DU ROUGE POUR UN TRUAND
The Lady in Red – États-Unis – 1979
Support : Blu-ray
Genre : Thriller
Réalisateur : Lewis Teague
Acteurs : Pamela Sue Martin, Robert Conrad, Louise Fletcher, Dick Miller, Christopher Lloyd
Musique : James Horner
Durée : 93 minutes
Image : 1.85 16/9
Son : Anglais DTS HD Master Audio 1.0
Sous-titres : Français
Editeur : Carlotta
Date de sortie : 16 mai 2023
LE PITCH
La vie de la maîtresse du célèbre gangster John Dillinger, de son enfance avec un père abusif à la prostitution, jusqu’à la cavale avec l’ennemi public n° 1…
Premiers pas dans la mafia
Regarder une production Roger Corman, c’est comme une boîte de chocolats, on ne sait jamais sur quoi on va tomber. Si on regarde souvent ces productions d’un air amusé, certaines méritent que l’on s’y attarde plus que prévu pour diverses raisons. Et celles-ci ont de quoi titiller notre curiosité comme sur ce Rouge pour un truand.
Après avoir édité Cujo puis Alligator récemment, Carlotta continue la réhabilitation d’un modeste artisan du septième art : Lewis Teague, tout droit sorti de New World, la boîte magique Roger Corman. Incroyable de voir l’influence du célèbre producteur dans la profession qui lui a enfin rendu hommage dans le plus prestigieux festival de la planète cette année à Cannes. Écurie de futurs génies comme Francis Ford Coppola ou Martin Scorsese, il a aussi produit de nombreux autres noms aussi volatiles que leurs films. Teague se situe à mi-chemin entre les deux. Homme à tout faire comme beaucoup d’employés du maître de la série B, il a dû faire ses preuves avant d’obtenir le privilège de réaliser son premier film en solo.
Budget serré, casting maison, équipe technique rodée et temps de tournage limité sont le cahier des charges bien connu des productions maison. Au réalisateur de gérer tout cela et de montrer qu’il en veut. Pas de soucis. Enfin… jusqu’à ce qu’il adapte le scénario de John Sayles. Ambitieux, le jeune scénariste du Piranha de l’ami Joe Dante fantasme sur un grand film mafieux lorgnant du coté de Bonnie and Clyde. Adoptant un point de vue purement féminin, il rêve d’un film se déroulant dans la grande dépression post années trente où l’on suivrait le parcours d’une jeune fille de la campagne finissant dans les bras de l’ennemi public numéro un.
B-movie forever
Comment réussir à négocier un scénario si ample avec un budget si limité. Difficile d’imaginer Lewis Teague s’en sortir aussi bien sans son expérience chez Roger Corman. On ne peut imaginer un tel sujet sans une reconstitution un tant soit peu crédible. L’art de la débrouillardise doit faire son effet. On embauche à l’économie jusqu’à recruter un compositeur débutant du nom de James Horner. En se concentrant sur ses angles de caméra et sur des bâtiments d’époque, le réalisateur arrive à donner illusion à son sujet grâce à une équipe technique bien rodée à l’exercice. On récupère sur le budget en réutilisant les décors à droite et à gauche et en convoquant des acteurs maison ou en perte de vitesse. Si la trogne de Dick Miller et de Robert Forster n’est pas surprenante dans la production, celle de l’oscarisée Louise Fletcher est plus incongrue dans celui d’une tenancière de bordel. Elle croise la route de Christopher « doc Brown » Lloyd qu’elle avait déjà côtoyé sur le tournage de Vol au-dessus d’un nid de coucou. Au chômage depuis l’arrêt de sa série Les Têtes brûlées, l’interprète de Jim West, Robert Conrad, endosse la tenue du fameux John Dillinger qui fait perdre les esprits à la jeune Polly Franklin. La future star de la série Dynastie, Pamela Sue Martin, tient la dragée haute à tout le casting. Le film tient sur son interprétation et elle le traverse avec brio. Elle est de chaque séquences. Celles-ci s’articulent comme autant de scénettes faisant évoluer son héroïne au travers de mille et une aventures, de mille et un sévices. Exploitée, en prison, perdue dans une maison close, elle remplit à elle seule le cahier des charges de la production au détriment des autres acteurs souvent rencardés au rôle de faire valoir. Le film va vite, il est ambitieux mais impossible de s’attarder sur chaque élément avec si peu de temps et d’argent. Dommage. On pense au Bertha Boxcar autre production maison réalisée par Scorsese. Mais le film dans l’état est suffisamment réussi pour ne pas laisser indifférent. Au contraire, on est forcé de rejoindre l’avis de Quentin Tarantino qui dans les bonus évoque le film comme un classique de l’exploitation. On peut se mettre à rêver de ce qu’il aurait pu donner avec des moyens dignes de ses ambitions. Mais une chose est sure, il aurait sûrement perdu de sa créativité, élément majeur rendant le film si attachant.
Image
Sorti l’année dernière chez Shout Factory, c’est au tour de Carlotta de nous proposer Du rouge pour un truand chez nous. La restauration est très probante. On est sur une vieille série B mais le master est particulièrement bien équilibré avec un rendu naturel et des couleurs non dénaturées. Si quelques défauts de pellicule subsistent de temps à autre, la compression se montre rigoureuse.
Son
Le film a beau proposer une piste mono, elle avantage -contre toute attente- particulièrement bien le film. Tout en gardant le rendu de l’époque, le son est avantageusement spatial. Les ambiances comme les voix se retrouvent au même niveau d’équilibrage sans que l’un n’empiète sur l’autre.
Interactivité
Toujours intéressant d’entendre un metteur en scène parler de son expérience auprès de Roger Corman. C’est ce que Lewis Teague évoque en complément de ses influences de la nouvelle vague dans le premier Bonus. Quentin Tarantino grand fan du film avait partagé son amour pour Du rouge pour un truand dans un article paru dans le numéro 780 des cahiers du cinéma en date d’octobre 2021. Peu avare d’éloge, il est pour lui le meilleur film d’exploitation sorti de l’usine Corman. On est bien d’accord.
Liste des bonus
« En plein dans le mille » : entretien inédit avec Lewis Teague (19’), « Gagner la partie » : adaptation en images de la critique du film par Quentin Tarantino (18’), Bande-annonce (2’).