ENTRETIEN AVEC ALEX, CRÉATEUR DE ROBOTO FILMS
Japanese Dreams
Ce n’est pas tous les jours que nous avons le plaisir d’accueillir un nouvel éditeur sur le marché de la vidéo. Roboto Films se veut un des futurs acteurs sur qui il faudra désormais compter pour tout fan du cinéma asiatique et du cinéma japonais en particulier. A l’occasion de la sortie de ses deux premiers opus Violent panic : The Big Crash et Shogun’s Samourai, Alex, son fondateur nous répond sur le pari de se lancer dans l’édition. Et lorsque l’on découvre le produit fini, on ne peut que le féliciter et lui dire toute l’impatience que nous avons de voir les prochaines sorties. Il a mis la barre haute… très haute.
Comment est venue l’idée de vous lancer dans l’Édition ?
C’est un projet auquel je réfléchis depuis de nombreuses années. J’ai toujours été fasciné par le monde de l’édition : la définition de collections, de repères visuels, la cohérence éditoriale, la façon de communiquer… Chaque éditeur a sa propre approche des choses et c’est très intéressant à regarder. En parallèle de ça, je suis amateur de cinéma asiatique depuis de nombreuses années, en particulier le cinéma japonais. Cela faisait très longtemps que je voulais me lancer, et j’ai enfin franchi le pas. J’en suis ravi !
Lorsque l’on voit la qualité de vos éditions, vous avez de l’expérience dans le domaine ?
Concernant l’édition proprement dite : non, je n’ai aucune expérience. Et pour être transparent ça m’a mis des bâtons dans les roues au début. On ne me prenait pas au sérieux car on me voyait “juste” comme un amateur de films qui ne prenait pas la mesure de ce que ça impliquait. Mais j’avais réfléchi à tout ce que je pouvais en amont, je savais dans quelle direction j’irais, là où seraient mes forces et mes faiblesses. Et j’ai essayé de combler les lacunes en me formant ou en m’entourant de personnes plus compétentes que moi sur certains sujets.
Par contre, même si je n’avais pas d’expérience dans le monde de l’édition, j’en ai dans la gestion de projet, la communication, un peu de marketing, comptabilité… Mon niveau d’anglais est satisfaisant. Ce sont aussi des qualités qu’il faut avoir pour se lancer dans l’édition.
Ouvrir vos produits, c’est le souvenir madeleine de Proust des films labellisés HK et Wild side. Des menus animés, de la sérigraphie, sur les disques et les pochettes, un livret des plus instructif…
Merci beaucoup. Pour moi il était important que l’objet soit à la fois beau et complet. C’est un vrai pari car évidemment plus l’objet est beau et rempli de bonus (écrits ou vidéos), plus il coûte cher et augmente donc les risques. Mais je suis convaincu que les amateurs de ce genre de films préfèrent cette option-là. Les premiers retours vont dans ce sens.
Comment se passe la restauration de l’image et du son ?
Jusqu’à maintenant j’ai eu de la chance : les deux premiers films étaient restaurés depuis peu et la qualité était là sans devoir y revenir. Ce sera pareil pour Gamera qui a été restauré en 4K il y a quelques années. (Et attention, les visuels sont à tomber- Note de l’interviewer). Great Jailbreak est légèrement en dessous mais reste tout à fait honorable, et personne ne l’a vu dans ces conditions hors du Japon (et encore).
Comment on convainc le CNC de participer à l’aventure ?
Je ne peux pas encore vous le dire, nos premiers titres passeront en commission prochainement. Je saurai donc si nos éditions ont retenu leur attention ou pas, mais je suis plutôt confiant.
Le CNC a quelques critères comme la ligne éditoriale, la distribution, le fait que le film ait déjà eu (ou pas) une aide par le passé, la qualité du film entre évidemment en compte mais c’est plus subjectif.
Pareil pour les participants, il y a du joli monde dans la partie Bonus. Il a fallut jouer de votre charme pour les convaincre !
C’était une bonne surprise du démarrage : tous ceux que j’ai contacté ont accepté de participer à l’aventure. Ils ont tous fait un travail remarquable et je leur serai toujours reconnaissant de bien avoir voulu aider une petite maison d’édition comme Roboto.
Quel est objectif de votre ligne éditoriale ?
Dans les grandes lignes c’est soit apporter de l’inédit, soit proposer une édition avec une plus-value importante en termes d’image et de son par rapport à une sortie précédente. C’est ce qu’on retrouve avec les deux premières vagues annoncées : un produit totalement inédit (et même en première mondiale en blu ray) et un autre dans une qualité bien supérieure grâce au format blu ray et aux restaurations.
Le côté “passeur” est vraiment important pour Roboto. Je sors des films que j’aurais adoré voir mais qui ont peu de chance de sortir autrement. Quelque part j’essaye de reprendre, à ma très petite échelle, un peu la philosophie des HK ou Wild Side des années 2005/2010.
Vous comptez rester uniquement sur le cinéma japonais ?
Pendant un certain temps oui. C’est là où je suis le plus à l’aise et je ne veux pas m’éparpiller car je fais ça en plus de mon boulot actuel. Si je multiplie les contacts, pays etc ça deviendra compliqué. Mais je pense élargir un peu les horizons à partir de la troisième année. Il y a tellement de choses que je voudrais sortir juste côté japonais que je pourrais tenir 10 ans comme ça.
Il y a 1000 exemplaires pressés, combien voulez-vous en vendre pour que ce soit viable ? A l’image de Spectrum, vous ne comptez pas en refaire une fois épuisés ?
Tout dépendra du succès (ou non) des titres. Si les 1000 exemplaires partent en moins d’un an il y aura clairement des éditions simples (boitier plastique, sans livret) à prix budget. Beaucoup de personnes seraient intéressées pour voir mes films, mais ne franchiraient le pas que pour une quinzaine d’euros, ce que je comprends tout à fait. Par contre les éditions initiales sont bien limitées à 1000 exemplaires.
Qu’est-ce qui vous différencie d’éditeurs comme Spectrum ou HK pour rester dans le même milieu ?
Je pense que c’est le terrain filmique. Aujourd’hui, les films japonais de patrimoine sortent au compte-goutte chez Carlotta, Le Chat qui fume ou Badlands. Des réalisateurs comme Gosha, Fukasaku, Kudo, Okamoto ou même Kobayashi sont très très peu représentés. C’est la même chose pour le tokusatsu ou il n’y a quasiment rien de disponible en France.
L’offre de Roboto est réellement complémentaire de ce qu’on peut trouver chez Spectrum ou HK.
Pourquoi le nom de ROBOTO ?
Je ne sais plus exactement mais à l’époque où je cherchais un nom, je revoyais la série Densha Otoko dont le générique est “Mr Roboto” de Styx. Ça sonne bien à la fois en japonais et en français, et ça ne sonne pas (je pense) cliché. Je voulais absolument éviter un truc à la “Katana films”.
Quid de la distribution en ligne, en magasin ?
Aujourd’hui nos films sont disponibles chez Metaluna, Gibert Joseph, Potemkine, la Librairie du 1er film et quelques autres boutiques. Je suis ravi de savoir que mes films sont trouvables en magasin, c’est très important pour moi. Je suis prêt à travailler avec tous les points de vente qui le souhaitent, du moment que je ne dois pas passer par un distributeur.
Vous pouvez nous en dire plus sur l’avenir de votre Line-up ?
Il y a des projets assez dingues qui arrivent pour les vagues 3 (octobre/novembre) et 4 (idéalement pour noël, mais ça va être tendu). J’espère qu’ils trouveront leur public car on va aller sur des terrains soit très peu représentés, soit totalement inconnus en France. Si ces projets marchent, ça montrera qu’on peut aller dans des niches très particulières, et j’ai vraiment envie d’aller chercher ce genre de films. En parallèle, la collection Gangsters initiée par Violent Panic : The Big Crash et Great Jailbreak continuera en parallèle.
Un grand merci pour toutes ces infos !
Hâte de découvrir les prochaines sorties, et je sais que nous ne sommes pas les seuls au vu des formidables retours. Longue vie aux produits physiques !!!