FREEJACK
États-Unis – 1992
Support : Blu-Ray & DVD
Genre : Thriller/Science-fiction
Réalisateur : Geoff Murphy
Acteurs : Emilio Estevez, Mick Jagger, Rene Russo, Anthony Hopkins, Jonathan Banks, Amanda Plummer…
Musique : Trevor Jones
Durée : 110 minutes
Image : 2.39 16/9
Son : Anglais et français DTS HD Master Audio 2.0
Sous-titres : Français
Éditeur : ESC Editions
Date de sortie : 23 août 2023
LE PITCH
Alex est un pilote de course. Victime d’un accident, il se réveille en 2009… Sa ville est devenue une jungle ou seuls survivent les hommes d’affaires. Grâce à la technologie, il est désormais possible de transférer un esprit dans un autre corps. Et Alex est poursuivi par un tueur pour servir de récepteur…
Il est libre Jack
On ne peut pas dire que Freejack ait marqué l’histoire du cinéma de science-fiction… Le film de Geoff Murphy sorti en 1992 n’a pas laissé un souvenir impérissable, et le redécouvrir aujourd’hui est intéressant sur bien des aspects…
Au mieux oublié, au pire concassé, Freejack n’a pas eu la destinée qu’il aurait certainement souhaité, celle d’un Blade Runner, voire, pour apparaître plus modeste, d’un Demolition Man, sorti quelques mois plus tard. Malgré des intentions louables, l’actionner d’anticipation de Geoff Murphy a fait l’effet d’un pétard mouillé avant de vite repartir dans les oubliettes. De fait, revoir le film près de trente ans après permet d’y voir plus clair sur les raisons d’un tel fiasco… En matière de cinéma d’anticipation, Freejack se place là, proposant un avenir pas si lointain (l’action se passe en 2009), mais marqué par la décrépitude, la lutte des classes et la violence. Rien de bien original en soi. C’est dans ce marasme ambiant que le personnage joué par Emilio Estevez, un pilote automobile casse-cou, se retrouve propulsé à la faveur d’une prouesse technologique dont on n’a toujours pas bien compris les tenants et aboutissants… Dès lors le film joue la carte de la découverte d’un monde nouveau, doté d’une direction artistique que l’on qualifiera d’assez compliquée, puisqu’il anticipe l’année 2009, avec force d’éléments tenant plus d’images caricaturales (les voitures comme des suppositoires géants) que d’une réelle vision pertinente et prophétique. Costumes, coiffures, décors ne respirent pas l’authenticité, et on a quand même un peu mal à croire à cette société « futuriste » dévastée (d’autant plus quand on l’a connu il y a une dizaine d’années). Reste une approche interessante, celle de la scission des riches et des pauvres, même s’il s’agit là aussi d’un trope du genre, globalement à peine effleurée… L’autre gros défaut de Freejack, concerne l’interprétation générale. Soyons clair : Emilio Estevez n’a jamais convaincu grand monde, et dans ce rôle de héros d’action qui s’ignore, ça passe très mal. Pas vraiment à l’aise dans le costume d’Action Man, il ne fait guère mieux dans les scènes de comédie. Face à lui, l’attraction du film, Mick Jagger, serre les mâchoires et lance deux ou trois punchlines, mais semble assez peu concerné par ce qui se passe. Ce qui est également le cas d’un Anthony Hopkins qui cachetonnait déjà à l’époque, lui aussi visiblement pas hyper ravi d’être là. Seule Rene Russo, en période pré Arme Fatale, tire son épingle du jeu.
Et la lumière fut !
Une fois la liste des principaux défauts établis, reste malgré tout de la place pour des éléments réellement positifs et qui font qu’on ne peut décemment pas balayer Freejack d’un revers de main. Difficile de condamner totalement cette série B un peu naze dans son scénario, mais au demeurant assez plaisante à suivre, il faut le reconnaître. Et cela, on le doit principalement à son réalisateur et à son équipe technique. Le cinéaste néo-zélandais Geoff Murphy avait terrassé son monde en 1983 avec le puissant Utu, qu’il avait également produit et scénarisé. Le Dernier Survivant (The Quiet Earth) sorti en 1985, confirmait les attentes placées en lui et Murphy était alors un réalisateur à suivre. Malheureusement, son arrivée aux États-Unis l’a cantonné à des projets médiocres et de plus en plus fragiles comme Youg Guns 2 (1990), Piège à grande vitesse (1995) ou encore Fortress 2 : Réincarcération (1999). Un parcours américain qui a tout du chemin de croix. Pourtant, à travers ces séries B de plus en plus anecdotiques, subsiste un véritable talent de mise en scène et la marque d’un artisan de qualité. Ce que vient confirmer Freejack. Le film dispose d’une patine visuelle assez remarquable dans le genre. Les scènes d’action sont dynamiques et efficaces. Avec son directeur de la photographie Amir Mokri (Man of Steel, Lord of War, mais aussi Bad Boys 2 et Transformers 3 et 4), Geoff Murphy fait état d’un vrai sens du cadre, les jeux de lumières sont assez chouettes, ce qui donne au film un vrai cachet, une gageure pas toujours évidente pour une série B d’action et de science-fiction. En cela, Freejack étonne et reste étonnamment agréable à voir trente après sa réalisation. Le film vieillit plutôt bien. Jusqu’à sa scène finale… Car on ne peut passer sous silence les effets spéciaux numériques du film, alors balbutiants, que le début des années 90 nous offrait avec la promesse du cinéma du futur (remember Le Cobaye de Brett Leonard). La séquence finale qui multiplie les effets d’images dignes d’une vidéo de présentation Playsation One, pique sérieusement les yeux, et vient anéantir la bonne impression globale du film. C’est dommage, mais en tant que série B, Freejack reste une honnête proposition, un peu concon sur les bords, mais qui vient surtout proposer, de façon certainement involontaire, un condensé des expérimentations visuelles les plus WTF du début des années 90. Rien que pour cela, pour l’implication de son réalisateur et pour sa belle facture technique, le film mérite un certain respect.
Image
Pas de doute, cette édition proposée par ESC vient clairement jouer dans la perception que l’on a aujourd’hui du film. Car la copie restaurée livrée ici est vraiment digne d’un triple A, et rend honneur à la facture technique du film. Les jeux de lumières sont saisissants, les contrastes bien gérés, y compris dans les scènes nocturnes. On redécouvre le film dans des conditions parfaites pour le réévaluer.
Son
Pas de 5.1 proposée ici, mais du 2.0 pour les deux pistes, et franchement, le résultat n’en pâtit pas. Cependant, on préférera largement la version originale, plus dynamique que son homologue française, avec des effets sonores (explosions, tirs) qui crépitent d’un peu partout et des dialogues bien mis en avant. La VF est quant à elle plus en retrait sur tous les points.
Interactivité
Il fallait bien un spécialiste de la trempe de Philippe Manoeuvre pour évoquer les différents rôles de Mick Jagger au cinéma. Un parcours de la carrière sur grand écran du leader des Stones plutôt intéressant et bien documenté, qui vient démontrer cependant que l’artiste est quand même bien meilleur sur scène que devant une caméra. Second bonus, le point de vue de François Cau, journaliste à Mad Movies, sur le film. Une évocation pertinente qui réévalue et réhabilite à juste titre cette série B, sans pour autant faire passer des vessies pour des lanternes. On ne peut être que 100 % d’accord avec lui.
Liste des bonus
Mick Jagger au cinéma avec Philippe Manoeuvre (22’) ; Le film par François Cau (21’) ; Bande-annonce du film.