HÉROS OU SALOPARDS
Breaker Morant – Australie – 1980
Support : Bluray & DVD
Genre : Drame
Réalisateur : Bruce Beresford
Acteurs : Edward Woodward, Jack Thompson, John Waters, Bryan Brown, Charles Tingwell
Musique : Divers
Durée : 107 minutes
Image : 1.85 16/9
Son : Anglais et Français en DTS-HD Master Audio 2.0
Sous-titres : Français
Editeur : Rimini Editions
Date de sortie : 11 août 2022
LE PITCH
Au début du XXème siècle, en Afrique du Sud, la guerre des Boers oppose les Britanniques aux ascendants des colons hollandais et allemands. Trois soldats appartenant au contingent australien, sous les ordres de l’état-major anglais, sont accusés d’avoir tué des prisonniers Boers. Le procès permet de revivre l’enchaînement des événements.
Soldats de plomb
Certainement l’un des films australiens les plus célèbres dans le monde au début des années, Héros ou salopards et ses trois soldats mis sur la sellette par une autorité british, avait mystérieusement disparu, ou presque, des écrans français. Inédit en vidéo chez nous, l’impair est rattrapé par Rimini Editions.
Proposition étonnante dans un cinéma australien qu’on avait le plus souvent tendance à limiter à la Ozploitation et aux batailles mécanisées dans un désert sauvage et futuriste, Breaker Morant (que l’on préfère largement à son titre français façon bis bourrin) s’intéressait de manière inédite et fine à un épisode particulier de l’histoire du pays. Un an avant le sublime Gallipoli de Peter Weir, il y était déjà question de soldats australiens sacrifiés, entrainés par l’ancien maitre anglais, et envoyés au casse-pipe sans reconnaissance réelle. Pire pour Breaker Morant et ses deux officiers, ils seront même jugés par la cour militaire pour avoir exécuté des ennemis dont un pasteur en guise de représentant. Deux seront exécutés, le plus jeunes écopera d’une incarcération à vie (il sortira finalement au bout de trois ans), mais tout trois surtout serviront de bouc émissaire aux tensions entre le Royaume-Uni et le cousin allemand, et de démonstration de bonnes dispositions pour s’efforcer de reprendre les pourparlers dans une guerre des Boers qui n’en finissait pas. Nous sommes au début du XXème siècle, en Afrique du sud, suivant le destin de trois soldats australiens dans un contexte politique et militaire très particulier, mais la volonté du film de ne jamais reposer sur la notion d’innocence ou culpabilité, lui prête une véritable hauteur universelle, faisant écho à des faits similaires durant la Première et la Seconde Guerre Mondiale (voir Les Sentiers de la gloire de Kubrick), au conflit au Vietnam (auquel les critiques américains firent souvent le lien) voir des guerre plus récentes.
Peloton bien exécuté
Film de procès bien plus que militaire, même si quelques très efficaces séquences d’action viennent relever le rythme, les accusés restent ici les révélateurs de la Guerre dans son horreur et son absurdité, dans sa faculté à transformer et briser les hommes, à gâcher des destins, mais aussi de l’appareil militaire, si prompt à dresser sa rigidité morale pour mieux en réécrire son propre code au mépris de la vie de ses propres hommes. Un tel sujet entraine forcément un certain académisme dans la construction, alternant mécaniquement les prétoires et les flashbacks, les faux espoirs et les petits arrangements dans les salons du pouvoir, mais le réalisateur Bruce Beresford (Miss Daisy et son chauffeur, Aux Frontières de la ville, Tendre bonheur) qui gagne ici au passage son passeport pour Hollywood, ne se laisse jamais submerger par l’émotion facile, le manichéisme ou la rigueur figée, s’appuyant avec pertinence à la fois sur l’atmosphère hors du temps de ces sublimes paysages lointains, et les prestations toute en subtilité d’excellents acteurs. Bryan Brown (F/X Effets de chocs, Cocktail, Gorille dans la brume…) et Edward Woodward (The Wicker Man, The Equalizer…) tout particulièrement, représentant l’un la fougue irrévérencieuse australienne, l’autre son honneur et d’une certaine façon sa mélancolie, qui prêtent des visages on ne peut plus humains aux évènements, jusqu’à leur exécution, superbe moment de plénitude brisé par les coups de feu.
Devenu culte en Australie, Breaker Morant y révéla à toute une génération un chapitre quelque peu oublié de son histoire et fit de son personnage principal un nouvel héros national. Il y a forcément quelque chose de très ironique en cela.
Image
Rimini propose une superbe copie de Héros ou salopard, inédit en vidéo chez nous et le plus souvent vaguement visible dans des conditions assez difficiles. Le travail de restauration est plus que manifeste avec un nettoyage quasi-complet des photogrammes, des cadres on ne peut plus stables et une palette de couleurs, chaudes et sombres, bien plus nuancée qu’autrefois. La gestion du grain semble avoir été un peu plus difficile cependant avec une matière très présente et légèrement fluctuante, mais qui donne aussi de bonnes sensations organiques.
Son
Mono d’origine disposé en DTS HD Master Audio 2.0, la version anglaise profite là aussi d’un rafraichissement bienvenu affirmant une transmission nette et claire avec une profondeur et une énergie parfois étonnante (l’assaut sur le fort). La version française n’est malheureusement pas du même bois comme le communique directement l’éditeur : « La version française trouvée pour cette édition présente un défaut technique : un ronflement permanent qui n’a pu être corrigé. N’ayant pu localiser d’autre source, et après avoir longuement hésité avant d’intégrer cette piste audio à cette édition vidéo, il a finalement été décidé de la conserver. »
Interactivité
Comme toujours Rimini bichonne les titres de son catalogue, produisant si besoin ses bonus en interne. C’est le cas ici avec un livret très complet à la fois sur le contexte historique, les anecdotes de production et la carrière de Bruce Beresford, mais aussi sur le disque proprement dit. On y trouve tout d’abord une interview inédite du réalisateur, qui raconte avec chaleur la naissance du film, son travail avec Edward Woodward, sa très difficile distribution ou le refus des distributeurs de le présenter pour une sélection à Cannes (ce qui heureusement finira par être la cas), l’ouverture vers les USA et la place prépondérante que garde aujourd’hui encore le film dans sa carrière. Inédite aussi la rencontre via visio (le débit ne devait pas être très bon) avec l’acteur Bryan Brown qui complète aisément les coulisses du tournage, souligne la mise en avant que sera le film pour leur carrière à tous, mais évoque aussi au passage l’âge d’or du cinéma australien.
Liste des bonus
Le livret « Des héros ou des salopards » écrit par Stéphane Chevalier (24 pages), « London Holyday » : interview de Bruce Beresford (inédit, 2022, 18’15”, VOST)
« I Remember » : interview de Bryan Brown (2022, 25’36”, VOST)
Bande-annonce (3’15”, VO).