EL MERCENARIO

il mercenario – Italie, Espagne – 1968
Support : Bluray & DVD
Genre : Western
Réalisateur : Sergio Corbucci
Acteurs : Franco Nero, Jack Palance, Tony Musante, Giovanna Ralli, Eduardo Fajardo
Musique : Ennio Morricone, Bruno Nicolai
Image : 2.35 16/9
Son : Anglais et français DTS HD Master Audio 2.0 mono
Sous-titres : Français
Durée : 111 minutes
Éditeur : Sidonis Calysta
Date de sortie : 7 avril 2023
LE PITCH
Dans un Mexique en révolte, les frères Garcia, propriétaires d’une mine d’argent, souhaitent mettre leur magot à l’abri. Désireux de trouver du renfort, ils recrutent un mercenaire redouté : Sergeï Kowalski, dit « le Polack ». Mais celui-ci est surveillé et suivi comme son ombre par un voleur de grand chemin, qui voit ici l’opportunité de se saisir d’un formidable butin. Mais la partie s’annonce difficile car, sous l’impulsion de Paco Roman, les ouvriers révoltés de la mine se sont emparés de l’argent…
Les spécialistes
Surtout réputé pour ses westerns crépusculaires comme Django et Le Grand silence (des chefs d’œuvre il est vrai), Sergio Corbucci fut aussi un excellent metteur en scène de western zapata. Avant l’excellent Companeros et le plus anecdotique Mais qu’est-ce que je viens foutre au milieu de cette révolution ? il ouvre le bal avec El Mercenario divertissement déjà à la limite de la parodie… mais à l’humour désenchanté.
Si Sergio Leone abordera cette branche très particulière avec un Il était une fois la révolution mélancolique, Damiano Damiani avec un regard très critique sur le chaos politique italien d’alors dans El Chuncho, Sergio Sollima lui y verra avec fabuleuse trilogie mexicaine (Colorado, Le Dernier face à face et Saludos, Hombre) l’occasion de célébrer la figure du péone, du révolutionnaire issu du peuple et plus généralement ouvrir un authentique débat politique… Pas forcément de manière consciente, mais Sergio Corbucci semble y répondre directement dans son aventure rocambolesque qui oppose puis relie plus ou moins amicalement ensuite un pur mercenaire sans morale incarné par un Franco Nero tout en distance ironique et Tony Musante (L’Oiseau au plumage de cristal) en naïf bourré d’illusions bien décidé à mener la révolution au Mexique. Dans l’arrière-plan une vague histoire de prime et d’or à transporter, mais l’essentiel se joue effectivement dans le rapport de force constamment en évolution entre les deux personnages. L’un est motivé par sa foi en sa mission, l’autre par son opportunisme et son intelligence stratégique qui lui permet de manipuler à peu près tout le monde. Le fait que les deux personnages reviennent régulièrement à un même dialogue « Qu’est-ce que c’est que la révolution ? » et que finalement aucun des deux ne soit véritablement capable d’y apporter une réponse, marque le métrage d’un cynisme constant où chacun s’achète, se vend, trahit et se fait méchamment duper pour un peu de pouvoir et quelques pièces d’or supplémentaires. Corbucci renvoi constamment dos à dos oppresseurs et idéalistes, montrant par quelques scènes à peine comment le second peut rapidement devenir comme celui qu’il combat, comment le héros du peuple peut se transformer en authentique clown.
Des westerns qui chantent
Peut-être pas immédiatement iconique comme dans Django, Franco Nero trouve cependant une nouvelle fois une figure d’anti-héros passionnante et marquante avec « le polack », salopard sympathique et forcément doté de quelques petites valeurs morales épars. Le moteur idéal pour un tel western picaresque au rythme trépidant, bourré de courses-poursuites, de retournements de situation, de braquages de banque et même d’une ville entière au milieux desquels seul finalement le pourtant monstrueux Jack Palance semble un peu sacrifié en cours de route. Tueur sans pitié, tricheur invétéré et grand allié des autorités tyranniques et du grand capital, son « frisé » est pour le coup sans doute trop manichéen pour totalement trouver sa place dans ce tableau baroque jamais dupe, jamais bêtement héroïque, mais pas non plus sans petites notes lumineuses voir d’attachement aux désirs de rébellion. Tourné dans la foulée de l’échec commercial sans appelle du pourtant splendide Le Grand Silence, El Mercenario est certes un léger retour à un spectacle plus commercial, mais Corbucci ne lâche jamais les rênes assurant une mise en scène redoutablement dynamique et habilement orchestrée qui sait rebondir avec une grande habilité sur les thèmes inoubliables d’Ennio Morricone. Épaulé comme souvent par son orchestrateur Bruno Nicolai, le Maestro offre ici parmi ses morceaux de westerns les plus célèbres et entêtants. Du thème sifflé qui accompagne le professionnalisme du mercenaire et qui explose littéralement dans un « Arena » qui cite directement le final leonesque, jusqu’aux cœurs célébrant vaillamment « la Revolución ! » et achève de faire d’El Mercenario l’un des classiques du western italien.
Image
Comme pour Navajo Joe, malheureusement pas de retour à la source ici non plus mais une restauration effectuée à partir d’un master plus daté et sans doute déjà croisé il y a quelques années en DVD. Cependant ce dernier était en bien meilleur condition que le titre précité et la mise aux goûts du jour s’est faite avec beaucoup plus de naturel. Sans abus de filtre de lissage ou de DNR, la définition a été largement revue à la hausse avec des contours bien dessinés, des barbes bien fournies et des déserts bien poussiéreux, tandis que les cadres font preuve d’une belle stabilité et d’un traitement colorimétrique homogène. Plutôt propre et respectueux de l’œuvre, ce master HD n’est jamais impressionnant, mais au moins il est solide.
Son
Désolé pour les puristes ou les accros, pas de trace ici de la version italienne. Il parait cependant clair lorsque l’on observe le mouvement des lèvres que quasiment tout le casting a joué son rôle en anglais ce qui donne forcément au DTS HD Master Audio de cette version postsynchronisée (comme toutes les autres) mono un soupçon de crédibilité en plus. Naturellement les arrière-plans sont toujours un peu écrasés, les atmosphère assez frontales et les dialogues sonnent légèrement plaqués, mais rien de bien étonnant pour ce type de film, ni de vraiment dommageable puisque les dialogues sont clairs et les thèmes musicaux dotés d’une belle présence. Le doublage français ne démérite pas avec un mixage assez proche dans sa rudesse et plutôt bien interprété.
Interactivité
Un seul supplément sur cette édition (bah où sont passées les présentations d’antan ?) mais au profit du long documentaire Django, Sartana, Trinita et les autres signé Jean-François Giré. Un film de presque une heure déjà croisée sur certaines chaines du câble, et qui s’efforce de redonner une vision complète et large du western italien, des premières prouesses de Leone à son lent déclin en passant par ses plus grands héros, ses stars et ses metteurs en scène phares. Pas forcément de grandes infos pour les connaisseurs, mais un travelling très complet et rondement mené qui se paye le luxe d’interviewer en cours de route Sergio Sollima, Franco Nero, Terrence Hill, Nora Orlandi, Gianni Garko ou Bud Spencer. Par un amoureux du genre, pour les amoureux du genre.
Liste des bonus
Django, Sartana, Trinita et les autres de Jean-François Giré (59’).