JOHN WICK : CHAPITRE 4
John Wick : Chapter 4 – États-Unis – 2022
Support : 4K Ultra HD & Bluray
Genre : Action
Réalisateur : Chad Stahelski
Acteurs : Keanu Reeves, Donnie Yen, Bill Skarsgaard, Laurence Fishburne, Hiroyuki Sanada, Shamier Anderson, …
Musique : Tyler Bates, Joel J. Richard
Durée : 169 minutes
Image : 2.39 16/9
Son : Anglais & Français Dolby True HD 7.1
Sous-titres : Français
Editeur : Metropolitan
Date de sortie : 22 juillet 2023
LE PITCH
Afin de gagner sa liberté auprès de la Grande Table et lever la prime de 20 millions de dollars qui pèse sur sa tête, John Wick doit provoquer le Marquis de Gramont en duel. Mais il va d’abord devoir traverser plusieurs épreuves périlleuses et affronter Caine, un sabreur aveugle et aussi son plus vieil ami, …
John Wick’s Excellent Adventure
Comment passe-t-on d’une série B d’action menée par une star dans le creux de la vague et que personne n’attendait à un blockbuster maousse à 100 millions de dollars qui, sur près de trois heures, s’échine à repousser toutes les limites du cinéma d’action ? Bariolé, luxueux, maniéré, spectaculaire jusqu’à l’abstraction, ultra-référencé, John Wick : Chapitre 4 pousse la formule esquissée en 2014 dans ses ultimes retranchements. Mais si le cocktail explosif que nous propose le duo Chad Stahelski / Keanu Reeves parvient assez souvent à nous mettre des paillettes dans la vie, l’émotion, elle, reste malheureusement aux abonnés absents.
Création du scénariste Derek Kolstad, le personnage de John Wick confronte le spectateur à un archétype fascinant, piochant dans la mythologie de l’Antiquité, le film noir, le western, le film de samouraïs, le cinéma de Jean-Pierre Melville, de Sergio Leone, de Chang Che et de John Woo et même la bande-dessinée et le jeu vidéo. Assassin monolithique et increvable ne déviant jamais de son objectif, surnommé « Baba Yaga » (figure ambivalente du folklore russe) par la pègre qui l’emploie ou qui craint de se retrouver dans sa ligne de mire, il est à la fois l’ange de la mort, Clint Eastwood dans la trilogie du Dollar, Chow Yun-Fat dans The Killer, Alain Delon dans Le Samouraï, Steve McQueen dans Bulitt et Toshiro Mifune chez Akira Kurosawa. Un personnage composite donc, et qui va, il faut bien le dire, comme un gant à l’impassible et charismatique Keanu Reeves, lequel campait déjà dans la saga Matrix un sauveur de l’humanité au croisement de multiples mythes, religions et philosophies. Reposant sur une trajectoire narrative simple comme bonjour (un tueur à gages sort de sa retraite pour se venger des mafieux russes qui ont tué son chien et volé sa voiture, seuls souvenirs de sa défunte femme), John Wick premier du nom avait su créer la surprise par son élégance formelle et son efficacité dans l’action, fruit de la longue expérience de cascadeurs et d’assistants réalisateurs de Chad Stahelski et de son comparse David Leitch. Refusant le surdécoupage des scènes d’action au profit de longs plans larges mettant en valeur les prouesses des cascadeurs et d’une star qui multiplie les headshots et les prises de jiu-jitsu dans un costume Armani toujours impeccable, les 101 minutes de John Wick, à défaut de révolutionner un genre, proposaient une saine alternative à un cinéma d’action tiraillé entre les formules du passé (les 80’s et les 90’s) et le fléau galopant de l’école Marvel et de ses super-zozos interchangeables. Cerise sur le gâteau, le script de Kolstad se permettait de semer des indices d’un arrière-plan et d’une mythologie bien plus vaste que la vendetta somme toute très « intimiste » menée par Mr Wick ne le laissait supposer, ouvrant ainsi la porte à d’éventuelles suites. Et suites il y eut !
Alea Jacta Est
Opus de transition, John Wick 2 se positionne au premier abord comme un épilogue rigolo mais assez dispensable de son prédécesseur. John récupère sa voiture, bousille à nouveau quelques mafieux russes (et sa bagnole aussi, WTF!) inféodés à un Peter Stormare toujours aussi cabotin, fait un tour au garage de John Leguizamo et rentre à la maison pour reprendre sa vie de veuf pépère entre tâches ménagères, promenades du nouveau toutou et séances de spleen pluvieuses. C’est à ce moment, à la faveur d’une dette à honorer et de la destruction au lance-grenade du domicile de John Wick, que la franchise opère un virage à 180° et commence à voir bien plus grand. Voyage à Rome (avec Franco Nero en guest star), fusillades de plus en plus chorégraphiées et opératiques, fétichisme des armes, plongée dans les codes et les intrigues de cour de la Grande Table (une organisation internationale d’assassins au fonctionnement quasi-féodal), jusqu’à la présence très méta de Laurence Fishburne en roi des clodos et d’un gros cliffhanger final.
Dans ces conditions, John Wick 3 : Parabellum lâche les chiens et s’enfonce dans une logique inflationniste qui flirte de plus en plus avec le grand n’importe quoi et dont on retiendra essentiellement une baston/poursuite nocturne à cheval avec des ninjas à moto (!), un Mark Dacascos impérial et la volonté de Derek Kolstad d’amener cette histoire de plus en plus grandiloquente vers une nouvelle phase où Wick et ses derniers alliés mèneraient enfin la révolte contre la tyrannie de la Grande Table et ses lois séculaires.
Les duellistes
Après avoir été flingué par son meilleur ami et jeté du haut d’un immeuble à la fin du troisième film, John Wick est finalement prêt à reprendre à du service grâce aux bons soins du roi des clodos (Laurence Fishburne, encore et toujours), un supplément de repos (la pandémie de COVID-19 a repoussé le tournage de plus d’un an) et beaucoup, beaucoup d’entraînement. Pour jeter à bas la Grande Table et faire la révolution comme on nous l’avait promis ? En fait, non. Kolstad ayant cette fois jeté l’éponge, Chad Stahelski et sa bande en profitent pour ignorer le (mince) édifice narratif mis en place par le créateur de la saga et se réfugier derrière leurs acquis pour livrer avec ce qui présente finalement comme une conclusion (ou pas) une gigantesque lettre d’amour au cinéma d’action, toutes époques et cultures confondues. Oubliée l’insurrection, John Wick : Chapitre 4 lance son héros dans une quête pour son émancipation, chaque scène étant articulée autour d’une épreuve qui le mène au niveau suivant avant de pouvoir affronter le Marquis de Gramont (Bill Skarsgaard en mode dandy), boss de fin aux moyens financiers apparemment illimités. Enchaînant les morceaux de bravoure insensés, le dernier acte parisien s’inspire ouvertement des Guerriers de la nuit de Walter Hill et finit par transformer ce pauvre Keanu Reeves en punching-ball humain. Lequel finit toujours par se relever, au mépris de toute crédibilité. Fusillade au milieu du trafic autour de l’Arc de Triomphe, fusillade avec munitions incendiaires en plongée totale et en plan séquence dans un vieil immeuble, montée des marches meurtrières menant au Sacré Coeur : le spectacle est dantesque et laisse sur les rotules mais il s’effectue aussi aux dépens d’une quelconque implication émotionnelle. Arrivés au bout de la première heure de métrage, on se fout ainsi éperdument du sort de John Wick, de ses dilemmes ou de ses alliances et seul compte le coup d’éclat suivant. Un choix à double tranchant qui risque d’en laisser plus d’un de marbre, se demandant ainsi « à quoi bon ? ».
Action !
S’il peut en effet se regarder d’un œil distrait, entrecoupé de légers bâillements, John Wick : Chapitre 4 peut aussi et doit surtout être reçu pour ce qu’il est réellement : un baroud d’honneur des plus grands cascadeurs et artistes martiaux en activité et un objet raffiné qui reste persuadé du premier au dernier plan que le cinéma d’action est la forme la plus pure et la plus noble d’expression du pouvoir de fascination du 7ème Art. Dans ce but, Chad Stahelski s’est assuré d’apporter un soin maniaque à sa direction artistique qui voyage aux quatre coins du globe, où sont mis à l’honneur musées, églises, boîtes de nuit enveloppées de néons et capitales historiques (Osaka, Berlin et Paris). Et il en va de même pour les costumes et les accessoires, mis en valeur comme des tenues cérémoniales et de saintes reliques.
Si le cinéaste a du goût, il le prouve également par son découpage et sa mise en scène, en veillant à la fluidité hypnotique de ses mouvements d’appareils et à la lisibilité constante des très nombreuses empoignades. Quant au casting et aux clins d’œil cinéphiles distillés avec soin, nul doute que le spectateur le plus pointu y trouvera son compte et davantage. La première scène d’action en plein désert de Jordanie débute par une citation explicite du célèbre raccord allumette/soleil levant du Laurence d’Arabie de David Lean, le combat entre Donnie Yen (la vraie star du film, incroyable en Zatoichi version Wu Xia Pan) et Hiroyuki Sanada entérine en un ballet étourdissant et fatal la complémentarité entre le chambara et le film de kung-fu, le personnage d’électron libre opportuniste incarné par Shamier Anderson s’impose comme le rejeton inattendu de Clint Eastwood et de Richard Roundtree, Scott Adkins se fend d’un hommage improbable à Sammo Hung et on croise même cette bonne vieille trogne de Clancy Brown, égal à lui-même en représentant inflexible et imposant de la Grande Table.
Alors, oui, on pourra toujours s’offusquer de la gratuité et de la vanité du projet de Chad Stahelski mais sa sincérité et sa virtuosité sont en revanche impossibles à mettre en doute.
Image
La galette UHD se décline en trois éditions éditions allant du collector avec goodies de rigueur (pièce officielle, crayon, carte de visite du Continental Osaka et un plan de Paris reproduisant la carte visible dans le film) au simple boîtier Amaray en passant par un steelbook, toujours accompagnée d’un blu-ray. Et en termes d’image, le 4K creuse sensiblement l’écart avec la haute-définition traditionnelle grâce au Dolby Vision, des couleurs plus riches, une définition irréelle de précision et un relief saisissant. Très soigné eu égard à une source de haut standard, le blu-ray reste dans le haut du panier mais ne fait pas toujours le poids face à son petit frère qui exploite jusqu’au plus infime détail toutes les possibilités offertes par la très très haute définition. Un disque de référence pour home cinéphiles exigeants.
Son
La différence se fait moins ressentir sur les pistes son avec des mixages en 7.1 quasiment identiques d’un format à l’autre. Les versions françaises se font un soupçon plus frontal et rentre dans le lard que des versions originales à la subtilité indiscutable. Mais le contrat action pétaradante est pleinement rempli dans les deux cas avec des basses ravageuses et une spatialisation qui donne le tournis lors de la scène de l’Arc de Triomphe avec des moteurs en surrégime qui virevoltent d’une enceinte à l’autre.
Interactivité
Pas de commentaire audio mais un making-of riche en images de tournage et découpé en une douzaine de featurettes durant toutes entre cinq et dix minutes. Tous les aspects du tournage sont abordés et révèlent une production minutieuse et complexe mais il faut toujours slalomer entre les innombrables propos promotionnels et l’enthousiasme surjoué de Keanu Reeves peut se révéler épuisant. Le clou du spectacle ? La préparation et le tournage de la longue fusillade entièrement captée en plongée par une caméra suspendue à un système de grue et de câbles et la scène de l’Arc de Triomphe (encore elle!) tournée sur un gigantesque parking en Allemagne combinée aux images tournées à Paris dans un mélange bluffant d’images de synthèse et de cascades bien réelles.
Liste des bonus
« Chad et Keanu », « L’entraînement d’un tueur », « Faire un carton », « Psychologie d’un tueur », « L’aveugle mène le combat », « Se mettre sur son 31 », « Faire mouche », « Un plan qui tue », « Tirer à la vitesse du trafic », « Un plan dans l’obscurité », « Devoir de mémoire », Bande-annonce.