ÉCHEC AU GANG
La banda del gobbo – Italie – 1978
Support : Bluray
Genre : Policier
Réalisateur : Umberto Lenzi
Acteurs : Tomas Milian, Pino Colizzi, Isa Danieli, Luciano Catenacci, Sal Borgese…
Musique : Franco Micalizzi
Durée : 98 minutes
Image : 2.35 16/9
Son : Italien et français DTS HD Master Audio 2.0
Sous-titres : Français
Éditeur : Le chat qui fume
Date de sortie : 14 décembre 2023
LE PITCH
Rome, années 1970. Tandis que Sergio Morazzi, dit Monezza, vit de petits larcins et de boulots précaires, son frère jumeau, Vincenzo, surnommé le Bossu, est un bandit de grande envergure, revenant dans la capitale après un séjour en Corse. Vincenzo envisage de braquer un fourgon blindé, avec l’aide de complices parmi lesquels Milo Drogovic et Perrone. Mais ces derniers décident d’éliminer le bossu une fois le braquage achevé…
Dr. Tomas & Mister Milian
Pour sa première sortie en HD en France, Échec au gang apparaît dans une édition complète et une version joliment restaurée. L’occasion de savourer l’un des meilleurs films de Lenzi ainsi que l’une des interprétations les plus incroyables de Tomas Milian.
Plutôt habitué aux pellicules sécuritaires mettant en vedette Maurizio Merli, Umberto Lenzi signe ici un petit chef d’œuvre du néo-polar italien, où un Tomas Milian en forme olympique prend totalement à revers le schéma habituel du réalisateur. En effet, ce n’est pas la police, incarnée ici par le mollasson Pino Colizzi, qui tient le haut du pavé mais bien les bandits et les déclassés, avec les deux personnages joués par Milian, Er Monezza (littéralement l’ordure, la poubelle) et Il Gobbo (le Bossu). Nous avions déjà eu l’occasion de croiser ces deux lascars, déjà interprétés par Milian, dans La Mort en sursis et L’Exécuteur vous salue bien pour Monezza et dans Brigade spéciale pour il Gobbo.
Bien que l’histoire originale du film ait été écrite par le cinéaste, difficile de nier l’apport essentiel de Milian qui en plus de tenir un double rôle, signera tous ses dialogues soit une partie conséquente du film. Ainsi les deux figures du genre deviennent ici des frangins diamétralement opposés : d’un côté, Monezza, le « simplet » qui cache bien son jeu et qui vit de petits boulots ; de l’autre, Il Gobbo, truand d’envergure craint et plein d’une colère vengeresse. Deux personnages hors du système et qui sous la plume de Milian deviennent de véritables contestataires. Entre autres séquences mémorables, on retiendra une incroyable soirée dans un restaurant chic où Il Gobbo, moqué et humilié par les riches convives, finira par leur faire avaler un discours à mi-chemin entre gauchisme et anarchisme… et par la même occasion des laxatifs « pour ch*er leurs os sacrés » !
La fin d’une époque
Le tout est assaisonné de chansons d’Antonino Venditti, chanteur romain engagé et libertaire. Véritable fan de l’artiste, Milian l’est aussi dans le film, et les scènes où Il gobbo écoute, voire chante ces chansons atypiques et osées sont un vrai régal. Ce film, qui fut la dernière collaboration entre Milian et Lenzi, consacre une nouvelle fois le talent hors-pair de l’italo-cubain, tantôt drôle, touchant voire romantique puis carrément inquiétant. Alors que le film aurait pu sombrer dans la pure comédie, à l’instar de la « série » Flics en jean, Lenzi parvient à trouver l’équilibre entre action, gags et un véritable fond contestataire rarement entrevu dans sa filmographie. On ne pourra donc que regretter que cette année 1978 marqua la fin de l’«amoddio » (contraction de amore (amour) et oddio (haine)) qui régnait entre les deux artistes et qui avait accouché de films incroyables comme La Rançon de la peur, Bracelets de sang ou encore Le Cynique, l’infâme et le violent.
Accompagné par la BO du toujours efficace Franco Micalizzi, le film est également peuplé de seconds rôles incontournables du Bis italien comme Nello Pazzafini, Luciano Catenacci, Sal Borgese, Carlo Gaddi… Alors qu’en 1978, le poliziottesco a déjà entamé son déclin et une certaine mutation vers la comédie ou les polars napolitains mettant en vedette les chanteurs de sérénade, La banda del gobbo est une incontestable et surprenante réussite.
Image
Pour une première sortie en France, hormis une lointaine version VHS, le film se présente dans une version de toute beauté. Le grain est bien présent mais discret, les couleurs éclatantes et les tonalités des contrastes parfaitement restitués.
Son
Les deux versions sont présentées en Mono. Elles s’avèrent toutes deux de qualité, mais nous ne pouvons que vous conseiller d’apprécier le film en italien pour apprécier les talents du doubleur de Tomas Milian, Ferrucio Amendola. A noter, un joli mixage de la BO qui rend grâce aux talents de Franco Micalizzi.
Interactivité
Comme Le chat se montre souvent généreux, nous avons droit à plus d’une heure de bonus, avec notamment la présence de Umberto Lenzi (mort en 2017) qui évoque son amour des polars américains des années 1950, le fait qu’il conçut la quasi-totalité des scénarios de ses films, dont Echec au gang. On en apprend aussi un peu plus sur la technique artisanale et fastidieuse utilisée pour faire apparaître les deux Tomas Milian à l’écran. Enfin, le fameux « amoddio » (terme inventé par Milian, contraction de « amore » et « oddio » (haine), pour qualifier sa relation avec Lenzi) se ressent quand Lenzi évoque une « blessure » lorsque Milian tenta un projet sans lui (Il giustiziere sfida la città (Bracelets de sang)…qui sera finalement réalisé par Lenzi !) ….
On retrouve aussi avec plaisir le sympathique Franco Micalizzi, compositeur de musiques de films notamment du Trinita de Barboni mais aussi de très nombreux poliziottesci notamment avec Lenzi. Il se remémore sa relation de travail avec Lenzi « un homme sans fioritures » qui n’avait jamais rien à redire sur ses BO, parle d’un des éléments clés de ses mélodies iconiques, le clavinet « et ses tonalités agressives », qui donne un son caractéristique et demeure sa marque de fabrique dans le genre du néo-polar.
Le monteur Eugenio Alabiso est également de la partie et revient sur ses collaborations avec Corbucci, Leone, Barboni et bien sûr Lenzi avec qui il collabora dès 1967 sur Les chiens verts du désert.
Enfin, l’équipe de Freakorama (société italienne qui réalise la plupart des interviews « italiennes » que l’on retrouve chez nos éditeurs français) a également rencontré le charismatique chanteur Antonino Venditti, inconnu en France mais star en Italie et surtout à Rome, dont il est un symbole. Il parle de ses chansons libertaires (deux sont présentes dans le film, Sora Rosa et Roma Capoccia) écrites en dialecte romain, ses amitiés avec Lou Castel et Pierre Clementi et la carrière de Tomas Milian. Fan de l’acteur, il nous apprend que celui-ci adorait le chanteur et s’en était inspiré pour la création du personnage de Er Monezza. Il rappelle également l’importance fondamentale de Ferrucio Amendola, le doubleur attitré de Milian, qui contribua à la réussite des personnages de l’italo-cubain.
Liste des bonus
« Tomas et Tomas », avec Umberto Lenzi (11’) ; « Le dompteur », avec Eugenio Alabiso (19’) ; « Le Maître du Funk », avec Franco Micalizzi (19’) ; « Le cœur de Rome », avec Antonello Venditti (19’).