec très peu et comme la bande sonore orchestrale temporaire mélangeant du John Williams ou du Jerry Goldsmith doit laisser place aux efforts charmants, mais synthétiques, de David Whitaker, le jeune réalisateur doit constamment rivaliser d’astuce pour cacher la misère. Aidé par un casting de spécialistes du ciné d’exploitation (Richard Lynch, Lee Horsley, Simon « Manimal » MacCorkindale…), une équipe talentueuse aux effets spéciaux (dont les frères Chiodo eux aussi débutants), une superbe photographie crépusculaire de Joseph Mangine (L’Incroyable Alligator) et des décors restreint mais toujours parfaitement cadrés, Pyun donne corps à une atmosphère assez unique, évocatrice, proche des feuilletons libres d’autrefois où les courbes des jolies princesses en périls rivalisaient avec les effusions de sangs plus virils et les découvertes de rites terrifiants.
Malgré quelques perruques qui glissent, deux trois moustaches trop fournies et des plans d’ensembles qui ne peuvent détourner le regard de figurants perdus et bataillant mollement, L’épée sauvage n’a rien du nanar annoncé, spectacle constamment sincère, parfois vaillamment inspiré, et à la fougue capable de faire oublier des moyens pas toujours à la hauteur des ambitions.
Image
Non ce n’était pas forcément le premier film de Sword & Sorcery que l’on espérait en UHD (on pensait plutôt à un cimmérien mais bon), il n’empêche que le travail fourni sur L’épée sauvage est particulièrement impressionnant. Basé sur une restauration complète effectuée à partir d’un nouveau scan 4K des négatifs, le master vient concrétiser toute l’ambition esthétique du film, souligne le maniérisme de sa photographie crépusculaire, la réussite de certains effets spéciaux et de ses décors grâce à une définition des plus pointues et précises. Profitant aussi au passage d’un traitement Dolby Vision, le film se dote de rouges plus profonds et éclatants que jamais, de finesses inattendues dans la restitution des teintes, et de noirs plus fermes que jamais. Forcément avec sa pellicule bon marché, l’utilisation de quelques stockshots ou de plans composites économes, le film est constamment traversé par un grain fluctuant et des filtres brumeux, mais l’UHD réussit à en restituer tous les contours sans broncher.
Son
Comme pour l’édition US, on peut redécouvrir le film avec un mixage DTS HD Master Audio 5.1 se voulant plus ample et dynamique, mais qui par excès de triturages et quelques effets à l’artificialité gênante, ne réussit pas à faire de l’ombre au DTS HD Master Audio 2.0 plus proche de la volonté initiale. Si quelques soucis techniques restent encore audibles (apparemment la source est irrémédiablement abimée) le rendu est plutôt énergique et efficace. Même ressenti du côté de la version française au doublage à l’ancienne tout à fait convaincant et même doté d’une certaine noblesse.
Interactivité
Présenté dans un superbe Steelbook que ce soit sur support UHD ou Bluray (vendus séparément), l’édition française reprend une partie des suppléments produits par Shout Factory aux USA avec en premier lieu une interview du réalisateur Albert Pyun, enregistrée quelques temps seulement avant son décès. De son projet refusé par tous les studios durant des années, sa collaboration pas toujours aisée avec le producteur Brandon Chase, le tournage fauché mais plein d’entrain et son écartement de la phase de montage, le réalisateur évoque autant de bons que de mauvais souvenirs mais toujours avec le sourire et la bienveillance qu’on lui connait. On enchaine ensuite justement avec le monteur Marshall Harvey qui revient sur l’importance de la musique et sur l’enregistrement de la voix du narrateur par un Oliver Reed en fond de la bouteille et finalement inexploitable. Les deux segments suivants laissent la parole aux spécialistes des effets spéciaux, Allan Apone puis les frères Chiodo, responsables respectivement des effets gores du film et du fameux cercueil aux visages sculptés animés. Tout le monde en tout cas semble garder un vrai attachement pour ce projet.
Liste des bonus
« Souvenirs d’un ancien empire » : entretien avec Albert Pyun (33’), « Le Maître des lames » : entretien avec le monteur Marshall Harvey (14’), « Le Spécialiste des effets » : entretien avec Allan Apone sur les effets spéciaux de maquillage (12’), « Frères d’armes » : entretien avec les frères Chiodo, créateurs d’effets spéciaux (10’), Bandes-annonces.