IMMACULÉE
Immaculate – Etats-Unis – 2024
Support : Bluray
Genre : Horreur
Réalisateur : Michael Mohan
Acteurs : Sydney Sweeney, Simona Tabasco, Benedetta Porcaroli, Alvaro Morte, Niccolo Senni, Dora Romano, …
Musique : Will Bates
Durée : 88 minutes
Image : 85 16/9
Son : Français & Anglais DTS-HD Master Audio 5.1
Sous-titres : Français
Editeur : Metropolitan Film & Video
Date de sortie : 23 août 2024
LE PITCH
Cecilia, une jeune religieuse américaine, s’installe dans un couvent isolé de la campagne italienne. L’accueil est chaleureux, mais rapidement Cecilia comprend que sa nouvelle demeure abrite un sinistre secret et que des choses terribles s’y produisent…
Je Vous Salue Sydney, pleine de grâce
Radical, imprévisible et un brin pervers, Immaculée réconcilie le temps d’un film l’elevated genre façon Ari Aster et A24 avec la série B horrifique du samedi soir dans un hommage sincère et jouissif (un de plus!) au bis transalpin des années 70. Une franche réussite que l’affolante Sydney Sweeney (également productrice) porte avec un talent insolent sur ses jeunes épaules.
À 26 ans seulement, Sydney Sweeney, petite blonde plantureuse native de Spokane dans l’état de Washington (à ne pas confondre avec la capitale fédérale), semble sur le point de conquérir Hollywood. Des débuts à 13 ans dans The Ward, dernier long-métrage à ce jour de John Carpenter, des petits rôles dans les excellents Under The Silver Lake de David Robert Mitchell et Once Upon A Time in Hollywood de Quentin Tarantino, une notoriété qui se creuse pas à pas dans des séries aussi ambitieuses que The Handmaid’s Tale, Euphoria et White Lotus, une polémique éclair lorsque des ligues féministes lui reprochent de jouer les pin-ups en cuir noir et petite tenue dans le clip « Angry » des Rolling Stones, la reconnaissance de la critique avec le thriller politique Reality et une présence au générique du très nul Madame Web. Voici une petite liste (évidemment non exhaustive) des prestations de la belle, désormais engagée dans la production pour le grand écran aux côtés de son compagnon Jonathan Davino, un homme d’affaires d’une grande discrétion.
S’il manque encore un gros succès à son tableau de chasse pour que son nom s’impose auprès des studios, on ne peut que s’incliner devant des choix ambitieux et un goût certain pour le cinéma de genre. En témoigne Immaculée, étrange histoire d’une jeune novice américaine devenant contre son gré un objet de culte dans un couvent italien peuplé de religieuses flippantes et s’inscrivant sans complexe dans le sous-genre sulfureux et sacrilège de la « nunsploitation » (le film de nonnes, donc). De Ken Russell (Les Diables) à Jacques Rivette (Suzanne Simonin, la Religieuse de Denis Diderot) en passant par Jess Franco (Lettres d’amour d’une nonne portugaise, Les démons du sexe), Paul Verhoeven (Benedetta), le cinéma d’exploitations nippon (Le couvent de la bête sacrée, pour n’en citer qu’un) et toute une flopée de séries B (voire Z) italiennes confiées aux spécialistes Claudio Fragasso, Joe D’Amato ou Lucio Fulci, la figure de la religieuse, forcément sulfureuse, intrigue, inquiète et excite l’imagination de tous les mâles de la planète. Tout un héritage pas très catholique auquel Immaculée se frotte sans faire la fine bouche et avec une belle ferveur anti-cléricale.
Ave Maria, morituri te salutant
Déjà à la barre du thriller érotique The Voyeurs avec la même Sydney Sweeney, Michael Mohan joue ici sur deux tableaux. Côté pile, le cinéaste propose un hommage appuyé au cinéma bis italien des années 60 et 70 (ne serait-ce que par la présence au score d’un extrait du thème principal du giallo d’Emilio Miraglia La Dama Rossa uccide sette volte, composé en 1972 par Bruno Nicolai), usant de la langue de Dante Alighieri pour les deux tiers des dialogues et avec un tournage en Italie, dans la Villa Parisi, près de Rome, un lieu bien connu des cinéphiles puisque la bâtisse du XVIIème siècle servit de décor à Une Hache pour la lune de miel et La Baie sanglante de Mario Bava ou encore pour Du sang pour Dracula de Paul Morrissey. Un enrobage qui n’est pas seulement décoratif puisque Mohan n’hésite pas à verser dans un gore méchant et provocateur tout en laissant planer un érotisme quelque peu malsain. Enfin, que dire de ces nonnes qui enfile une cagoule rouge sang pour commettre leurs méfaits, le bout de tissu effaçant leurs traits et leurs yeux comme ce fut le cas pour le célèbre assassin de Six femmes pour l’assassin de … Mario Bava.
Côté face, Immaculée use et abuse d’un formalisme très contemporain, un travelling arrière à mi-parcours sur une Sydney Sweeney vivant bien mal la béatification imposée par son couvent forçant la comparaison avec le final de Midsommar d’Ari Aster. Le dernier plan, là encore très maniéré, avec son héroïne ensanglanté et en état de choc, longuement suivie en gros plan face à la caméra, pour mieux dissimuler un hors-champ monstrueux, fait écho aux prouesses stylistiques dont s’enorgueillissent les jeunes prodiges du moment. Sur le fond, Immaculée surfe sur l’air du temps, laissant infuser un propos très #MeToo au cœur d’un portrait au vitriol de l’église catholique, institution désuète et patriarcale, abusant de la naïveté des novices et du corps des femmes pour donner corps à des prophéties qui ne sont rien d’autre que des fables.
S’éloignant très vite du fantastique sataniste auquel le contexte et l’ouverture nous laissaient croire pour se diriger vers une variation vraiment bien vue sur les thématiques jadis développées par le foutrement nawak Ces garçons qui venaient du Brésil de Franklin J. Schaffner, Immaculée substitue au Dr Josef Mengele et à ses expériences de savant fou un prêtre latino dont le sourire trop aimable fait vite froid dans le dos.
Image
La photographie très douce, parfois laiteuse et onirique, d’Elisha Christian est ici restituée avec une fidélité absolue. Sauf lors des plans larges ou des survols de la campagne italienne, la définition s’accommode comme elle le peut de ce parti-pris esthétique qui voile très sensiblement les images et lisse les contrastes, laissant (à tort) le sentiment d’un master passé au réducteur de bruit.
Son
Impossible de différencier les deux mixages, avec des ambiances qui se déploient lentement comme un poison, des dialogues clairs et une piste musicale qui domine à l’avant. Bien dosé, le DTS-HD contribue pour beaucoup à l’atmosphère claustrophobe qui s’empare du spectateur dès les premières minutes.
Interactivité
Cette édition française a le bon sens de sous-titrer le commentaire audio du réalisateur Michael Mahon, lequel défend avec bonne humeur ces choix de mise en scène et rendant hommage à son équipe. Un bonus au rythme soutenu, sans redondances, parfaitement argumenté et sans langue de bois. Le genre de commentaire que l’on aimerait entendre plus souvent et qui fait oublier l’absence d’un making-of que l’on espérait pourtant.
Liste des bonus
Commentaire audio du réalisateur, Bande-annonce.