ENQUÊTE SUR UN SCANDALE D’ÉTAT
France – 2022
Support : Bluray
Genre : Policier
Réalisateur : Thierry De Peretti
Acteurs : Vincent Lindon, Roshdy Zem, Pio Marmaï, Julie Moulier
Musique : Aucun
Durée : 116 minutes
Image : 1.33 16/9
Son : Français DTS HD Master Audio 5.1 et 2.0
Sous-titres : Aucun
Éditeur : Pyramide
Date de sortie : 28 juin 2022
LE PITCH
Octobre 2015. Les douanes françaises saisissent sept tonnes de cannabis en plein cœur de la capitale. Le jour même, un ancien infiltré des stups, Hubert Antoine, contacte Stéphane Vilner, jeune journaliste à Libération. Il prétend pouvoir démontrer l’existence d’un trafic d’État dirigé par Jacques Billard, un haut gradé de la police française. D’abord méfiant, Stéphane finit par plonger dans une enquête qui le mènera jusqu’aux recoins les plus sombres de la République.
Révélations
Après Boite Noire sortie l’année dernière, le thriller français confirme sa très bonne santé avec Enquête sur un scandale d’état, réalisé par Thierry De Peretti qui, après avoir traité de la pègre Corse dans ses deux premiers films (Les Apaches et Une Vie Violente), nous plonge ici dans une enquête journalistique sur les trafics de drogue entre la France et l’Europe et le visage caché de la brigade des stups française dans ce combat.
Même si le panneau d’ouverture du film nous indique que cette histoire ne reflète pas forcément la réalité des faits tels qu’ils se sont déroulés, le scénario est bel et bien tiré d’une histoire vraie. C’est celle de la rencontre entre un journaliste de Libération, Stephane Vilner et un homme, Hubert Antoine, qui va lui avouer son rôle d’infiltré pour la brigade des stup au sein des plus gros trafics de drogue entre la France et l’internationale, et les sombres affaires de corruption qui remontent jusqu’aux plus hautes sphères de l’agence française de lutte contre les stupéfiants. Ces entrevues qui sont devenues des articles puis un livre, L’Infiltré, ont donc servies de base pour Thierry De Peretti et sa scénariste Jeanne Aptekman pour établir la base du scénario de Enquête sur un scandale d’état.
Si les entretiens entre Stephane (le toujours excellent Pio Marmaï) et Hubert Antoine (Roshdy Zem dans ce qui est surement l’une de ses meilleures interprétation) sont au centre du film, c’est bien le personnage de Hubert qui cristallise toutes les attentions notamment celle du spectateur. Nous plaçant du point de vue de Stephane, il est impossible de ne pas être fasciné par cette figure à la fois mystérieuse et volubile, qui peut passer de l’amicalité à la colère en l’espace d’une seconde, qui connait les secrets les plus sombres de l’Etat français et peut au détour d’une phrase, balancer une bombe tellement énorme qu’il est impossible de ne pas vouloir y croire. Une croyance fragile, qui sera le principal moteur du personnage de Pïo Marmaï (et de sa rédaction envers lui) mais sera constamment remise en question par d’autres ou même directement par le comportement d’Hubert lui-même.
Citoyen au dessus de tout soupçon
Même quand le journaliste n’est pas présent avec lui, les scènes mettant en scène Hubert sont là pour questionner sa sincérité, à l’image de la scène d’introduction qui le voit déambuler dans une maison luxueuse totalement vide, comme un intrus, et se joindre à un trafic sans que personne ne prête vraiment attention à lui. Une scène principalement silencieuse qui joue très habilement avec l’hors-champ pour attiser l’attention et qui annonce que le film sera aussi raconté au travers de la mise en scène, et celle-ci prend une forme plutôt surprenante au premier abord.
La première chose qui saute aux yeux lorsque le film démarre, c’est son format. Thierry De Peretti a en effet opté pour un format 1.33, donc une image carrée. Un format plus vraiment utilisé de nos jours mais qui fait parfois des réapparitions ponctuelles (on l’a vu l’année dernière dans la Snyder’s cut de Justice League) et qui, ici, n’est pas seulement utilisé comme un caprice esthétique mais comme un vrai parti pris de mise en scène. En effet, loin d’une volonté de faire plus « vrai » le réalisateur a utilisé ce format comme une représentation cinématographique de la situation dans laquelle se trouve les personnages du film. De l’aveu du réalisateur, ce format permet aux spectateurs de se concentrer sur la profondeur de l’image plutôt que la largeur, comme ce que nous dit le scénario : la sombre vérité de ces affaires est devant nous mais cachée, il faut fouiller pour le trouver. La plongée du personnage de Stephane dans les témoignages de Hubert Antoine, et le danger qu’elle représente, la montre cernée par les bords du cadre. Les jeux de prises de pouvoirs entre Hubert et Jacques (Vincent Lindon très convaincant en policier politicien) font qu’ils seront toujours filmés au centre de l’image pour signifier leurs positions respectives dans l’échiquier (à contrario Stephane est souvent en retrait dans sa position d’auditeur) et le format carrée fait que la caméra va souvent faire des aller retour entre deux personnages qui discutent pour les séparer malgré leur proximité.
Enquête sur un scandale d’état coche toutes les cases de l’excellent thriller (et film tout court), les acteurs sont tous excellents et donnent vies et corps à des personnages complexes, fascinants et attachants, le scénario reste constamment clair malgré la somme conséquente d’information balancée parce que c’est la base de la relation entre Stephane et Hubert (et c’est ce que nous sommes venu voir, des révélations), tout ça illustré par la mise en scène extrêmement efficace de Thierry De Peretti.
Image
Transfert HD sans ombrage forcément avec une restitution minutieuse qui reste au plus près du rendu réaliste de la photographie d’origine. Le format 1.33 marque clairement sa différence et donne à la fois un encadrement plus présent et une profondeur plus creusée. La définition est pointue et les teintes maitrisées de bout en bout.
Son
Proposé en DTS HD Master Audio 5.1 et en 2.0 la version originale du film (en français donc) est marquée dans les deux cas par un mixage parfois un peu étrange entre les ambiances et les voix, laissant ces dernières s’effacer légèrement et provoquant quelques sautes de niveau. Volonté du réalisateur ou faiblesse technique ? Il faut parfois jouer un peu de la télécommande…
Interactivité
Pas de making of ici ni de rencontre avec les acteurs, l’interactivité reste concentrée sur le dispositif narratif et le mélange fiction / document qui caractérise tout le film. Une balance entre le réel et le dramatisé qui occupe une bonne part du commentaire audio réunissant le réalisateur et la chef opérateur Claire Mathon (Portait de la jeune fille en feu), qui évoquent aussi la direction d’acteurs, le choix des décors, du cadre et des lumières. Plutôt intéressant donc tout comme la poignée de scènes coupées (enfin surtout dans leurs versions plus longues et brutes) pour lesquels de Peretti se fend d’une longue présentation pour revenir justement sur un tournage travaillant essentiellement les longs plans séquences. Reste enfin une rencontre inédite avec le journaliste Emmanuel Fantsen à l’origine de l’affaire qui discute autant sa collaboration avec l’équipe du film que le point de vue plus nuancé du réalisateur sur les détails de l’enquête.
Liste des bonus
Commentaire audio de T. de Peretti et Claire Mathon, scènes coupées avec présentation, Discussion avec le journaliste Emmanuel Fantsen.