L’ODYSSÉE D’UN SERGENT

Sergent Ryker – Etats-Unis – 1968
Support : Bluray & DVD
Genre : Guerre, Policier
Réalisateur : Buzz Kulik
Acteurs : Lee Marvin, Bradford Dillman, Peter Graves, Vera Miles, Lloyd Nolan, Murray Hamilton…
Musique : John Williams
Image : 1.85 16/9
Son : Anglais DTS HD Master Audio 2.0
Sous-titres : Français
Durée : 85 minutes
Editeur : Éléphant Films
Date de sortie : 6 mai 2025
LE PITCH
Pendant la guerre de Corée, le Sergent Paul Ryker est jugé pour trahison après avoir déserté et rejoint les communistes. Le soldat a beau se justifier en déclarant avoir reçu des ordres pour une mission secrète derrière les lignes ennemies afin de démasquer un traître, personne ne peut en attester, et aucune preuve n’existe pour prouver ses dires. Le tribunal militaire doit trancher : Ryker est-il innocent ou doit-il être exécuté ?
Un Homme d’honneur
Vendu grâce à sa superbe affiche comme un nouveau grand film de guerre mettant en avant l’héroïsme viril de la légende Lee Marvin, L’Odyssée du sergent, œuvre finalement plutôt rare ces dernières années, n’est pas véritablement un film de guerre mais plutôt un film procédural bien modeste et très télévisuel. Et il n’y a rien d’étonnant à cela.
Longtemps resté l’une des gueules les plus célèbres du cinéma américain, mais surtout cantonné à des seconds rôles, Lee Marvin devient enfin une star bankable grâce à l’imposant Les Douze Salopards de Robert Aldrich. Tête d’affiche malgré un sacré casting (Bronson, Casavetes, Borgnine, Jim Brown…) et meneur de troupe, il devient en l’espace d’un film le nouveau visage du cinéma de guerre américain, moins glorieux et patriotique que ses ainés, plus lucide et réaliste certainement. Et la Universal n’a certainement pas envie de passer à coté de ce potentiel et décide de sortir son propre film de guerre avec Lee Marvin. Et même pas besoin de le tourner puisqu’il existe déjà dans les archives du studio. En 1963 la nouvelle série anthologique de NBC Kraft Suspense Theatre, Haute tension chez nous, s’ouvre par les deux épisodes The Case Against Paul Ryker avec justement Lee Marvin dans le rôle-titre. Une diffusion quelque-peu oubliée, en particulier à l’étranger, qui permet alors aux producteurs de transformer les deux segments de près d’une heure en un long métrage de 85 minutes, resserrant le rythme, glissant quelques ellipses et surtout en recadrant tous les plans pour s’inscrire au mieux sur les écrans cinémascopes modernes.
L’affaire du Sergent Ryker
Forcément l’opération n’est pas sans dégâts, ne serait ce que dans la construction des cadres, régulièrement déséquilibrés voire aux alouettes, mais aussi dans la mise en place du scénario désormais étrangement marqué par un long flashback (avec voix en échos et écran qui se trouble… on se croirait dans Y a-t-il un pilote dans l’avion ?) après une première bobine pas toujours compréhensible. De toute façon, la mise en scène du faiseur Buzz Kulik, surtout cantonné à la télévision, ne fait pas vraiment d’étincelles, écrasée par un tournage limité en studio et l’utilisation un peu lourde de stock-shots abimés pour la seule scène de bataille entraperçue. Il serait cependant assez dommage de passer à coté du métrage, certes déséquilibré et terriblement étriqué, mais dont le scénario de base s’avère finalement assez solide avec un procès pour trahison où l’on ne sait jamais vraiment si le fameux Sergent Ryker, colérique, trouble et énigmatique, a finalement servi ou pas comme agent double. Un mélange de drame, d’enquête et de plaidoyer joliment encadré par les performances assez juste de Bradford Dillman en défenseur (mais avec vu sur l’épouse de son « client ») et Peter Graves en accusateur. La dernière partie du film justement, recentrée sur le procès fonctionne assez bien et vient questionner au passage le système militaire américain avec une certaine pertinence. Pas totalement étonnant d’ailleurs que ces deux personnages, le Capitaine David Young et le Major Whitaker, devinrent en 1965, le temps d’une saison, les héros de leur propre série : Court Martial.
Pas totalement à sa place su grand écran, cette odyssée à petite échelle rappelle les petites astuces de rentabilités auxquels les studios américains pouvaient parfois se livrer pour gonfler quelques productions télévisées prometteuses. Restes à la base une production tv de très bonne qualité, avec de bons acteurs (Lee Marvin bien entendu mais pas que) et un script assez solide dont on ne perçoit sans doute qu’une partie ici.
Image
Kino Lorber a effectué une restauration très soignée pour ce long métrage, travaillant à partir d’un nouveau scan 2K à la source (oui, mais laquelle ?), s’efforçant de gommer la moindre défaillance de pellicule tout en préservant grain, matières et argentiques. Certains plans sont superbes, fermes, colorés et vibrants. Cependant comme la copie cinéma 1.85 a été effectuée à partir d’une source 1.33 conçue pour la télévision, Universal avait en 1968 joué les apprentis Frankenstein en recoupant le format des plans, tranchants sur les parties haute ou basses, effectuant quelques zooms hasardeux ou multipliant les fondus. Forcément tous ces plans, en plus d’être pas des plus gracieux, sont accompagnés d’une définition plus floue et d’effets plus neigeux. Dans ce contexte-là, difficile de faire mieux.
Son
Le mono d’origine est disposé dans un DTS HD Master Audio 2.0 aussi sobre et frontal que clair et confortable. Les dialogues résonnent avec simplicité et effectivement l’ensemble n’est pas un modèle de dynamisme, mais encore une fois les origines télévisuelles jouent beaucoup.
Interactivité
Le matériel disponible pour L’Odyssée du sergent est assez limité, même aux USA. Éléphant nous propose donc ici un portrait très sympathique de Lee Marvin écrit et énoncé par Eddy Moine. Un travelling complet de la carrière du monsieur, de ses débuts modestes à sa gloire hollywoodienne jusqu’aux dernières années plus difficiles, avec le défilé de ses réalisateurs préférés, de ses collègues acteurs comme Ernest Borgnine et bien entendu l’évocation de son fort caractère et de ses intransigeances.
Nulle trace ici, comme aux USA, des épisodes originaux de Kraft Suspense Theatre. Dommage, on aurait bien aimé pouvoir jeter un œil dessus.
Liste des bonus
Portrait de Lee Marvin par Eddy Moine (15’), Bande-annonce d’époque.