FROM BEYOND
Etats-Unis – 1986
Support : UHD 4K & Bluray
Genre : Horreur
Réalisateur : Stuart Gordon
Acteurs : Jeffrey Combs, Barbara Crampton, Ted Sorel, Ken Foree, Carolyn Purdy, Bunny Summers…
Musique : Richard Band
Image : 1.85 16/9
Son : Anglais et français DTS HD Master Audio 2.0
Sous-titres : 1.85 16/9
Durée : 85 minutes
Editeur : Sidonis Calysta
Date de sortie : 7 juin 2024
LE PITCH
Le Docteur Pretorius a inventé une machine qui permet de communiquer avec l’au-delà. Mais suite à un accident, son assistant est accusé de meurtre et n’a d’autre choix que d’activer à nouveau la machine. S’ensuivront de terribles conséquences.
L’expérience interdite
Si le cultissime Re-Animator connu bien deux suites officielles (The Bride of Re-Animator et Beyond Re-Animator signés Brian Yuzna), on peut se demander si sa véritable « suite » n’est pas ce From Beyond tourné l’année suivante. Un concept miroir pour une autre adaptation improbable d’un texte de Lovecraft où la comédie n’est plus là pour dissimuler la démence généralisée.
Devenu instantanément un classique du ciné bis et restant un délice d’humour noir et de délires macabres, Re-Animator fit les beaux jours de la firme Empire de Charles Band qui s’empressa naturellement de s’attacher par contrat le jeune réalisateur Stuart Gordon pour au moins trois nouvelles adaptations typées Lovecraft. Cela tombe bien, ce dernier très inspiré par les Edgar Allan Poe de Roger Corman avait effectivement imaginé créer ainsi une nouvelle collection de films d’exploitation tous tirées des textes de l’artiste maudit de Providence. Si l’anthologie n’existera jamais vraiment – le Dagon prévu pour être le second métrage ne verra finalement le jour qu’en 2001 et le projet Dreams in the Witch-House deviendra un épisode de la série Masters of Horror – From Beyond cultive bien évidement une importante filiation avec Re-Animator. Les copains Brian Yuzna (également producteur) et Dennis Paoli sont de retour à l’écriture, Richard Band se montre bien plus inspiré et développe une bande originale qui va au-delà d’un thème d’ouverture, l’équipe des effets spéciaux se reforme et profite d’un budget bien plus confortable et les têtes d’affiche Jeffrey Combs et la belle Barabra Crampton rempilent. Amusant d’ailleurs, leurs personnages inversent plus ou moins les rapports de force qui existaient dans Re-Animator, la jeune et jolie psychiatre Katherine McMichaels prenant totalement la main sur le récit faisant tout pour toujours pousser l’expérience exploratrice plus loin, là où le pauvre Crawford, frêle assistant que l’on devine amoureux et sexuellement refoulé subit les pires outrages et les transformations cruelles.
Le film halluciné
Mais quand Re-Animator cultivait farouchement un humour macabre particulièrement prononcé et une célébration de délires grand guignol, From Beyond se veut beaucoup plus sérieux et adulte. Succinctement adapté de la très courte nouvelle De l’au-delà (plus ou moins résumé dans le prologue du film), ce nouveau métrage plonge beaucoup plus généreusement dans les méandres des cauchemars Lovecraftien en s’efforçant de donner corps à un indicible, une monstruosité abstraite qui prendrait corps dans notre réalité à cause de l’invention du Dr Pretorious, scientifique dégénéré revenant sous la forme d’un shoggoth, créature métamorphe échappée du panthéon des grands anciens. Baignés dans des teintes roses et violettes comme un trip sous acide, ces incursions d’une dimension étrangère peuplée de bestioles flottantes, d’insectes voraces et de monstres phalliques dentées, tiennent alors autant des purs arguments du film d’horreur classique que d’une exploration presque cronenbergienne du rapport flou entre le corps et l’esprit, ou l’un transforme l’autre et vice-versa. Les effets de la fameuse machine sont donc aussi bis et spectaculaires que beaucoup plus insidieux allant titiller la glande pinéale pour libérer les pulsions sauvages et sexuelles de nos protagonistes comme dans une séance de psychanalyse par l’absurde : La psy si sage et renfermée se découvre une nouvelle passion pour le cuir et la domination, tandis que Crawford se transforme peu à peu en être glabre, chauve, dont s’érige fièrement une glande pinéal érectile au milieu de son front qui le pousse à dévorer les cerveaux en le suçant par le globe oculaire. Les transformations de la chair vont de pair avec l’effondrement psychologique des personnages et une plongée progressivement dans la folie, dans le cauchemar éveillé jusqu’à un grand final délirant, annonçant celui à venir du sidérant Society, où les chaires en forme de phallus suintants le slime s’entredévorent.
Tout en embrassant généreusement l’esprit démonstratif des films d’horreur des années 80, tout en faisant fi de sa nature de série B aux deux décors, From Beyond réussit à approcher comme rarement les aspects les plus dérangés de l’univers de Lovecraft. Un petit bijou du genre, profondément original et inspiré, qui tient la dragée haute à ce fameux Re-Animator qui lui fait finalement souvent de l’ombre.
Image
Proposée l’année dernière aux USA, ce tout nouveau master UHD a été produit par Vinegar Syndrome à partir d’un scan 4K des négatifs 35mm auquel ont été ajouté quelques inserts de scans de source positives pour reconstituer le Director’s cut. D’ailleurs même si ces éléments sont visibles, avec un rendu légèrement plus neigeux et moins pointu, ils s’insèrent à merveille dans l’ensemble, rejouant avec la même générosité une palette de couleur fortes et intenses. Les violets et rouges / rosés survenant lors des incursions de l’autre dimension bien entendu, mais la photographie est magnifiquement contrastée tout du long. La définition est redoutable autant sur les visages des acteurs, sur les environnements que sur les nombreux SFX physiques, le tout accompagné d’un piqué creusé et d’un grain vibrant et naturel. Exemplaire.
Son
Pas de trace ici du nouveau mix 5.1 glissé sur l’édition US. Pas bien grave le plus important est que la piste stéréo d’origine, en DTS HD Master Audio, soit bien présente. Restant relativement frontale et directe dans ses effets, la piste accompagne avec clarté les voix et joue sobrement de quelques dynamiques pour les séquences les plus intenses. A l’ancienne mais toujours nette.
Le doublage français d’époque se montre lui clairement plus en dedans, avec une distance plus marquée et une atmosphère écrasée… et comme le doublage est typique des DTV des 80’s, pas trop de regrets.
Interactivité
Sidonis Calysta inclue From Beyond dans sa collection de titres proposés au format Mediabook avec disque Bluray et DVD inclus, et un nouveau livret inédit en forme de making of signé Marc Toullec.
Les galettes elles contiennent quelques sympathique suppléments avec l’interview de Barbara Crampton qui revient sur le tournage du film (le plaisir de tourner en cuir, le rôle plus conséquent par rapport à Re-Animator et ses petites tensions à l’époque avec Jeffrey Combs…), une très courte rencontre avec le compositeur Richard Band qui réussit tout de même à livrer quelques infos sur sa méthode et bien entendu un entretien avec Stuard Gordon, entrecoupé d’une présentation publique du film, qui raconte par le menu les origines du film, sa passion pour l’œuvre de Lovecraft et n’hésite pas à remettre en avant son Dagon trop souvent oublié. On peut aussi revoir l’intéressant petit documentaire réservé aux effets spéciaux, « Monsters and Slime » où John Naulin, Gabe Bartalos et Anthony Doublin expliquent les diverses techniques utilisées pour les effets de maquillage et visuels et délivrent quelques anecdotes au passage, dont une belle épopée dans les hôpitaux italiens.
Enfin, l’aspect le plus important de l’édition est bien entendu de nous faire enfin profiter de ce fameux Director’s Cut (ce qui n’était pas le cas du Bluray précédent) avec ses 4-5 petites minutes supplémentaires de tripotages démoniaques, de cervelles dégustées et d’yeux recrachés… Les vrais amateurs apprécieront.
Liste des bonus
Le livret « Le Démon du sexe » écrit par Marc Toullec (48 pages), Interviews de Stuart Gordon (20’), Barbara Crampton (14’) et Richard Band (4’), Documentaire « Monsters and Slime : Les Effets spéciaux de From Beyond » (20’).