ELECTRIC DREAMS
Royaume-Uni, Etats-Unis – 1984
Support : Bluray & DVD
Genre : Science-Fiction
RĂ©alisateur : Steve Barron
Acteurs : Lenny von Dohlen, Virginia Madsen, Bud Cort, Maxwell Caulfield, Don Fellows, Alan Polonsky, Wendy Miller…
Musique : Giorgio Moroder
Image : 1.85 16/9
Son : Anglais et français DTS HD Master Audio 2.0
Sous-titres : Français
Durée : 95 minutes
Editeur : ESC Éditions
Date de sortie : 09 octobre 2024
LE PITCH
Miles Harding est architecte et travaille à la création d’un nouveau type de briques résistantes aux tremblements de terre. Pour l’aider dans son travail, il décide d’acquérir un ordinateur dernière génération. Mais celui-ci se retrouve doué de la pensée et de sentiments comparables à un être vivant. En parallèle, Miles fait connaissance avec sa nouvelle voisine, la charmante Madeline, joueuse de violoncelle. Un triangle amoureux va opposer Miles et son ordinateur pour la conquête de Madeline.
La belle et l’ordinateur
Grande décennie de l’invasion technologique, les 80’s n’auront eu de cesse de questionner cette révolution informatique en marche, ses promesses et ses dangers. Jusqu’au sein d’une simple comédie romantique entre un jeune architecte, une belle musicienne et… un ordinateur. De la pure science-fiction presque illuminée en 1984 devenu aujourd’hui notre quotidien. Étonnant.
Régulièrement désormais rangé dans le grand tiroir fourre-tout des œuvres cultes, Electric Dreams n’aura effectivement pas vraiment rencontré le succès escompté à sa sortie première. Produit entre la MGM et la société Virgin de Richard Branson, le film voulait surfer comme beaucoup de teen movies et popcorn de l’époque sur une bande originale très à la mode avec les participations de Culture Club et Heaven 17, mais surtout conçue et composée par Giorgio Moroder. Mais sa sortie tardive et chaotique n’aidera finalement en rien celle du film. Coup manqué donc surtout que les critiques ne seront pas forcément des plus tendres, soulignant à raison une romance et des personnages ni vraiment convaincants ni passionnants. Si la jeune Virginia Madsen (Dune, Candyman…) apporte beaucoup de lumière et de légèreté à l’ensemble, Lenny Von Dolhen avec sa voix trainante et ses airs de Thierry Lhermitte dans Le Père Noël est une ordure, manque effectivement de charisme et de présence. Surtout, leur histoire d’amour, jamais vraiment creusée, jamais habitée (quid de ce collègue de Madeline avec qui elle se bécote un temps ?) n’impose pas un rythme des plus palpitants et des éléments romantiques particulièrement décoiffants. Une rom com classique, téléphonée et oubliable qui n’intéresse pas vraiment le réalisateur, Steve Barron, futur réalisateur des Tortues Ninja et de Coneheads, mais alors surtout connu pour être l’une des signatures incontournables des grands clips de l’époque, avec entre autres un Billie Jean de Michael Jackson resté dans l’histoire (mais Bowie, Culture Club, a-Ha et plein d’autres suivront). Le film lui a manifestement été confié pour cette proximité avec le monde de la musique et chacune des chansons du disque à venir sont mises en scène comme autant de clips indépendants, allant du patchwork classique de l’Americana (le final Together in Electic Dreams où on s’attend à voir débarquer le logo Coca Cola), au montage romantique à forts ralentis ou le délire plus futuriste mêlant animations, balbutiements de 3D et électronique. Un savoir-faire évident, mais pour des scènes souvent trop longues et désincarnées.
Un mouton électrique, deux moutons électriques…
Certainement pas une grande réussite donc, et pourtant Electronic Dreams exerce un certain pouvoir de fascination. Pour son identité purement 80’s et la petite nostalgie que cela peut véhiculer certainement, mais aussi et avant tout pour son traitement totalement inédit et franchement visionnaire de l’outil informatique. Une technologique alors encore balbutiante et présenté au début du film comme un vaste continent à découvrir, mais qui déjà prend ses marques dans la maison du héros, contrôlant rapidement tous ses appareils ménagers, la sécurité de sa porte, ses programmes télévisés et ses communications. Prenant peu à peu vie par suite d’un accident de surchauffe, l’ordinateur répond ensuite au nom de Albert, comme d’autres s’appelleraient Siri, s’insinuant dans la vie de son propriétaire, à la fois serviteur docile et espion. Visionnaire, le scénario de Rusty Lemorande (Yentl, Captain Eo) perçoit déjà les dangers de la domotique et annonce les débats actuels autour de l’émergence de l’IA. L’une des séquences les plus troublantes aujourd’hui étant celle où Albert pioche allègrement dans sa base de données d’images et de son, pour donner naissance à son propre tube électro en guise de déclaration d’amour à la belle Madeline. Ni plus ni moins que tout le process que les IA génératives comme Midjourney et compagnie pratique aujourd’hui.
Sans excès spectaculaires, sans délires paranos ou prosélytiste, mais beaucoup de justesse, Electric Dreams capte le futur avec quarante ans d’avance… touchant ce qu’on appelle notre présent.  Si cinématographiquement il y a effectivement beaucoup à redire et si le divertissement n’est pas aussi enthousiasmant qu’espéré, cette curieuse production esthétiquement tellement dans son époque, séduit certainement dans ses accents d’œuvre d’anticipation.
Image
Petit objet culte, mais aussi petit objet rare, Electronic Dreams n’a pas vraiment connu de distribution solide durant de longues années, entre des VHS crados et des DVD de secondes mains voir pirates. Pour son retour en France, et en Bluray, le film nous parvient dans sa dernière remasterisation connue (en 2017 déjà ) effectuée cependant à partir d’une source vidéo plus ancienne. Pas de nouveau scan à la source, mais un nettoyage effectif pour un résultat très propre et très stable, et qui surtout ne dénature jamais le grain marqué d’origine et les contours légèrement flous de la photographie. Bien entendu la définition aurait pu être plus poussée, et les plans sombres s’en ressentent, mais l’esthétique des 80’s est bien restituée et le piqué est tout à fait convenable.
Son
Le film repose énormément sur sa bande originale et la piste DTS HD Master Audio 2.0 le rappel avec une belle clarté, une certaine énergie et une efficacité indéniable. Au passage les dialogues sonnent de manière naturelle. Un peu moins pour la version doublée française, plus daté et marquée par un mix plus plat, plus écrasé.
Interactivité
ESC Édition propose le film sous deux formats avec d’un côté le digipack cartonné plus fourreau incluant un mini livret et une reproduction de l’affiche, et de l’autre l’une de ces fameuses éditions Video Club au packaging bien rétro ajoutant quelques photos d’exploitations et deux bagdes en sus.
Mais les disques contiennent les même suppléments vidéo avec une longue présentation signée Fabien Mauro (qui ne s’arrête pas aux grands monstres japonais), retraçant les prémisses du film sous la plume de Rusty Lemorande, l’arrivée de Steve Barron, l’importance de sa bande originale dans la production et l’échec de sa sortie. Il aborde aussi le traitement novateur de l’informatique, les grandes lignes des personnages et le ton particulier du métrage avec beaucoup de tendresse.
La seconde partie est confiée à Alexandre Jousse (uniquement en voix off) qui signe un excellent travelling sur la carrière cinématographique de Giorgio Moroder, de Midnight Express à son Metropolis, rappelant comment sa musique a pu façonner et habiter toute la décennie.
Il faut par contre malheureusement faire une croix ici sur les nouvelles interviews du rĂ©alisateur, du scĂ©nariste et du duo d’acteurs enregistrĂ©s pour l’édition amĂ©ricaine. Â
Liste des bonus
Le livret « Pixel Blues » (32 pages), l’affiche 2024 du film, « Giorgo Moroder au cinéma » par Alexandre Jousse (25’), Présentation du film par Fabien Mauro (32’).