ILS SONT GRANDS CES PETITS
France – 1979
Support : Blu-ray
Genre : Comédie
Réalisateur : Joël Santoni
Acteurs : Catherine Deneuve, Claude Brasseur, Claude Piéplu, Jean-François Balmer, Eva Darlan, Mustapha Dali, Michel Such, …
Musique : Vladimir Cosma
Durée : 94 minutes
Image : 1.66, 16/9ème
Son : Français 2.0 Mono DTS-HD
Sous-titres : Français pour sourds et malentendants
Éditeur : Studio Canal
Date de sortie : 16 mars 2023
LE PITCH
Louise et Léo sont des amis d’enfance dont les pères respectifs, deux savants, ont mystérieusement disparu en mer. Ensemble, ils poursuivent les travaux de leurs parents et vont devoir faire usage de toutes leurs ressources pour s’opposer à un promoteur immobilier sans scrupules…
Dame perdue (et retrouvée)
Dans la filmographie prestigieuse de la grande Catherine Deneuve, les comédies populaires se font rares. Très rares même. Dommage car, comme elle nous le prouve à l’occasion d’Ils sont grands ces petits, obscure fantaisie signée Joël Santoni où elle partage l’affiche avec Claude Brasseur, la comédienne possède un véritable don pour l’humour et la légèreté.
Ils sont grands ces petits arrive au terme d’une décennie compliquée pour Catherine Deneuve. Les années 70 avaient pourtant commencé sous les meilleurs auspices avec les retrouvailles (réussies) avec Jacques Demy et Luis Buñuel pour Peau d’Âne et Tristana, respectivement. Mais, à l’exception du joli succès du Sauvage de Jean-Paul Rappeneau en 1975, le reste des projets auxquels la grande Catherine apporte son prestige et son talent témoignent des doutes et des difficultés de la star à mettre son image très « aristocratique » – un qualificatif réducteur mais qui lui colle cependant à la peau – au diapason d’une période où le cinéma traverse de profonds bouleversements. Ni sa parenthèse italienne (d’où émerge principalement le superbe Âmes Perdues de Dino Risi), ni son excursion hollywoodienne chez un Robert Aldrich en fin de carrière, ni sa filmographie à domicile ne lui apportent la même reconnaissance qu’au cours des années 60.
Dans ce contexte relativement difficile, il devient aisé de comprendre ce qui a pu la séduire dans le projet mené par le réalisateur Joël Santoni, les scénaristes Jean-Claude Carrière et Daniel Boulanger et le producteur Norbert Saada. Le résultat n’est sans doute pas une franche réussite mais le rôle de Louise sort de l’ordinaire et permet à Deneuve de se réinventer le temps d’un film. Elle y est la fille brillante d’un scientifique marginal (Yves Robert, en guest de luxe) disparu sans laisser de traces et dont elle poursuit les travaux sans espérer y trouver la richesse ou la célébrité mais tout simplement des réponses. Louise est un électron libre qui ne recule devant rien, ni personne et l’excentricité et la franchise du personnage permettent à Catherine Deneuve de se débarrasser de son jeu très maîtrisé au profit d’une prestation radieuse, sans artifices et franchement drôle.
L’école buissonnière
Narrant l’histoire de deux orphelins aux liens fraternels (et plus, si affinités) devenus des adultes cherchant à sauver leur toit des griffes d’un promoteur immobilier véreux, le film de Joël Santoni ne manque pas de cœur. Ni d’idées un peu folles puisqu’on y retrouve des expériences sur les sons et les ondes qui semblent sortir tout droit d’un album de Tintin, des braquages de banques réalisées à l’aide de boites de chocolats qui parlent et de modèles réduits radiocommandés, un robot à la fiabilité discutable nommé Manfred et de gentils émirs visionnaires. Le tout sous le soleil toujours bienveillant de la Côte d’Azur. Ajoutez à ce cocktail déjà bien secoué la gouaille de Claude Brasseur, le cabotinage millimétré et indémodable de Claude Piéplu, l’apparition éclair de Jean-Pierre Coffe alors bien loin des plateaux télé et des pubs Leader Price, une très belle musique de Vladimir Cosma (avec un thème principal joué à la guimbarde!) et un épilogue littéralement extra-terrestre et vous obtenez un film singulier et, dans les faits, impossible à détester.
Car oui, c’est indéniable, Ils sont grands ces petits ne ressemble à aucune des comédies françaises sorties à la même époque. Mais si le ton gentiment effronté et anarchiste de l’objet est séduisant, la forme a du mal à suivre. Futur maître d’œuvre de la série Une famille formidable sur TF1 avec Anny Duperey et Bernard Le Coq, Joël Santoni ne sait jamais vraiment dans quelle direction il souhaite mener son histoire ou le spectateur. En prenant pour cible la rapacité des magouilleurs de l’immobilier, il en oublie les enjeux principaux (deux orphelins à la recherche de leurs géniteurs) et enchaîne les péripéties sans se montrer réellement capable de les lier entre elles. Déjà handicapé par ce manque flagrant de cohérence qui invite à décrocher de temps à autre, le métrage souffre également d’une mise en scène en pantoufles, consciencieuse mais inodore.
Porté à bout de bras par ses acteurs et une écriture qui pioche avec bonheur chez Hergé, Franquin et Edgar P. Jacobs, Ils sont grands ces petits a de beaux arguments à faire valoir pour sa redécouverte mais sa mise en image décousue et paresseuse en limite malheureusement la portée.
Image
Comme pour le reste de la collection menée par Jérôme Wybon, le master d’Ils sont grands ces petits est issu d’une restauration récente. Sitôt passé un premier plan très granuleux et relativement terne qui témoigne de l’âge du film, le gain apporté par la haute-définition se fait évident avec une précision de tous les instants, des contrastes très stables et des couleurs très naturelles. Invisible en vidéo jusqu’à aujourd’hui, le film de Joël Santoni peut se féliciter de ce retour au premier plan.
Son
Nettoyé, le mono d’origine fait essentiellement la part belle aux dialogues et au score de Vladimir Cosma mais ne parvient pas toujours à restituer les ambiances complexes du laboratoire du personnage de Catherine Deneuve. Les ambiances et les effets sont donc assez limités. Un reproche qui s’adresse en réalité à un mixage très simple et sans ambition.
Interactivité
L’essentiel des éléments et des anecdotes nécessaires pour apprécier le film se retrouvent dans la présentation très concise mais exhaustive de Jérôme Wybon. Un reportage sur le tournage, centré sur les effets pratiques liés au robot Manfred, apporte un soupçon de nostalgie. Et c’est un Claude Brasseur très maniéré et carrément lunaire que l’on retrouve dans une interview promotionnelle d’époque pour la télévision belge. On pourrait trouver l’ensemble léger mais la simple présence d’une telle interactivité est assez miraculeuse pour un film aussi obscur.
Liste des bonus
Présentation du film par Jérôme Wybon / Reportage sur le tournage / Interview de Claude Brasseur.