ET VIVA LA RÉVOLUTION !
Viva la muerte… tua ! – Italie, Espagne, Allemagne – 1971
Support : Bluray
Genre : Western
Réalisateur : Duccio Tessari
Acteurs : Franco Nero, Eli Wallach, Lynn Redgrave, Horst Janson, Eduardo Fajardo, José Moreno…
Musique : Gianni Ferrio
Image : 1.85 16/9
Son : Italien, anglais et français LPCM 2.0
Sous-titres : Français
Durée : 103 minutes
Editeur : BQHL Editions
Date de sortie : 04 avril 2024
LE PITCH
Un prince russe, un bandit mexicain et une jeune Irlandaise se rencontrent au Mexique. Les deux hommes sont à la recherche d’un trésor, tandis que la jeune femme veut participer à la révolution.
Le faux-prêtre, le truand et la cloche
Le réalisateur d’Un Pistolet pour Ringo s’attaque cette fois-ci au western zapata. Dans le décorum du Mexique écrasé sous la botte de la dictature, le temps n’est bien entendu pas aux grands idéaux, mais à la farce et à la quasi-parodie, servies par les pointures Franco Nero et Eli Wallach. Hé, tant qu’à faire.
Dans la famille du western spaghetti, je demande le western zapata, ce rejeton souvent ultra politisé où les révolutions d’Amérique du Sud se mêlent avec les souvenirs d’une Italie fasciste et les revendications contemporaines de la jeunesse européenne. El Chuncho, Colorado, Companeiros… Mais comme rien n’est jamais sacré en Italie, son chemin a rapidement croisé celui, tout aussi florissant, de la comédie western définitivement entérinée par Trinita. Le chant du cygne approche à grand pas, mais l’industrie italienne bas son plein et permet au réalisateur Duccio Tessari de revenir à nouveau au western après La Chevauchée vers l’ouest, Le bâtard, Le Retour de Ringo et surtout le plus mémorable Un pistolet pour Ringo, marquant déjà son amour pour le détournement de genre et la comédie bon enfant. Avec Et Viva la révolution ! il ne fait ni plus ni moins que ce qu’il faisait déjà sur cet excellent divertissement avec Giuliano Gemma, ou encore quelques années plus tôt avec le péplum Les Titans, c’est-à-dire piocher à droite à gauche les ingrédients les plus marquants, les plus fructueux, et les réunir dans un divertissement pas prise de tête et maniant ouvertement le second degré. Clairement, le scénario du film en présence est ni plus ni moins qu’un croisement très visible entre Le Bon, la Brute et le truand de Sergio Leone et de El Merconario de Sergio Corbucci. Un sentiment d’autant plus envahissant que notre brave Eli Wallach reprend dans les grandes lignes les traits de la fripouille Tuco et que Franco Nero troque le mercenaire polonais pour un ex-prince russe se cachant sous la défroque d’un prêtre.
Mais qu’est-ce qu’ils viennent foutre au milieu de cette révolution ?
L’idée est donc bel et bien de faire une parodie, de jouer avec les attentes et les connaissances des spectateurs, obligeant donc à y ajouter une bonne couche de personnages caricaturaux ou improbables comme un général mexicain fielleux à souhait joué par l’habitué Eduardo Fajardo, un shérif en armure (Horst Janson, soit le futur Capitaine Kronos) et même une journaliste féministe et révolutionnaire franchement casse-couille, mais habile de ses poings, permettant à la belle sœur de Franco Nero, Lynn Redgrave, de faire un petit détour par le cinéma. Et tout ce joyeux monde se tire alors la bourre, multiplie les tromperies, les trahisons, les traquenards et les couteaux dans le dos dans l’espoir de mettre la main sur un trésor dont la carte est tatouée sur les fesses d’anciens soldats, d’éviter de se faire fusiller et pourquoi pas de lancer une véritable révolution en cours de route. C’est certainement grâce à cette joyeuse troupe que l’on s’amuse beaucoup dans Et viva la révolution !, petit western qui convainc toujours plus par ses joutes verbales et par ses échanges de grosses baffes, que par ses gunfights relativement statiques et peu imaginatifs. Alors qu’il tourna la même année le giallo Un papillon aux ailes ensanglantés, nettement plus sophistiqué, Duccio Tessari ne fait pas preuve ici d’une grande inspiration livrant une mise en scène. Franchement plan-plan, parfois même un peu molle, elle est aussi impactée par de curieux choix de montages, soit trop lestes ou trop cuts, qui semblent même déstabiliser les compositions enjouées de Gianni Ferrio (La Mort caresse à minuit, Big Guns…) qui ne savent plus parfois où commencer et ou finir.
Petit western sympathique, Et viva la révolution ! ne se préoccupe bien entendu bien peu des réflexions politique habituelles du western zapata, préférant rester tranquillement installé dans les rails du divertissement sans prétention. Forcément si on le compare à l’Il était une fois la révolution de Sergio Leone sorti la même année…
Image
Les éditions de Et Viva la révolution ! ne sont pas légion. On trouve ainsi une galette en Espagne, une autre en Allemagne, mais jamais du coup avec un travail de restauration extrêmement poussé ou à la hauteur des récentes reprises 2K et 4K d’autres classiques du western italien. Ici il s’agit donc bien d’une remasterisation effectuée à partir d’une copie vidéo plus datée, retravaillée essentiellement avec l’utilisation de quelques filtres de nettoyage (plutôt efficace) et d’autres de dégrainages et d’homogénéisation. Si de prime abord l’image finale peut se montrer très satisfaisante grâce à son traitement de la lumière et de la couleur, ses limites sautent vite aux yeux avec une définition relativement terne, un grain lissé et des plans sombres bruités. C’est toujours mieux que le DVD sorti en 2011 mais il reste une belle marge de progression.
Son
Le film est proposé dans trois pistes sonores. La version anglaise qui correspond plus ou moins à la version de tournage et qui malgré une interprétation un peu plate garde assure une restitution efficace. La version italienne bien mieux caractérisée et dynamique. Et enfin la version française, d’origine et donc assez savoureuse, mais qui souffre de quelques disparités (dont une grosse coupure nette) et d’un grésillement constant.
Interactivité
BQHL confie la présentation du film à Jean-François Giré, auteur du livre Il était une fois… le western européen qui s’octroie plus d’une quarantaine de minutes pour retracer plus longuement les débuts du western zapata, l’apparition de la comédie western, les codes et détournements du genre avant de se concentrer plus sérieusement sur le film en question. L’intervenant prend d’ailleurs très souvent la défense de ce film souvent boudé par la critique, soulignant les excellentes interprétations du casting, la jovialité du spectacle et bien entendu le style décalé de Duccio Tessari.
Liste des bonus
Interview de Jean-François Giré, auteur du livre « Il était une fois… le western européen » et réalisateur du documentaire « Sergio Leone, une Amérique de légende » (46’).