L’ARME À GAUCHE
France, Italie, Espagne – 1965
Support : Bluray & DVD
Genre : Aventure
Réalisateur : Claude Sautet
Acteurs : Lino Ventura, Sylva Koscina, Leo Gordon, Alberto de Mendoza, Antonio Casas…
Musique : Eddie Barclay, Michel Colombier
Image : 1.66 16/9
Son : Français Dolby Digital 1.0
Sous-titres : Aucun
Durée : 101 minutes
Editeur : Tamasa Diffusion
Date de sortie : 28 février 2024
LE PITCH
Dans les Caraïbes, Cournot, un marin au chômage, est contacté par un certain Hendrix qui lui demande de l’aider à acheter un yacht, le Dragoon. Mais le bateau et Hendrix se volatilisent. Soupçonné un temps par la police, Cournot accepte d’aider la riche veuve propriétaire du Dragoon, à retrouver son bateau…
Calme blanc
Claude Sautet, avant Claude Sautet. Pas encore le cinéaste de Les Choses de la vie ou César et Rosalie, ce dernier entama sa carrière de réalisateur du coté du polar à la française. Après le très encourageant Classe tous risques il renouait cinq ans plus tard avec la Série Noire et Lino Ventura pour L’Arme à gauche.
C’est que malgré des qualités indéniables, une maitrise déjà évidente et une direction d’acteurs particulièrement solide, sa première vraie réalisation Classe tous risques n’avait malheureusement pas vraiment eu les honneurs d’une grande reconnaissance publique. Sautet retourne alors un temps dans l’ombre, non plus vraiment au poste d’assistant réalisateur, mais plutôt de script doctor très prisé et de scénariste apprécié sur Symphonie pour un massacre, Échappement libre ou Peau de banane, déjà adapté justement du romancier américain Charles Williams. C’est sans doute cela qui a amené Sautet à la réalisation de cette nouvelle adaptation, cette fois-ci du roman Ont-ils des jambes ?, mais aussi son excellente relation avec Lino Ventura désormais tête d’affiche incontournable du cinéma français. Le personnage est d’ailleurs en grande part réécrit pour profiter pleinement de la carrure charismatique de l’acteur, mais aussi pour lui permettre de se détacher autant des sa figures de simple castagneur hérité des épisodes du Gorille, que d’un polar ultra dialogué et fleuri dont il est devenu l’un des symboles depuis la sortie des Tontons flingueurs.
Avant la tempête
En reprenant très largement le roman, Sautet va même à contre-courant de « l’école » Audiard et place constamment le verbe au second plan, ici uniquement voué à livrer le point de départ du film (un yacht volé et l’enquête pour le retrouver) et le glissement progressif du film d’enquête vers l’aventure, voir l’action. Un travail d’épure de la trame puis même du cadre de récit qui compense une première partie un peu longue à se mettre en place (avec des policiers somme toutes assez inutiles) avec un dernier grand chapitre beaucoup plus tendu, où l’opposition entre le héros (Ventura cela va de soi) et le terrible pirate / contrebandier, frôle l’abstraction totale. Le yacht ensablé et une petite ile à quelques coups de rames de là ne sont alors plus que les deux derniers encrages du film, et l’opposition bien / mal prendre la tournure d’un brillant et très habile exercice de style. Excepté la protagoniste féminine, jouée par une habitué du ciné bis Sylva Koscina, qui se détache très agréablement des femmes fatales ou victime écervelées habituelles, les personnages ne sont pas loin des archétypes, et leurs incarnations dans l’espace et le plan, entre longue attente et fusillade façon Fort Alamo (la crapule Leo Gordon est assis sur des caisses de munitions), déjoue les accents purement « exploitation » attendus. Un film de genre particulièrement intéressant, inégal, mais encore une fois marqué par les talents évidents d’un metteur en scène en construction et en recherche de sa propre identité.
Encore une fois assez injustement boudé par le public de l’époque, malgré quelques critiques élogieuse, L’Arme à gauche reste malheureusement un film peu apprécié par son auteur, marqué par un tournage compliqué. Il lui faudra cinq nouvelles années à travailler pour d’autres avant que sa voie ne devienne enfin claire avec l’essentiel Les Choses de la vie.
Image
Tamasa reprend ici plus ou moins le master déjà présenté en DVD en 2010 par M6 Vidéo. Une restauration soignée 2K entre procédés chimiques et numériques sur laquelle ne persistent plus que quelques micro-rayures et de rares cadres tremblotants. En arrivant sur support HD, cette source à certainement gagné en définition et en finesse affichant une belle clarté où apparait discrètement le grain de pellicule, ainsi qu’en finesse dans la restitution des contrastes. Le noir et blanc, à la luminosité certes un poil fluctuante, retrouve à merveille l’intensité d’autrefois. Pas parfait donc, mais vraiment très agréable et constamment respectueux de l’œuvre.
Son
Seulement disposé en Dolby Digital, là où les camarades éditeurs optent généralement pour un DTS HD Master Audo, la piste sonore française de L’Arme à gauche profite elle aussi d’un très joli rafraichissement. Aucun souci de perceptible, et les dialogues, malgré la post-synchronisation générale, jouent aussi solidement les graves que les moments de plus haute intensité sans saturation déplaisante.
Interactivité
Le film est proposé dans une édition digipack avec disque bluray, DVD et un livret d’une vingtaine de page réunissant une excellente critique signée Jean-Louis Bory datant de la sortie du film, et un récit plutôt sobre et efficace de sa production.
Sur le disque, Tamasa a produit une rencontre avec Bernard Payen, responsable de la programmation à la Cinémathèque française, qui revient sur les premières années de la carrière de Claude Sautet, son rapport difficile avec le film en question, les différents avec le roman et quelques bribes d’anecdotes connues autour d’un tournage un peu compliqué. Il en profite aussi pour analyser la mise en scène et souligner la différence avec les films français de l’époque (plus bavards) et le rapprocher parfois de ses œuvres plus personnelles à venir.
L’édition se conclue sur un extraordinaire document tourné pour l’émission Grand écran et diffusé en 1965, avec une visite très franche et assez fascinante du tournage en studio. On y reconnait le jeune assistant Yves Boisset, on profite des interviews du cinéastes, de Ventura et Silva Koscina, évoquant personnages, atmosphères et singularités.
Liste des bonus
Le livret « En avoir ou pas » par J.L. Bory avec notes de production (20 pages), « Images du tournage » : Sur le plateau avec Claude Sautet, Lino Ventura et Sylva Koscina, Collection Grand Ecran (13’), « Sautet avant Sautet » par Bernard Payen (36’).