GOLGO 13 : THE PROFESSIONAL
ゴルゴ13 – The Professional – Japon – 1983
Support : Bluray
Genre : Action, Thriller
Réalisateur : Osamu Dezaki
Acteurs : Tetsurô Sagawa, Gorô Naya, Toshiko Fujita, Kiyoshi Kobayashi, Reiko Mutô…
Musique : Toshiyuki Ohmori
Image : 1.85 16/9
Son : Japonais LPCM 2.0
Sous-titres : Français, anglais, portugais, allemand…
Durée : 93 minutes
Editeur : Tanuko
Date de sortie : Décembre 2023
LE PITCH
Duke Togo est Golgo 13, un célèbre tueur à gage réputé infaillible. Alors qu’il est engagé pour éliminer un parrain de la pègre sicilienne, Golgo 13 est traqué par une puissante organisation qui emploie de redoutables assassins.
L’œil du tueur
Un nouveau joueur entre dans la danse : Tanuko. Un éditeur tourné vers l’animation japonaise et qui s’impose d’emblée avec une superbe édition de Golgo 13 The Professionnal, classique brutal et noir de l’animation pour adulte. Un classique signé Osamu Dezaki, cinéaste trop méconnu mais dont les œuvres ont marqué de nombreuses générations.
Si le nom d’Osamu Dezaki est souvent étranger au grand public, le monsieur a pourtant clairement marqué les années 80 et 90 de son empreinte. Ancien du studio mythique d’Osamu Tezuka, il va rapidement s’imposer grâce à son adaptation du manga culte Ashita no Joe, puis en s’attaquant tous azimuts à des productions télévisées comme Jeu, Set et Match !, Rémi sans famille, Lady Oscar, L’ile au trésor et bien entendu le totalement culte Space Adventure Cobra (film et série). Une carrière de mercenaire, d’artisan stakhanoviste qui passe d’un genre à l’autre, d’un public à l’autre (on le croise aussi sur Blondine au pays de l’arc-en-ciel ou des séries purement comiques comme Ganso tensai Bakabon) qui lui a comme beaucoup interdit l’aura d’auteur. Pourtant, pour qui a vu ses créations et ses adaptations, le travail de réappropriation est évident, apportant souvent une étrange poésie noire aux récits les plus classiques, une intensité narrative sans commune mesure et surtout une stylisation assez unique. En ce sens un film comme Golgo 13 The Professionnal est parfaitement représentatif de sa méthode. Encore une adaptation d’une œuvre préexistante soit, mais pas n’importe laquelle puisqu’il s’agit là du manga culte de Takao Saitô, véritable institution au Japon depuis son lancement en 1968 et toujours détenteur du record de la plus longue série publiée (plus de 200 tomes et toujours en cours actuellement malgré le décès de l’auteur en 2021) et qui avait déjà connu deux adaptations live en 73 et 77. Un gros morceaux en sommes que ces aventures de Duke Togo assassin froid comme la mort, professionnel à l’extrême et enchainant les contrats dans un monde de l’ombre toujours en guerre, dont le film d’animation reprend le story-arc « Le piège de l’empereur » où le tueur est lui-même mis sur contrat par un magnat du pétrole dont il a assassiné le fils.
Killing in the name
Dezaki n’hésite pas à étoffer le récit en y insufflant d’autres trames secondaires autour d’engagements professionnels parralèles, multiple les concurrents en faisant apparaitre un sociopathe aux airs de serpents humains et deux jumeaux psychopathes increvables, et accentue considérablement les codes du manga, en particulier du coté de la violence et du sexe. Des aménagements qui ne sont rien à coté de son travail de mise en scène. Toujours accompagné de l’excellent designer et animateur Akio Sugino, il renoue nettement avec une esthétique décomplexée, maniériste et démonstrative du cinéma d’exploitation japonais des 70’s (de Teruo Ishii à la série des Femme Scorpion), n’hésitant pas même à se tourner vers les expérimentations pop d’un Seijun Suzuki (La Marque du tueur) pour aboutir à une forme de quintessence du genre. Les dialogues sont réduits à l’essentiel, la trame est limpide, les femmes se mettent à nu et les hommes tombent comme des mouches, et cette abstraction est emportée par la démultiplication des décadrages, des séquences en split-screen, des mouvements décomposées et de ces fameuses images dramatiques figées, illustrations peintes, qui ont déjà tant marqués les esprits sur ses épisodes de Cobra (entre autres). Ultra efficace et spectaculaire (le tir de sniper à travers deux bâtiments et une vitre blindée reste un très grand moment…), la mise en scène rivalise d’imagination, creuse ses atmosphères oppressantes de plans composites et d’effets de lumières réels parfois presque aveuglants, accentuant autant la violence sans phare du récit qu’une étrange mélancolie reflétant un monde où criminels, politiques et industriels, corrompent tout ce qu’ils touchent, même leur proche.
Sans pitié, ostentatoire souvent, mais définitivement élégant, ce Golgo 13 The Professionnel aux designs et à l’animation racée, est aussi entrée dans l’histoire pour être le premier film d’animation à incorporer de véritables images de synthèse. Pari assez bien réussi sur le générique d’ouverture très inspiré par James Bond, clairement moins sur la scène d’action finale où des hélicoptères tous lisses survolent une ville sans textures. Ce n’est qu’à ce moment là que le film se prend un petit, mais charmant, coup de vieux.
Image
Pour son premier essai, Tanuko propose une très belle copie de son film, particulièrement marquante au niveau de la tenue des couleurs et la fermeté des contrastes, mais aussi dans sa restitution vibrante et organique des matières. Un aspect important pour un ancien film d’animation japonais où trop souvent la source est lissée à l’extrême (façon Ninja Scroll pour les connaisseurs). Ici le grain de celluloïd persiste, accompagné de quelques points blancs et restes de taches encore perceptibles, prix sans doute à payer pour assurer la restitution des nombreux effets de collages et des jeux de lumières du métrage. Seuls les cartons titres des génériques se laissent aller à quelques glissements plus flous.
Son
La sobriété est ici de mise avec une piste japonaise mono délivrée sur une piste LPCM 2.0 on ne peut plus satisfaisante. Le son est clair, ferme et équilibré, avec une belle part laissée aux superbes musiques et chansons. Rien à redire.
Interactivité
Première sortie donc pour le jeune éditeur plein d’ambition Tanuko qui vise ici aussi bien le marché français que l’international (nombreux sous-titres sur le film et anglais systématique sur les bonus) avec un coffret franchement luxueux. Une sur-jaquette tout en jaune et à la ligne simple, un coffret cartonné contenant le mini mediabook, une carte lenticulaire et un mini livret aux airs d’Artbook… Forcément ça fait son petit effet. D’ailleurs l’éditeur ne se s’est pas contenté de glisser quelques images de croquis ou autres pour remplir le livret mais y a concocté un texte assez complet sur le manga original et la carrière d’Osamu Dezaki. Celui-ci est complété par les 12 pages piquées dans le mediabook pour le coup plus tourné vers une analyse du film proprement dit.
Enfin coté Bluray, on trouve avant le lancement du film une présentation enthousiaste de Philippe Bunel (Bakast), de longues galeries filmées de croquis des personnages et des accessoires, mais aussi deux éléments provenant de plus anciennes éditions. Une tout petite rencontre avec le producteur Mataichiro Yamamoto où il revient brièvement sur ses premières intentions, l’importance du manga, sa collaboration avec Dezaki et l’aura toujours intacte du métrage. Sympa mais un peu anecdotique à coté du long et passionnant (malgré quelques plages de silence) commentaire audio le réunissant avec le réalisateur. Une discussion décontractée où tous deux prennent manifestement beaucoup de plaisir à revoir le film, discutent du caractère des personnages féminins, de l’univers de Golgo 13, de certains choix esthétiques et bien entendu, non sans humour, des fameuses scènes en images de synthèse. Un vrai bon moment, informatif et distrayant… et entièrement sous-titré, belle tradition qui se perd d’ailleurs.
Liste des bonus
Livret de 76 pages, Livret media-book 12 pages, Carte lenticulaire exclusive, Commentaire audio du réalisateur et du producteur, Vidéo d’introduction par Philippe Bunel (4’), Interview du producteur (4’), Artworks Characters (43’), Artworks Settings (15’), Crédits de fin anglais (2’).